L’ancien président de la CAPAM, Dani Salim, était jugé en appel avec deux autres prévenus. Des fraudes qui ont profité d’un système particulièrement laxiste.
Dani Salim, l’ancien président de la Chambre d’Agriculture, de la Pêche et de l’Aquaculture de Mayotte (CAPAM) avait été reconnu coupable d’escroquerie, de recel de biens, de faux et d’abus de confiance en octobre dernier, et avait condamné à 6 mois de prison avec sursis, 50.000 euros d’amende et 5 ans d’interdiction d’exercer au sein d’une association.
«A eux trois, ils tiennent les subventions destinées à l’agriculture mahoraise. Les fonds sont détournés, et le train de vie du président n’est pas celui d’un cultivateur de bananes»… C’est une lettre anonyme arrivée en préfecture qui avait dénoncé Dani Salim, Madjidi Andhume et Madi Laguerra.
Quatre associations sont au cœur d’un système de transfert de fonds, la GPBAM (producteurs de bananes), le Gecopam (Gestion et comptabilité des associations) , Espace Fraîcheur Mahorais (EFM) et l’ADVA (Développement et Vulgarisation agricole).
S’il ne fait aucun doute que des sommes d’argent, 150.000 euros par exemple, ont été transférées de l’une à l’autre, quelques faiblesses du dossier sont soulignées. «Comment expliquer que cette enquête commencée en 2005 est restée 6 ans sur le bureau du procureur?», s’étonne Me Chauvin, l’avocat de Dani Salim.
Pas de contrôle
D’autre part, un coordinateur de la DAAF (organisme d’Etat en charge de l’Agriculture et de la Forêt) supervisait les opérations, et à chaque Assemblée générale annuelle, les comptes étaient validés par un commissaire aux comptes et un expert comptable, le cabinet de Didier Gréco. Ce dernier avait d’ailleurs cessé sa collaboration peu de temps après 2007.
Didier Gréco était entendu comme témoin. Après plusieurs recherches dans l’épais dossier de l’instruction, il était défini que son cabinet avait bien arrêté les comptes, ce qui ne fut pas facile, un des coordinateurs de la DAAF étant parti en 2005 avec des pièces comptables.
La présidente de la Cour essaie alors de comprendre comment une comptabilité peut être validée sans justificatif de dépenses, que l’avocat général énumère : «un billet d’Air Austral, 4 chèques sans identité de bénéficiaire, 10.150 euros non justifiés, etc.» Les demandes de justificatifs du cabinet comptable trouvent plus ou moins de réponses, et la comptabilité finit par être close avec des lettres sur l’honneur. C’est ce qui incitera Didier Gréco à jeter l’éponge.
Autre questionnement, les bailleurs de fonds comme la préfecture, n’ont pas réagi à l’absence de factures. «Il est difficile pour eux d’aller vérifier si une serre est montée», plaide l’avocat général. «C’est le rôle de la Cirad», rétorque Julien Chauvin. Seul le Conseil général réagit à l’époque en demandant le remboursement des sommes dont les dépenses n’étaient pas justifiées.
Si les hommes cités à la barre ont été condamnés en correctionnelle, il apparaît que les actes perpétrés l’ont été dans un océan de laxisme.
Le délibéré sera rendu le 10 juillet.
A.P-L.
Le Journal de Mayotte
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