Devenir boucher. Ce n’est peut-être pas un rêve très commun, mais c’est une voie professionnelle riche en emplois dans laquelle la Chambre des Métiers et de l’Artisanat (CMA) a décidé d’investir : elle va ouvrir une école des métiers section boucherie.
« C’est un projet expérimental. On ne veut pas décevoir », prévient Jean-Denis Larroze, le secrétaire général de la CMA devant les partenaires du projet, rassemblés ce matin pour la signature du partenariat qui lance officiellement l’initiative.
Dès le mois de janvier 2014, quinze Mahorais vont pouvoir se former à ce métier parfaitement méconnu à Mayotte. Boucher : un choix étrange pourriez-vous dire. Pas tant que ça ! A Mayotte, s’il existe des boucheries, on ne trouve pas de bouchers diplômés. « Et nous allons en avoir besoin, avec les projets d’abattoirs de volailles et de bovins qui se précisent », explique Omar Djoundiy, le président de la CMA Mayotte. Mais les initiateurs de cette formation voient plus loin.
« On va bientôt avoir, chaque année, 5000 nouveaux jeunes sur le marché du travail. Il sera impossible de trouver des emplois à chacun d’eux. Il faut donc former des professionnels qui vont pouvoir aller chercher du travail ailleurs. Et dans le secteur de la boucherie, ce sont 4000 emplois qui sont à pourvoir en métropole ! »
18 mois pour décrocher un CAP
Cette formation en alternance va durer 18 mois. La CMA assure les cours généraux et théoriques puis les partenaires entrent en piste.
La société SAS SRS d’Ida Nel construit actuellement un laboratoire pour la partie pratique de l’apprentissage et met à disposition un formateur technique. Elle fournit également les matières premières, essentiellement de la viande fraiche, qui pourra ensuite, une fois transformée par les élèves, être utilisée par les restaurateurs ou l’industrie.
Le Conseil général est chargé de verser une indemnité de 90 euros mensuels aux stagiaires durant le premier semestre avant que Pôle emploi ne prenne le relais jusqu’à la fin de la formation.
L’ADOM*, enfin, prend en charge les frais de déplacement car cette section boucherie est épaulée par la CMA de la Nièvre. Les bourguignons enverront des formateurs à Mayotte et recevront également des élèves mahorais dans leur Centre de formation des apprentis (CFA).
A l’issu de ces 18 mois, ces apprentis seront titulaires d’un CAP reconnu nationalement, à condition de réussir les épreuves organisées à Dijon.
Des solutions pour l’apprentissage à Mayotte
Cette formation tente de déjouer les embuches qui bloquent les formations en apprentissage à Mayotte. Jusqu’à présent, elles étaient impossibles dans des métiers qui n’existent pas dans le département, l’exemple de la coutellerie, envisagée il y a quelques années, l’illustre bien.
Et envoyer des stagiaires dans les entreprises métropolitaines n’est pas facile : plus un apprenti est âgé, plus son salaire est élevé. Or, les apprentis de Mayotte ont souvent entre 18 et 20 ans et les places leur sont soufflées par des jeunes métropolitains qui n’ont que 15 ou 16 ans. Le partenariat avec la CMA de la Nièvre permet donc d’ouvrir de nouvelles portes.
« Cette expérience montre bien que monter de tels projets innovants, à Mayotte, c’est possible », se réjouit Monique Grimaldi, la directrice de la DIECCTE**. L’expérience pilote pourra ensuite être déclinée sur d’autres corps de métier. Le Conseil général estime que 1500 places en apprentissage sont un objectif à atteindre à moyen terme. On n’est donc probablement qu’au début d’une longue liste de nouveaux métiers mahorais.
RR
*ADOM : Agence De l’Outre-mer pour la Mobilité
**DIECCTE : direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi