Eh bien il a été entendu Mcondro ! « L’affaire ressemble à pas mal d’autres », dira en préambule et d’un air las le juge Jean-Pierre Rieux qui présidait cette audience du 14 janvier. Mais l’alcool n’est semble-t-il pas la seule origine de la violence cette fois.
CARNET DE JUSTICE DU JDM. Ce jour là, la gendarmerie est appelée par le responsable du collège de Chiconi pour une rixe sur le parking, « comme c’est le cas trois fois par semaine dans notre juridiction de Sada », relève G.C., le gendarme venu témoigner à la barre : un médiateur de la société de transport scolaire Matis et un surveillant de collège ont été blessés par un individu armé d’un tournevis.
Lors de leur arrivée, ils sont interpellés par un jeune, « qui nous traite de ‘salope’ en rajoutant ‘je veux aller en prison pour devenir un caïd’ ! ».
Intervenant immédiatement, ils font face à un jeune homme armé, tournevis et tesson de bouteille de rhum en main, sans compter une hache perdue quelques minutes avant, et réalisent qu’il s’agit de l’auteur des agressions. Alors qu’il s’en prend à un gendarme, son collègue mahorais parvient à le désarmer, le tesson de bouteille atteint malgré tout l’abdomen et perce le gilet pare balle. « Les conséquences auraient pu être dramatiques ! », fait remarquer le juge.
Un gilet pare-balle en dommage et intérêt
Le jeune est « copieusement alcoolisé », et si une fois dégrisé, il change de comportement, il n’en démord pas, il cible la prison. Son grand frère y a d’ailleurs fait un passage, lui en a-t-il vanté les mérites ?
Le procureur Philippe Léonardo, récente recrue du parquet, souligne l’absence apparente du prévenu de la salle d’audience, et la rouille sur le tournevis qui aurait pu impliquer des complications de santé chez les victimes. Il demande 15 mois d’emprisonnement avec sursis.
Ce sont deux demandes particulières que fera le gendarme qui étonneront la cour : le remboursement du gilet pare-balle, « il ne vous est par fourni par la brigade ? », s’étonne le juge, « nous devons restituer un vêtement dans l’état de départ », indique le fonctionnaire qui demande également le remboursement des frais médicaux : « à Mayotte, nous devons basculer de la sécurité sociale militaire à la CSSM, ce que je ne savais pas ».
Dans sa collégialité, le tribunal a estimé que Mcondro méritait bien d’aller à Majicavo, mais c’est sans mandat de dépôt, puisque son casier judicaire était vierge, qu’il est condamné à 8 mois de prison et de 5 000 euros de dommages et intérêts à verser aux victimes pour préjudice moral.
Est-ce que la sanction sera bénéfique ?… rien n’est moins sûr. Trois jeunes au fond de la salle d’audience s’en vont, l’allure nonchalante, le pantalon ras les fesses, « on nous a bien appelé, mais on a été sourd ! »… Mcondro ne sera même pas resté pour entendre son verdict…
A.P-L.
Le Journal de Mayotte