Un incendie a ravagé il y a plusieurs semaines une zone reboisée, il y a trois ans, dans le cadre d’un programme européen.
C’était il y a un mois, en pleine sécheresse, sur les hauteurs d’Acoua. Durant deux jours, les flammes ont parcouru l’espace vallonné de la réserve forestière des Crêtes du Nord. L’incendie serait d’origine humaine. De gros dégâts sur des zones récemment reboisées sont à déplorer. Cette zone protégée de 600 hectares est jalonnée de padzas, ces espaces totalement érodés, au sol nu et rougeâtre. Pâturage trop intensif ou déboisement ont laissé ces sols sans couvert végétal.
Les représentants du conseil général, propriétaire des terrains, de l’office national des forêts (ONF) et de la direction de l’agriculture (DAAF) se sont rendus sur place mardi matin pour constater les dégâts. Des dégâts il y en a, puisque la zone a bénéficié du 9e Fonds économique de développement (FED), une enveloppe européenne qui a permis de financer un projet de reboisement de padzas. Débuté sur le terrain en 2010, le programme s’est traduit par la mise en terre de plus de 100 000 pieds d’arbres, de l’acacia mangium principalement, une espèce venue d’Australie, très résistante, pour un budget de près de 500 000 euros. Sur les 64 hectares reboisés, 20 ont brûlé. Avec un coût de 8 à 12 000 euros par hectare, la facture de l’incendie avoisine les 200 000 euros. « Ce feu a été insidieux, il a parcouru une grande surface en épargnant certaines zones, mais a détruit beaucoup de jeunes pousses et endommagé des arbres plus matures », explique Daniel Lesur, responsable des services forestiers du conseil général.
Le reboisement des padzas permet de préserver la ressource en eaux des sols et donc de limiter l’impact d’une sécheresse, à l’image de celle qu’a connue Mayotte ces derniers mois (voir article). L’objectif de ce type d’opération de reboisement est la reconstitution d’un couvert forestier, c’est-à-dire une zone boisée, au milieu de laquelle des espèces locales seront replantées. L’acacia mangium est une espèce invasive et exotique de Mayotte, a priori indésirable sur l’île. Mais c’est une des seules essences suffisamment résistantes pour pousser sur des padzas. « Les espèces locales ont vocation à prendre la place de l’acacia lorsqu’il aura atteint une croissance suffisante », explique Daniel Lesur.
Absence de moyens aériens
L’incendie va donc considérablement retarder les différentes étapes du programme de reboisement. Sur l’origine du feu, il y a peu de doutes. « C’est forcément un incendie volontaire, la foudre ne provoque pas d’incendie ici », analyse Laurent Mercy le directeur de l’Office national des forêts (ONF) à Mayotte. Les agents du conseil général n’ont pu que constater l’avancée de l’incendie, le jour même de son déclenchement, impuissants.
Le site est accessible en quittant la route nationale peu avant le village d’Acoua en venant du Sud, le sentier de grande randonnée (GR) passe à proximité. Malgré une piste forestière goudronnée, les padzas ne sont pas accessibles par les pompiers. « Une intervention qui aurait pu limiter les dégâts », souligne Daniel Lesur. Seuls des moyens aériens pourraient atteindre ces espaces forestiers. La sécurité civile à Mayotte ne dispose pas encore d’un avion ou d’un hélicoptère pour lutter contre les feux de forêts.
En 2013, l’allumage de feu sur les parcelles agricoles ou les zones de pâturage, alliés à la sécheresse, ont engendré la destruction par les flammes de près de 80 hectares de réserves forestières, soit 30 % des destructions recensées ces dix dernières années.
Axel Lebruman