Mayotte se dote d’un premier labo de recherche fondamentale

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A peine un rythme de croisière entamé, le Centre Universitaire de Formation et de Recherche de Dembéni voit déjà plus loin. Après un état des lieux plutôt encourageant au regard de la situation locale, Aurélia Carré, directrice des services, nous projette dans l’avenir avec notamment un laboratoire fraîchement inauguré.

Houssounati et Abass, ont choisi d'étudier en restant sur leur île
Houssounati et Abass, ont choisi d’étudier en restant sur leur île

C’est une petite structure mais qui domine majestueusement le village de Dembéni : le CUFR a vécu sa deuxième rentrée en septembre 2013. 750 étudiants, soit 20% de plus que l’an passé, se partagent les filières Droit et AES (Administration Économique et Sociale), les plus prisées, et Lettre modernes, Géographie, Biologie ou Mathématiques appliquées. Il est désormais possible d’y suivre les trois premières années de licence. Du côté des instituteurs, 300 sont recrutés à Bac ou Bac +2 (contre Master 2 en métropole) et ont intégré le département Formation des maîtres.

Les défis à mener, comme la montée de compétence pour avoir le niveau métropole, sont «motivants» pour Aurélia Carré qui vient du ministère des Affaires étrangères. Les chiffres avancés traduisent un taux d’échec important, autour de 75% en Droit et AES en 1ère année, «mais en comparant avec la métropole, nous n’avons pas à rougir», assure-t-elle. Bien que le CUFR ne puisse délivrer de diplômes que sous condition de partenariat avec une université, le but recherché de cette mini université est d’éviter la démobilisation, facteur d’échec, que connaissent les étudiants partis en métropole, «nous sommes un sas!»

Un rythme adapté, c’est aussi pour cela qu’Abass, en 1ère année de AES, est resté à Mayotte : «C’est très difficile, mais nous n’avons pas à gérer le problème du versements aléatoires des bourses». Comme sa copine Houssounati, en L2 de droit, qui avance qu’«avant de partir voir comment ça se passe en métropole, il faut déjà tester l’université sur place».

Face au contexte mahorais, Laurent Chassot, directeur du CUFR annonce la future création «d’une licence professionnelle en gestion, en informatique et en tourisme».

«C’est pas sorcier» à Dembéni

Les équipements du laboratoire avec une armoire à -80°C
Les équipements du laboratoire avec une armoire à -80°C

Plusieurs autres projets sont en cours, comme les extensions en modulaire pour intégrer un plus grand nombre d’élèves, et la construction d’un amphithéâtre de 240 places.

Mais la fierté actuelle est le laboratoire de recherche fondamentale, opérationnel grâce aux finances du ministère de la recherche, depuis le début de l’année, première pierre d’un projet plus vaste de « Pôle mer » piloté par la Préfecture. «Ce plateau technique dirigé par Elliott Sucré sera disponible pour les missions de l’université de Montpellier 2 (Sciences), mais aussi pour d’autres organismes comme le Parc Naturel Marin ou IFREMER». En annexe, une animalerie étudie «l’adaptation des poissons et crustacés aux variations de salinité enregistrées entre la saison sèche et la saison des pluies», explique le professeur Lignot, «nous sommes là pour répondre à une question : pourquoi ?»

Le professeur Lignot aux côtés des boites contenant les crabes de l'animalerie
Le professeur Lignot aux côtés des boites contenant les crabes de l’animalerie

Le CUFR se veut à la disposition des problématiques mahoraises : la montée en puissance des cadres locaux en est une, qui commence par la formation des agents de catégorie C : «un partenariat avec le CNFPT (Centre national de la Fonction Publique Territoriale) devrait déboucher en septembre sur la création d’un Diplôme universitaire qui les amènerait vers la catégorie B».

L’équipe travaille à l’amélioration du taux de réussite en proposant un cours de «Français langue étrangère», qui n’existe toujours pas au niveau scolaire,il faut le souligner, «qui permettra aux 180 étudiants originaires des Comores d’améliorer leurs résultats». Sur ce point et le statut des étudiants, un travail est mené en collaboration avec la Préfecture pour éviter les expulsions.

Avec un maximum théorique de 110 personnes par filière, les inscriptions (238 €), sont rapidement saturées, ce que devraient palier les extensions actuelles.

Les griefs des étudiants, «pas assez de temps pour réviser !», «trop de cours au moment des examens», fleurent bon la métropole…

Anne Perzo-Lafond

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