Sujet brûlant d’actualité, le journaliste de Mayotte 1ère radio, Ibrahim Yahaya, interpelle sur l’exercice de la liberté de la presse à Mayotte, alors qu’il indique avoir eu un rapport musclé avec des gendarmes. Leur hiérarchie reconnaît que des erreurs ont été commises.
Ce jeudi vers 15 heures 30, alors que les corps des six victimes du naufrage de kwassas (barques)* étaient rapatriés par l’amphidrome qui reliait Grande à Petite terre, notre confrère Ibrahim Yahaya décide de photographier la scène. Les gendarmes tentent de l’en empêcher, «mais au nom de la liberté d’expression, j’ai continué mon travail», explique-t-il au JDM.
A l’arrivée à Dzaoudzi, les gendarmes lui demandent ses papiers, ce qu’il produit, et d’effacer les photos, ce qu’il refuse. «Ils m’ont alors demandé de les suivre à la Brigade de Petite Terre ».
C’est là que les déclarations divergent : « au niveau du quai de la Douane et face à une grosse flaque d’eau que je ne pouvais traverser sans me mouiller, un gendarme a commencé à m’éclabousser, puis m’a bloqué en pratiquant une technique de strangulation afin de me mettre à terre ». Le journaliste obtient 8 jours d’Interruption Temporaire de Travail (ITT).
Parole contre parole
Après s’être rassis, « j’étais un peu choqué », il parvient à discuter avec les gendarmes mobiles (présents en rotation trois mois sur l’île). A ce moment, la Brigade arrive sur les lieux, ce qui apaise la situation.
Son récit, il l’a posté sur sa page Facebook le jour même. Le colonel de gendarmerie Jean Gouvart est aussitôt passé le voir. Les mobiles ne reconnaissant pas l’agression, c’est alors parole contre parole.
Pour le chef des gendarmes de Mayotte, si le contrôle d’identité est bien légal, « une personne peut être contrôlée dans une zone comprise entre le littoral et une ligne tracée à un kilomètre en deçà », précise même un communiqué de la préfecture ce vendredi, le journaliste était en revanche libre de prendre des photos dans une zone publique, « la demande de contrôle des photographies était inopportune », indique toujours le communiqué.
Selon Jean Gouvart, « des maladresses ont été commises des deux côtés », qui indique que les gendarmes auraient du se contenter d’exprimer leur souci de préserver la mémoire des victimes.
« Le colonel de gendarmerie a présenté ses excuses». Ibrahim Yahaya qui comptait déposer plainte, s’est ravisé, comme il nous le précisait ce vendredi au téléphone.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
*Une septième victime a ensuite été retrouvée