La rencontre des « membres d’un peuple »

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Allaoui Askandari organisait hier sa 8ème «journée d’une terre et des hommes». Objectif : « faire le point sur la situation du Mahorais dans le développement de Mayotte ».

Il tient bon le cap. Pour la deuxième fois cette année, Allaoui Askandari avait donné rendez-vous hier matin, dans l’hémicycle du Conseil général pour la «journée d’une terre et des hommes» à tous ceux qui souhaitaient réfléchir à la place «du Mahorais dans le développement de Mayotte».
JOURNEE TERRE HOMMESL’occasion de dénoncer, une nouvelle fois, le fait que «le Mahorais a perdu ses propriétés» et qu’il «est plus disposé à être dirigé qu’à être dirigeant». Alors pour «chasser ce diable de l’inconscient mahorais», le programme du jour avait choisi d’aborder des thèmes très divers rassemblés sous des thématiques comme «la rupture avec nos mères» ou «la rupture avec nous-mêmes».

« Ces gens-là »
Comme lors des précédentes éditions, la parole se libère pour dénoncer les lois et les pratiques que «ces gens-là» (les métropolitains) imposent à Mayotte et aux Mahorais. Premières cibles dans le viseur : le Parc marin et les règles qui régissent la pêche. «Aujourd’hui, le Mahorais, dès qu’il prend le bateau, il a peur. On lui dit, tu ne peux pas pêcher tel poisson, tu ne peux pas pêcher dans telle zone (…) A force d’interdire, on finira par dire qu’on ne peut plus manger du requin et du poulpe » explique un pêcheur en omettant toute référence au besoin de protection des espèces et de la biodiversité marine.

«On a interdit de pêcher dans la passe en S pour qu’ils (les mzungu NDLR) puissent amener des touristes y voir des poissons. Ils créent des règles pour eux. Ils ont toujours fait en sorte de s’aider entre eux» scande Faouzia Kordjee avec son éloquence habituelle.

Les «dérives totalitaires» de la laïcité à Mayotte

Pour Hamadale Ambririki, les "dérives" de la laïcité vont "créer des problèmes où il n'y en a pas"
Pour Hamadale Ambririki, les « dérives » de la laïcité vont « créer des problèmes où il n’y en a pas »

Hamadale Ambririki, professeur de Philosophie au lycée de Chirongui, dénonçait ensuite la laïcité et ses «dérives totalitaires» à Mayotte. Comme la loi sur le voile «faite pour apaiser des conflits violents dans les banlieues de l’Hexagone» et qui prépare «la guerre entre Mahorais».
«On veut exporter des lois faites pour des endroits où il y a des problèmes dans des endroits où il n’y en a pas.»

Ces «dérives laïques» ne seraient donc destinées qu’à maintenir les Mahorais dans un état «d’ignorance mortelle» avec comme but de les «acculturer». «Si les Mahorais oublient leur patrimoine culturel, ils seront vides.»

«Inventons un nouveau citoyen de Mayotte»
L’assistance, clairsemée, prend la parole. Un homme dénonce le comportement de ces mzungu qui viennent en terre musulmane avec un chien et qui l’abandonnent en repartant. Un autre réclame un véritable apprentissage de la langue mahoraise, «on ne battit pas l’apprentissage d’une langue non maternelle sur les ruines d’une langue maternelle».
«On n’arrive pas à s’approprier tous ces changements brutaux, explique un troisième. Si on ne parvient pas à concevoir le mode de société qu’on veut, on va subir ad vitam aeternam. Se séparer des Comores, ce n’est pas un projet de société. On ne peut pas être tout le temps des sujets. Inventons un nouveau citoyen de Mayotte».

La référence à l’Alsace avec son organisation religieuse particulière au sein de l’ensemble national ou encore à la Corse a été faite par l’assistance. Et c’est vrai qu’il y avait un peu de l’esprit des «journées nationalistes de Corte» dans cette matinée.
« C’est un travail sur une longue durée, prévient Allaoui Askandari. Il y en a peut-être pour 100 ans. Mais faisons en sorte que ceux qui viennent demain puissent reprendre le flambeau.»
RR