L’agent du Conseil général, présumé importateur principal de cannabis de synthèse, a lancé à Mayotte un circuit qui a à peine 5 ans en métropole. Des produits présentés comme inoffensifs, mais apparentés aux drogues dures.
Le casse-tête des acteurs publics ressemble à celui qu’a connu la métropole il y a à peine 5 ans. C’est en effet en 2008 qu’apparaissent les « Nouveaux produits de synthèse » (NPS) dont la structure moléculaire copie celle des stupéfiants, en insinuant même un statut légal, assimilables à des médicaments. C’est ce qui pourrait compliquer le libellé des accusations qui pèsent sur 14 interpellés…
« Deux apparaissent comme importateurs et trafiquants », indique le procureur Joël Garrigues qui proposait ce mercredi un point presse en compagnie du chef de corps de la gendarmerie, du directeur de la section de recherche, du commissaire de police et de l’Officier de Douanes Judiciaire.
L’une des deux personnes les plus impliquées, est un agent du Conseil général. Il aurait importé 10 kg de produits. Ils feront l’objet de comparution devant le Juge des Libertés et de la Détention, et de demandes de détention provisoire. « Les autres sont des consommateurs, le juge d’instruction décidera ».
Une législation chinoise permissive
Ces interpellations font suite à 4 mois de travail mobilisant policiers, gendarmes et douaniers, « et ont abouti à la saisie de 3kg de drogue de synthèse, ainsi que 30 000 euros sur compte bancaire et 6 000 euros en objets divers », indiquait le procureur. Ils étaient importés de Chine par voie postale.
Etant donné le statut, « non stupéfiant » des produits saisis, le chef d’inculpation s’apparenterait davantage à une infraction à la législation douanière. Une problématique qui est devenue mondiale puisqu’on dénombre « une nouvelle substance par mois en France, une par semaine en Europe », ainsi que le relate une étude du magasine Tendance.
Gilles Rey, Section de recherche, rapportait 60 saisies à Roissy l’année dernière en provenance de Chine. Une coopération est envisagée à Paris avec la justice pékinoise.
Elle met en avant le défi juridique qui s’impose aux acteurs puisque à chaque interdiction, les trafiquants répondent en créant une nouvelle molécule… Leur vente sur internet, « une trentaine de sites », complique encore la tâche.
Seule la Suède a adopté une législation en se basant sur le risque que peut avoir ces substances sur la santé. Encore très peu d’études ont estimé les effets des NPS, mais Joël Garrigues en énumère certains, « accoutumance, agressivité, infarctus chez les adolescents, troubles psychiatriques… », et en classant les substances comme « proches du crack ».
« La place d’un importateur de ce genre de substance est à Majicavo », assène le procureur, en nuançant malgré tout, « ils risquent 10 ans de prison s’il s’agit de stup, de 3 à 5 ans si on les considère comme médicaments ».
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte