L’INSEE travaille à la « normalisation » des statistiques disponibles sur Mayotte. L’institut a lancé nombre de nouvelles enquêtes et défend farouchement la qualité et l’indépendance de son travail.
Il ne faut pas se fier au personnel du service mahorais de l’INSEE pour juger de son travail. Douze agents et quatorze enquêteurs sur le terrain sont en poste à Mayotte, très peu par rapport à d’autres bureaux. Mais l’institut a mutualisé les moyens avec ses homologues de La Réunion où des chargés d’études peuvent travaillent sur les données de Mayotte et partager leur savoir-faire avec l’équipe en poste à Mamoudzou.
Et du travail, il y en a ! Avec la départementalisation, c’est la mise aux normes nationales de l’ensemble des statistiques de Mayotte qui est en cours. Nous devrions disposer dans les mois et les années qui viennent de bien meilleures informations sur le département, avec des données recueillies et actualisées plus régulièrement, comme pour les chiffres sur l’emploi (voir article), et des champs d’investigations plus larges.
L’illettrisme et le logement scrutés au plus près
« Nous n’avons pas d’éléments suffisants dans beaucoup de domaines pour lesquels nous devons améliorer la connaissance générale, explique Jamel Mekkaoui, le chef de service régional de l’INSEE à Mayotte. L’illettrisme est une question importante sur laquelle nous travaillons mais on peut aussi citer le budget des familles ou encore le logement : nous avons lancé une enquête pour connaître les conditions de vie des Mahorais dans leur habitation. »
L’outil est en état de constitution à Mayotte contrairement à la métropole ou aux autres DOM qui peuvent s’appuyer sur un « vécu statistique » plus important. « Nous pouvons considérer que nous avons 15 ou 20 ans de retard sur les autres DOM mais les changements vont aller assez vite. On ne mettra pas 20 ans à le rattraper. » Pour autant, l’INSEE dispose déjà de secteurs bien rodés comme l’enquête mensuelle sur les prix ou les données sur le PIB (Produit intérieur brut) dont les données 2010 et 2011 devraient être connues prochainement.
Une indépendance revendiquée
L’institut a appris à adapter ses enquêtes au contexte local tant sur la question de la langue que sur les questions posées lors des enquêtes qui ne peuvent pas être les mêmes qu’en métropole.
Il a aussi dû faire face à quelques spécificités locales comme la remise en question régulière de la fiabilité de ses enquêtes. C’est vrai pour l’indice des prix publié chaque mois mais plus encore pour les résultats du recensement publié il y a quelques mois.
« Je suis choqué par la tournure des débats et la contestation du chiffre de l’INSEE. Compte tenu de la machine d’enquête que nous avons mise en place, nous sommes sûrs du chiffre de 212.600 habitants que nous avons annoncé. Ce qui est étonnant ici, c’est que nous avons à convaincre de notre légitimité mais aussi de notre indépendance. Elle est pourtant bien réelle, inscrite dans nos statuts, aussi bien vis-à-vis des politiques que de la population. Nous sommes là pour éclairer le débat public pas pour y prendre part.»
La prochaine étude qui pourrait faire du bruit porte sur le nombre d’étrangers présents à Mayotte (un des résultats de l’enquête INSEE sur la population), une question «qui supplante toutes les autres, s’étonne Jamel Mekkaoui, y compris celle de l’emploi.» L’INSEE travaille. Elle est sereine.
RR