Alors qu’il dressait le bilan de la présence de Mayotte au 3e forum des RUP à Bruxelles en septembre dernier, Daniel Zaïdani affirme que Mayotte vient de perdre 44 M€ «car les autres se sont servis». Une certaine concurrence avec La Réunion commence à se faire jour.
Ce devait être un moment consensuel. La réunion débutée (avec 50 minutes de retard) vendredi après-midi promettait de rassembler les membres de la délégation qui a représenté Mayotte à Bruxelles pour le 3e forum des régions ultrapériphériques. Si l’ensemble des participants –politiques, et socio-professionnels- s’est réjoui du déroulement de l’événement, deux préoccupations se sont imposées dans les débats.
Tous s’accordent à dire que si l’Europe est une chance pour Mayotte, l’inverse est également vrai car notre département permet une véritable présence du Vieux continent dans le Nord du Canal du Mozambique.
L’Europe reconnaît logiquement une place particulière à notre département sur certains questions comme celle de la pêche: avec la Guyane, Mayotte est invitée début décembre pour une rencontre avec le comité des pêches à Bruxelles. Et la rencontre intervient alors que des mesures de compensations des surcoûts pour la pêche et l’aquaculture à Mayotte sont enfin actées.
L’enjeu économique est de taille : «Nous ne visons pas l’exportation mais la production pour le marché local, rappelle Régis Masséaux alors que Mayotte réalise «1.500 kg d’importations de produits de pêche chaque année.»
La Réunion installe des intérêts dans la zone
Lors du forum de RUP à Bruxelles, de nombreux contacts ont été noués avec des membres de la Commission mais également avec d’autres RUP comme les Açores pour faire avancer nos intérêts sur ce dossier mais il se pourrait que la compétition provienne d’un front que nous n’attendions pas.
Notre place est tellement stratégique que La Réunion se positionne dans la zone. En investissant dans le secteur de la pêche en particulier aux Seychelles, «il ne faudrait pas que les Réunionnais, jaloux de perdre leur monopole européen dans la région, viennent participer au pillage de notre zone économique exclusive», prévient Régis Masséaux, président du syndicat des pêcheurs de Mayotte.
«Les Réunionnais ont appris à s’organiser et à faire front commun dans les années 1990», souligne Bacar Ali Boto, 1er adjoint au maire de Mamoudzou, pointant du doigt une faiblesse de Mayotte. L’élu est convaincu de la nécessité de copier cette méthode, il propose d’ailleurs au conseil général de «coordonner les politiques de coopération des communes et celle du conseil général», en rapprochant les services pour «travailler ensemble» vers l’extérieur.
La proposition a été immédiatement acceptée avec enthousiasme par Daniel Zaïdani. Le président du CG rappelle que, «plus que jamais, nous avons la nécessité de défendre le positionnement de Mayotte au sein de l’Union européenne sur 2 fronts : vers Bruxelles mais aussi vers Paris.»
«Nous avons perdu 44 millions»
Et le président Zaïdani de lâcher une information qui l’a fortement mécontenté : «400 millions d’euros étaient à répartir entre les RUP au titre du FEDER RUP (fonds européens de développement économique) et la répartition s’est faite sans Mayotte ! Compte tenu de notre population, nous avons perdu 44 millions qui auraient pu s’ajouter à ce que nous avions déjà. Au final, il ne nous reste plus que 2,8 millions d’euros parce que les autres s’étaient déjà servis !»
Et le président du CG de conclure : «Nous avons le PIB le plus faible de toute l’Union européenne. Au moment où on nous explique que le PIB de La Réunion a doublé en 15 ans, ils touchent plus de 2 milliards de fonds européens… Je ne pense pas que réclamer notre dû leur fasse du tort !»
Finalement, Daniel Zaïdani réclame, une fois encore, au gouvernement, qu’il installe à Mayotte un préfet de région qui serait à la tête de services de l’Etat régionalisés, des affaires maritimes à l’ARS, et qui ne dépendraient ainsi plus de La Réunion.
RR
Le Journal de Mayotte