La foire au tribunal

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Au tribunal de Mamoudzou

L’audience correctionnelle du mercredi jugeait l’affaire des foires de 2011. Une affaire avec des personnalités sur fond de lutte de pouvoir à la Chambre de Commerce et d’Industrie.

Ansoir Abdou échange avec Me Kamardine à l'issue de l'audience
Ansoir Abdou échange avec Me Kamardine à l’issue de l’audience

De l’aveu même de la procureure, rarement audience correctionnelle aura permis de renverser les a priori des uns et des autres sur un dossier. Sans préjuger de la décision mise en délibérée jusqu’à mercredi prochain, les explications, les failles de l’enquête, les éclaircissements apportés ce mercredi dans le dossier des foires de 2011 ont radicalement changé la face de l’affaire.

Cette histoire, c’est celle de l’affaire des foires commerciales organisées aux abords du marché couvert de Mamoudzou en avril et juin 2011. A la barre, trois personnes, à l’époque élues de la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI) : Amina Soidri Dini et deux figures mahoraises, Ansoir Abdou et Moussilimou Bouhari Payet (actuellement président de la CAPAM, la Chambre d’Agriculture).

Tous les trois sont poursuivis pour «escroquerie». La question est de savoir si les prévenus ont utilisé leur fonction d’élu de la CCI pour obtenir, indûment, de l’argent des commerçants du marché contre une location d’espace pour installer leur stand.
Les sommes évoquées sont importantes. En avril par exemple, 99 emplacements ont été réservés pour un total de 9 480 euros.

Une lettre anonyme

L’affaire démarre par une lettre anonyme envoyée à la CCI. Le courrier dénonce les conditions d’organisation des foires qui animent, en cette année 2011, le centre de Mamoudzou. Les élus mis en cause auraient présenté ces foires comme des événements organisés par la CCI. Problème : non seulement la Chambre n’aurait pas donné son accord mais elle n’a ensuite jamais vu la couleur des bénéfices dégagés.

La CCI porte plainte. La présidente, nouvellement élue à ce moment-là, Ida Nel, est auditionnée. Des commerçants apportent également leurs témoignages. Tout semble charger les prévenus. Mais ce mercredi matin, lors d’une audience particulièrement longue, le scénario de l’escroquerie semble voler en éclat.

Les questions posées au tribunal

Trois questions se posent au tribunal. D’abord, ces foires ont-elles été présentées aux commerçants du marché, comme étant organisées par la CCI ? Non, répondent les prévenus. Si certains commerçants ont pu confondre les différentes responsabilités des prévenus, ce sont bel et bien d’autres associations qui géraient ces foires. Quant à la CCI, si elle n’était pas organisatrice, sa présidente avait donné un accord verbal pour qu’elles puissent être organisées.

Deuxième question : les prévenus se sont-ils enrichis dans cette affaire ? Non, affirment-ils. Les 732 euros de bénéfices de la foire d’avril auraient, par exemple, été reversés à la mosquée du marché couvert pour lui permettre de régler des factures.

Enfin, la CCI a-t-elle été lésée ? Même l’avocat de la Chambre, Me Hesler, semble en douter lors de sa plaidoirie. Les foires se sont installées sur le parvis du Comité du tourisme, un espace géré par le Conseil général, et non sur la zone de l’ancien marché sous la responsabilité de la CCI.

Enjeu de pouvoir à la CCI

Finalement, il apparaît dans ce dossier que les luttes de pouvoir au sein de la Chambre de Commerce ne sont jamais loin. «Nous ne sommes pas naïfs», relève la procureure qui fait part de ses doutes quant à la solidité des accusations. «Il y a un contexte de conflit. Les plaintes ne sont peut-être pas arrivées par hasard.»
«La foire, elle est à la CCI», ajoutent en chœur Me Kamardine et Me Ahamada qui défendent les prévenus.
Et la procureure de souhaiter que «le passage devant le tribunal permette que le cadre d’organisation des foires entre désormais dans les normes».

Le jugement sera rendu mercredi prochain, le temps pour le tribunal d’analyser les 3h30 de l’audience.

RR

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