Bernard Cazeneuve, le ministre de l’Intérieur en visite à Mayotte, était attendu sur les réponses à la crise sécuritaire. Pas de mesures annoncées mais un renforcement de la coopération gendarmerie-police et la continuation de plans déjà en vigueur. Les cambriolages baissent, enfin, sensiblement.
C’était la première fois sous la Ve République qu’un ministre de l’Intérieur se rendait à Mayotte. Compte tenu des enjeux sécuritaires dans le département, on pouvait en attendre beaucoup. Mais le discours du ministre de l’intérieur, ce matin devant les élus mahorais à la mairie de Mamoudzou, en a déçu plus d’un.
Certes, le ministre a rappelé que l’Etat apportera un «soutien résolu» à Mayotte dans les processus de départementalisation et de RUPéïsation. L’Etat continuera donc «à accompagner la mise en place des investissements structurants», «pendant un certain temps». Mais «le contrat républicain n’est pas un engagement unilatéral», rappelait Bernard Cazeneuve.
«A la veille du transfert de nouvelles compétences au conseil général, comme les routes nationales et la gestion des établissements scolaires du 2nd degré, celles qui lui sont déjà dévolues doivent être pleinement assurées.» Le ministre a tenu à rappeler le Conseil général à ses responsabilités, en faisant référence au «domaine social, compétence première de la collectivité qui ne représente aujourd’hui qu’une part minime du budget.» Le rappel a du sens mais le donneur de leçon pourrait commencer à s’appliquer le sermon à lui-même. La sécurité est une compétence dévolue à l’Etat dont les Mahorais souhaiteraient qu’elle soit, elle aussi, «pleinement assurée». Et le ministre de l’Intérieur est bien placé pour le savoir.
Sécurité: un constat sans réponses nouvelles
Sur cette question, Bernard Cazeneuve a convenu que «partout en métropole et outre-mer, chacun a droit à la même sécurité.» Mais à Mayotte, le constat est accablant et Bernard Caeneuve ne peut s’y soustraire.
«Mayotte est confrontée, depuis plusieurs années, à une délinquance qui se distingue par la proportion élevée des atteintes aux biens, souvent commises par de jeunes mineurs. Je sais, en particulier, que les cambriolages sont ici commis dans les trois quart des cas par des adolescents âgés de 10 à 14 ans.» Pourtant, aucune mesure concrète nouvelle n’a été présentée.
Le maire Mohamed Majani rappelait au ministre l’attente de Mamoudzou d’un classement en Zone de sécurité prioritaire. Le ministre n’a pas répondu, et en l’occurrence, qui ne dit mot, ne consent pas.
Quant aux forces de sécurité supplémentaires que beaucoup avaient également espérées, peut-être les forces de sécurité elles-mêmes, il n’en est pas question non plus.
Tout juste doit-on se contenter des dispositifs existants qui commenceraient à donner des résultats.
Cambriolages en baisse de 19%
Le ministre nous annonce par exemple, pour le premier semestre 2014, une baisse de 19% des cambriolages enregistrés. Pour lui, c’est le signe «encourageant» des effets du plan de lutte contre les cambriolages mis en place en juin 2013. Il s’agit d’une cellule associant policiers et gendarmes sous l’autorité du préfet.
De la même façon, «le nombre d’affrontements entre bandes, qui sont souvent ici la conséquence de rivalités villageoises, est en diminution. Nos efforts commencent donc à porter leurs fruits», conclut le ministre de l’Intérieur. L’annonce est issue des statistiques du ministère mais elle a de quoi surprendre.
Coordination police-gendarmerie accrue
Le ministre se félicite aussi que 15 CLSPD, contrats locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, soient signés dans 15 des 17 communes mahoraises. Car Bernard Cazeneuve rappelait qu’au-delà «de l’action répressive, la délinquance constatée à Mayotte appelle des réponses au fond sur le terrain de la prévention et de l’éducation, compte tenu en particulier de la forte implication des mineurs, souvent privés de l’appui d’une famille.»
Malgré l’absence de mesures nouvelles, une chose néanmoins très importante est à retenir de ce discours : la coordination entre la police et la gendarmerie devrait devenir de plus en plus importante. Les autres DOM savent d’expérience que cette coopération accrue peut apporter un vrai début de solutions à la crise sécuritaire majeure que connaît notre département. Le ministre aura surement l’occasion d’en parler, demain, lors de sa visite à La Réunion.
RR
Le Journal de Mayotte