Depuis quelques années, la courbe était en chute libre. Sur les neuf premiers mois de 2013, elle est bloquée à zéro. Aucun nouveau cas de paludisme spécifique à Mayotte n’a été enregistré depuis le début de l’année dans le département. 25 cas avaient été recensés en 2012.
On ne peut pas encore parler d’éradication, il faut pour cela une situation stable sur une longue période, mais c’est déjà une belle victoire que revendique l’ARS.
« Sans fausse modestie, on peut dire qu’on a vraiment bien bossé en cinq ans, se félicite Betty Zumbo, responsable pour Mayotte de la lutte anti-vectorielle à l’ARS. Cette amélioration considérable est d’abord due à notre présence sur le terrain. On connait les foyers de moustiques et on ne leur laisse pas de répit. »
Ce résultat est aussi la conséquence du déploiement des MIILD, les moustiquaires imprégnées d’insecticide longue durée.
L’opération a débuté en novembre 2010 à Dzoumognié, dans le Nord de Grande Terre, village pilote car il était un foyer important de paludisme à Mayotte. Depuis, les agents de l’ARS ont distribué et installé 60.000 moustiquaires et l’opération se poursuit : Pamandzi et Bouéni sont les prochaines communes ciblées dès le mois de novembre.
Moustiquaires et prévention
« Les MIILD ont pour effet de mettre KO, les stegomyia qui véhiculent la dengue et le chikungunya, et les anophèles qui transmettent le palu, explique Betty Zumbo. Ensuite, les moustiques, tombés au sol, finissent pas mourir le plus souvent dévorés par les fourmis. »
En plus de distribuer les moustiquaires, les agents de l’ARS mènent aussi un travail pédagogique auprès de la population pour faire changer les habitudes. Un des enjeux essentiels est, par exemple, d’éliminer toutes les eaux stagnantes qui favorisent l’émergence des larves de moustiques.
Les MIILD obtiennent de bons résultats et semblent bien résistantes : trois ans après le début de l’opération, l’ARS a testé dans ses laboratoires, des échantillons des premières moustiquaires installées. Bonne nouvelle, elles continuent à être efficaces. Les personnes équipées ont été particulièrement soigneuses avec leur MIILD en respectant par exemple les méthodes de lavages préconisées.
Le coût de l’opération peut sembler élevé, environ 1,7 M€ jusqu’à présent mais « il est moins important que celui des méthodes qui nous employions avant les MIILD, insiste Betty Zumbo. Auparavant, nous pulvériserions des produits sur les murs, des opérations qu’il fallait renouveler très régulièrement. »
Encore une quarantaine de cas de « paludisme importé »
Il ne faut pas pour autant se laisser porter par l’enthousiasme que peuvent susciter, à juste titre, ces résultats. D’abord, les aléas climatiques ont été favorables, avec une saison humide relativement peu arrosée l’an dernier suivie d’une saison sèche particulièrement marquée (voir article).
Ensuite, ne plus détecter de paludisme de souche mahoraise n’empêche pas de continuer à recenser quelques cas de «paludisme importé», une quarantaine depuis le début de l’année selon l’ARS. Les cas sont souvent isolés mais ils peuvent aussi entraîner des pics épidémiques dans des zones très ciblées, comme ce fut le cas sur les hauteurs de Tsararano l’an dernier. L’ARS intervient alors massivement, en pratiquant une démoustication pas pulvérisation dans une vaste zone, pour tuer les femelles porteuses de la maladie.
Mais ces cas importés pourraient eux-mêmes diminuer. Les malades concernés ont essentiellement été infectés lors d’un séjour en Grande Comore, principal foyer de la maladie dans l’archipel. Là-bas aussi, les choses pourraient changer : l’île vient de lancer une nouvelle stratégie de lutte avec l’appui de la Chine, en organisant un traitement de masse de la population.
Il est évidemment bien trop tôt pour pouvoir affirmer que le paludisme va disparaître de l’archipel des Comores mais, plus que jamais, les volontés sont bien là.
RR