L’athlétisme cherche son chemin

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La piste d'athlétisme de Cavani, entre trous et flaques

Ce dimanche, les pompiers organisent une course de «10 kilomètres» à Kawéni. L’athlétisme à Mayotte quitte les stades pour investir les villes et la nature. L’évolution semble satisfaire le grand public mais ne favorise pas l’émergence d’athlètes de haut niveau dont Mayotte est toujours quasiment dépourvue.

course à pied KaweniLes coureurs qui se préparent à courir les «10 km» dans les rues et les chemins de Kawéni ont intérêt à prévoir les chaussures adéquates. Après les pluies de ce samedi, le parcours s’annonce particulièrement boueux sur certains tronçons.

Kawéni est le début d’une longue saison pour la course à pied à Mayotte jusqu’à la fin du mois de mai : Trail 101 hippocampe (41 km au départ de la pointe Mahabou, voir agenda) le 8 décembre, Trail des Makis, Défi Lavou Bilé, 7 km de Pamandzi en février, le Benara Express en avril… Au total, une dizaine de nouveaux événements vont venir s’ajouter au Run des tortues ou au Raid du bout de l’île qui tentent de s’installer comme des rendez-vous récurrents.

Une pratique grand public hors des stades

«Il y a une nouvelle forme d’athlétisme qui s’installe à Mayotte comme en métropole. L’athlétisme quitte les stades pour investir la nature», constate David Hervé, professeur de sport et conseiller animations sportives à la DJSCS*. De fait, on s’éloigne de la pratique sportive très formalisée vers une logique plus « amateur » en lien avec le bien-être et la santé. La généralisation des Marches des bouénis, en marge des courses organisées à Mayotte, en est la preuve. Encouragées par la DJSCS, elles rassemblent une centaine de marcheuses à chaque édition. A Kawéni, les pompiers ont promis d’en organiser une pour la deuxième édition de leur course l’an prochain.

Pour autant, un sport ne peut pas se contenter d’événements imaginés par des associations plus ou moins capables de gérer des courses. Il faut aussi des clubs et des licenciés pour que Mayotte s’insère dans l’organisation sportive nationale. Et de ce côté-là, l’athlétisme mahorais est clairement en crise.

Plus que deux clubs d’athlétisme

Depuis 2006 où on comptait près de 400 athlètes, le nombre de sportifs licenciés à la Fédération nationale d’athlétisme (FFA) a fondu. Il n’y en avait plus que 243 l’an dernier et à peine 151 depuis le début de l’année. Quant aux clubs, ils ne sont tout simplement plus que deux sur les listes de la FFA. Les six clubs reconnus l’an dernier avaient jusqu’au 31 octobre pour se réaffilier à la fédération. Le CSLA Pamandzi, le TBA Bandrélé, Majicavo et Mzouazia n’ont pas accompli les démarches.
Seuls le club de Labattoir et le RCM de Mamoudzou sont actuellement sur les listes nationales.

La nouvelle n’est pas bonne car ces structures, en plus de permettre une pratique sportive pour le plus grand nombre, ont aussi des missions de détections. «Le RCM dirigé par Sébastien Synave a été, à ce jour, le seul à permettre à une athlète d’atteindre le haut niveau et d’être inscrite sur les listes ministérielles, les seules qui font autorités», relève David Hervé.

Myriam, unique athlète de haut niveau mahoraise

L'unique piste de Grande-Terre va fermer pendant les deux ans du chantier du stade de Cavani
L’unique piste de Grande-Terre va fermer pendant les deux ans du chantier du stade de Cavani

Elle s’appelle Myriam Mlazahahe et sa spécialité est le 400 mètres. Sur la liste ministérielle depuis 2011 en catégorie jeunes, elle a été sélectionnée pour les championnats d’Europe. Toujours affiliée au RCM, elle s’entraine au CREPS** de Boulouris, en région Provence Alpes-Côte d’Azur. Et chose étonnante, cette première athlète de haut niveau mahoraise n’a jamais reçu la moindre subvention du Conseil général. Dans ce domaine aussi, la collectivité brille particulièrement par son manque de sérieux.

Pourquoi une unique athlète de haut niveau à Mayotte ? Avec seulement deux clubs, la détection ne peut se faire correctement. L’UNSS*** qui organise des compétitions et permet à beaucoup d’enfants de pratiquer, est porteuse d’un plan de relance de l’athlétisme à Mayotte. Au mois de mars dernier, la première édition des «Jeunes talents mahorais» a également donné une chance à des adolescents d’être découverts. 200 se sont présentés dans la semaine et parmi eux, un jeune athlète, depuis licencié au RCM, semble particulièrement prometteur.

Pas même une ligue

Pendant que les Antilles bénéficient d’un plan pour entraîner leurs meilleurs éléments sur leur territoire, à Mayotte, on en est encore à des questions beaucoup plus basiques : celles des équipements (seulement deux stades avec des pistes dont celui de Cavani qui va fermer pendant deux ans pour travaux), de l’encadrement (un manque cruel de brevets d’Etat) et simplement des structures organisées et crédibles pour faire vivre ce sport.
Depuis 2011, la FFA a retiré « la qualité de ligue régionale à la ligue de Mayotte » pour de multiples raisons. En dehors des clubs, il n’y a plus de structures locales pour faire le relais et le travail. Et l’objectif de disposer à nouveau d’une ligue reconnue semble toujours hors de portée.
RR

* DJSCS : Direction de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale
** CREPS : Centre d’Education populaire et de Sport
*** UNSS : Union nationale du Sport scolaire

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