Marie-Laure Piazza laisse un tribunal en bonne marche

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« Tout est en ordre ! »… Marie-Laure Piazza, présidente du Tribunal de Grande Instance dont elle a dû accompagner la mutation, départementalisation oblige, depuis sa chrysalide de Tribunal d’Instance, tire sa révérence au bout de 3 ans. C’est donc l’heure du bilan.

Lors du passage de la ministre Taubira
Lors du passage de la ministre Taubira

Si elle a su réorganiser les services, structurer un tribunal victime de bien de doublons, il n’en demeure pas moins que le TGI n’est pas encore un papillon : « il est encore en phase de construction ». La juge en veut pour preuve le Registre du Commerce et des Sociétés qui vient d’ouvrir ce lundi 12 janvier : « une grande première, la structure précédente étant peu fiable ».

Du côté des évolutions, on notera la remise aux normes des locaux, demandée par la Commission de Sécurité, avec l’achèvement du projet immobilier d’extension en décembre 2016, « il nous permettra d’accueillir véritablement le public qui en arrive à dormir par terre la veille, pour être sûr d’être reçu ! », de la mise en place de la Commission Hygiène et Sécurité qui s’est inquiétée des conditions d’audience dans les salles, l’accès au haut débit, « dernier service de l’Etat à en être pourvu, et encore, ça n’est pas un vrai haut débit ! ».

L’interprète, un expert demandé à Mayotte

Ouverture aujourd'hui du registre du Commerce et des sociétés
Ouverture aujourd’hui du registre du Commerce et des sociétés

Si le nerf de la guerre sont les finances, il a fallu partager les 800 000 euros qui étaient alors gérés en 2011 par le seul compte du Tribunal Supérieur d’Appel, en 3 : le Tribunal d’Instance, le Tribunal de Grande Instance et la Chambre d’Appel. « Il s’agissait des sommes destinées à payer les experts que sont notamment les interprètes ou les médecins, ou les cautions déposées par les justiciables ».

Au 31 décembre 2013, les charges restantes se montent à 330 000 euros, « pas énorme au regard d’autres juridictions ». On pense naturellement aux avocats et à l’aide juridictionnelle tant de fois réclamée : « il a en effet fallu résorber le retard, mais désormais, comme partout en France, c’est leur caisse propre, la CARPA, qui y est consacrée ».

Quant aux interprètes dont le JDM a déjà évoqué le cas, qui ne peuvent avoir un statut d’expert et de salarié, ce qui nuirait à sa neutralité lors des audiences, Mayotte innove « en créant une association où ils seraient adhérents et que nous rétribuerions ». Il s’agit de la part la plus importante du budget de justice, « certains gagnent 4 000 euros par mois sur la traduction de certaines écoutes téléphoniques ». Une expertise qui n’est, dans les autres territoires, qu’exceptionnellement demandée.

TGI cherche greffiers et magistrats

Les interprètes avaient pu rencontrer Christiane Taubira
Les interprètes avaient pu rencontrer Christiane Taubira

Sous sa présidence, les services auront été réorganisés et structurés. Outre le Registre du Commerce, ont été mis en place un Bureau d’ordre civil, « auquel vous avez recours en cas de disputes de voisinage, de divorce », un Service centralisateur des expertises, le Service d’Etat civil, « mais bien que nous ayons regroupé les doublons, les demandes ne sont pas traitées dans un délai raisonnable, faute de qualité de suivi, et en amont, de formation des agents d’Etat civil dans les mairies », ainsi que la présence d’un greffier dans chacun des services.

Les grosses inquiétudes viennent de deux côtés. Les ressources humaines et l’attractivité de l’île tout d’abord : avec 4 à 5 postes de greffier vacants et ceux de 7 magistrats, arrivés pour la départementalisation, mais sur le départ, la juridiction ne pourra fonctionner. « Nous allons démarcher à la sortie de l’Ecole nationale de la magistrature ». Mais les candidats fraichement diplômés auront-ils la dérogation, et seront-ils de taille pour superviser un service ?

Destination Bastia

Démarcher l’École nationale de la Magistrature
Démarcher l’École nationale de la Magistrature

L’autre problème est de taille, puisqu’il s’agit de cette enfance en danger qui, faute d’avoir été entourée à temps, finit à la barre des tribunaux. Un domaine d’action du Conseil général qui avait fait savoir qu’il se l’appropriait désormais, mais pour lequel Marie-Laure Piazza parle d’une situation qui empire. Un sujet sur lequel nous reviendrons plus longuement.

Le barreau enfin et son bâtonnier dont l’élection vient d’être annulée, l’heureux élu, Me Idriss, ne pouvant l’être à un mois prés : « nous avons construit beaucoup de choses avec le précédent bâtonnier Me Saïdal. De la qualité des avocats dépend la qualité du jugement ».

Trois juridictions devraient voir le jour : le tribunal mixte de Commerce, le tribunal des Affaires de Sécurité sociale et le Conseil des Prudhommes. Et une avancée est attendue : le régime de garantie des salaires AGS qui indemnise les licenciement économique, « qui n’existe pas à Mayotte, faute de décret ».

C’est Laurent Sabatier, vice-président du tribunal de Toulon, mais également juge des enfants, qui succède au travailleur de force que fut Marie-Laure Piazza, « en collaboration avec le procureur et les greffiers et tout le personnel », précise-t-elle. Son arrivée est prévue en février, c’est le doyen Jean-Pierre Rieux qui assure l’intérim. Quant à elle, ce sont des cieux corses, comme son mari, qui vont l’accueillir comme présidente de Chambre de la Cour d’appel de Bastia.

Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte

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