Le choix difficile de porter plainte contre son mari

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CARNET DE JUSTICE DU JDM. Le couple est à la barre. Lui comme prévenu. Elle, comme plaignante. Elle a porté plainte contre son mari au mois de décembre après une scène de violence conjugale, peut-être une de trop.

Panneau salle d'audience TGI MamoudzouC’est une voisine qui a appelé la police le 11 décembre 2013. Elle est inquiète pour Souafia qu’elle pense être victime de coups de la part de son mari. Face aux policiers, l’homme sent l’alcool mais il est «calme et coopératif». Le couple est entendu au commissariat.

Elle raconte que «ça ne se passe pas bien». Il l’a frappé au niveau de l’œil et il lui a demandé de lui donner son passeport pour le détruire. «Si je ne lui donnait pas ma carte de séjour, il allait me tuer», déclare-t-elle alors. L’homme a effectivement déchiré le passeport de son épouse. Elle affirme que ce n’est pas la première fois qu’il lui donne des coups mais «quand il n’est pas ivre, il n’est pas violent.»

Elle se rétracte

Les déclarations de l’homme offrent une autre version. «Je n’ai pas frappé Souafia. Dans la tradition, on ne frappe pas une femme». Elle est alors entendue une deuxième fois et le récit de sa vie de famille est bien différent. Elle n’est plus victime des coups de son mari. L’hématome à l’œil ? Elle s’est cognée à une porte.
«Vous aviez également des traces à la mâchoire et des douleurs au dos. Ce n’est pas de chance de se faire mal sur une porte à trois endroits différents», relève le juge Soubeyran.

Les témoignages des enfants et des voisins semblent pourtant confirmer que Souafia a peur, que l’homme frappe «tout le monde». «Des fois, il la frappe, des fois, ce sont les enfants avec une ceinture ou un câble, tout ce qui se trouve dans ses mains», indique un témoignage.

Pour la troisième fois, les policiers demandent à Souafia de venir dire ce qui se passe à la maison. Elle reconnaît qu’il corrige parfois les enfants, mais elle maintient qu’il ne l’a pas frappée. Elle envoie même un courrier pour interrompre la procédure judiciaire. Mais ce n’est plus elle qui décide, le procureur maintient le cours de la justice.

Un homme qui fait vivre le foyer

A la barre, le couple est clair. Pour lui, il n’y a jamais eu de dispute avec sa femme. Pour elle, la peur qu’elle avait s’est envolée. Le couple habite toujours sous le même toit.
«Vous dites qu’il n’est pas violent parce que vous avez peur des représailles en rentrant à la maison ?» Le procureur pose des questions simples mais lourdes de sens. On apprend alors que Souafia n’a ni travail ni revenu alors qu’il ramène 800 euros chaque mois pour faire vivre le foyer.

A l’issue des débats, l’homme est condamné à trois mois de prison avec sursis et une amende de 500 euros. «Si vous êtes un papa et un mari exemplaires, si on n’entend plus parler de vous, vous ne ferez pas cette peine de prison. Si vous êtes à nouveau violent, vous savez ce qui vous attend.»
L’homme a promis que ça ne se reproduira plus. «Votre mari a fait une promesse à ce tribunal, conclut le juge en direction de Souafia. S’il recommence, vous devez vous protéger et protéger vos enfants. Vous devrez le dire.»
Souafia acquiesse. Elle repart avec son mari.
RR
Le Journal de Mayotte

*Le prénom a été changé

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