Une querelle entre professeurs finit au tribunal

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CARNET DE JUSTICE DU JDM. A la barre du tribunal correctionnel, ce mercredi, des enseignants ont à répondre d’une scène étonnamment violente. Elle s’est déroulée le 27 novembre dernier au lycée de Kawéni. Il est 8 heures lorsqu’un homme fait irruption en plein cours, dans la salle de classe de la victime. Il est lui-même enseignant, contractuel, dans une école du quartier. L’homme prend à partie une enseignante qui a de mauvaises relations avec son épouse, également professeure dans l’établissement.

Salle d'audience A la barreLa scène ne dure que quelques secondes : à peine entré, il attrape la trousse de l’enseignante sur la table et la jette par la fenêtre. Il frappe du poing sur la table, fait tomber sa chaise et bouscule -ou renverse selon les versions- le bureau : les affaires et l’ordinateur de la prof se retrouvent par terre. Il s’approche de l’enseignante, la menace avec son poing : «Tu vas laisser ma femme tranquille, je ne veux plus entendre parler de toi». Il prend également à partie un élève à qui l’enseignante demande d’aller chercher le CPE : «Toi, tu ne bouges pas», lui aurait-il intimé.

Un coup de sang qui peut coûter cher

L’homme repart aussi vite qu’il est arrivé. Ce mercredi, logiquement, il est poursuivi pour violences commises à l’intérieur d’un établissement scolaire et pour agression sur un agent de service public. L’intrusion non autorisée dans le lycée, également punie par la loi n’a pas été retenue.

Pour comprendre les raisons de ce coup de sang, il faut connaître les tensions entre l’enseignante et la femme de l’homme. L’épouse se sent harcelée alors que la seconde lui reproche ses méthodes pédagogiques, les affiches qu’elle laisse installées dans la salle de classe à la fin de ses cours. Et puis il y a les élèves de la 2e qui traversent la classe de la 1ère pendant les cours… Des choses qui paraissent anodines mais qui ont pris d’énormes proportions dans le quotidien des deux enseignantes… au point que le mari se sente obligé d’intervenir.
«Vous pensiez régler le problème de cette façon-là ?» interroge le président.

Porte de la salle d'audience du TGI de MamoudzouLes valeurs de la République

A l’audience, tout accable l’homme. Les rapports des élèves lus par le président, son intrusion dans l’établissement, puis dans la salle de classe, et enfin la scène de violence commise devant les élèves.
La victime est appelée à la barre, elle achève son agresseur. Avec des sanglots dans la voix, elle raconte la boule au ventre lorsqu’elle se rend au lycée, sa crainte qu’il revienne et la menace à nouveau.

Impossible à cet instant de savoir si l’émotion de la victime est feinte ou réelle, mais elle emporte le tribunal avec elle.
Me Abla, son avocat, n’a plus qu’à dérouler sa plaidoirie : «des faits graves», le «viol d’un sol sacré», la «violence d’un homme qui met son poing près de la figure d’une femme», une victime obligée de prendre des somnifères pour dormir…
«Consternant», rajoute le procureur Léonardo. «Il foule au pied les valeurs de la République qu’il est censé servir».

Une crainte irraisonnée

Me Hassan, l’avocate du mis en cause va tenter de ramener un peu de mesure et de démonter les arguments de la partie civile. Le certificat d’ITT de 8 jours ? Il s’agirait d’un papier de complaisance réalisé par un médecin qui serait connu pour en être le spécialiste. La crainte que cela se reproduise ? Depuis les faits, l’homme n’a plus remis les pieds dans l’enceinte du lycée, même lorsqu’il vient chercher son épouse après le travail. C’est donc une peur irraisonnée.
Mais les jeux sont déjà faits.

Le verdict tombe quelques minutes plus tard : 3 mois de prison avec sursis, 1.500 euros de dommages et intérêts, 250 euros de réparations pour l’ordinateur tombé au sol et 750 euros pour les frais de justice. L’enseignant contractuel se voit également contraint de faire avec l’inscription de sa condamnation au fichier B2 de son casier judiciaire. Ce qui signifie que son employeur, l’Education nationale, peut désormais estimer qu’il n’est plus à même de poursuivre ses fonctions.
Il a 10 jours pour faire appel.

RR
Le Journal de Mayotte

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