On l’a oublié, mais Mayotte a accouché du département dans la douleur. Alors que l’assemblée va changer ses têtes dans quelques jours, retour sur ces quatre années d’installation du département.
C’est la der des der : les 19 conseillers généraux, dont une femme, vont laisser la place dans deux semaines à deux fois treize conseillers départementaux, femmes et hommes, au sein d’un hémicycle transformé pour les accueillir. Ils se réunissent ce lundi 9 mars, autour de 12 rapports inscrits à l’ordre du jour.
Depuis le 31 mars 2011 et l’élection de Daniel Zaïdani comme premier président à la tête du tout jeune département, l’hémicycle en a vu de toutes les couleurs. L’élection de ce plus jeune président de département français elle-même fut un roman, avec un basculement trois jours avant, de la majorité UMP de l’ancien président Douchina vers un bloc MDM-PS-Nema.
Alliance secrète
La veille de l’élection du président du département, ce mois de mars 2011, une partie des conseillers s’était enfermée une journée, téléphones éteints, pour arriver le jour J, le 31 mars, et poser l’alliance devant les caméras et les bravos. C’était compter sans la défection des élus UMP qui, voyant la majorité leur échapper, ne se sont pas présentés, pratiquant une politique de la chaise vide, empêchant tout quorum, et par la même, la fête de la départementalisation.
L’alors ministre des Outre-mer Marie-Luce Penchard avait du différer son arrivée de quelques jours. Les têtes bien pleines s’arrachaient les cheveux sur la D-date de naissance de ce 101e département, le président n’ayant été élu que quelques jours après en présence de tous les conseillers cette fois. Mayotte est bien département depuis le 31 mars, jour de la tenue de la première assemblée après les élections, quorum ou pas. On aura frôlé le 1er avril…
Des majorités volages
La fin de l’année 2011 est agitée à Mayotte où les rues sont occupées par une intersyndicale de lutte contre la vie chère, les pierres pleuvent, les cris aussi, et le président Zaïdani donne de la voix contre le préfet Degos, demandant son départ, lors du décès d’un manifestant.
Le même schéma d’une majorité qui ressemble à la marée, avec ses vagues et son ressac, se reproduit le 15 août 2012 lorsque, sous l’impulsion de son ennemi juré Saïd Omar Oili, Daniel Zaïdani perd sa majorité… qu’il regagne quelques jours plus tard, avec une alliance MDM (Mouvement pour le Développement de Mayotte)-UMP-PS.
L’opposition Nema (proche PS)-UMP-PS n’a rien à lui envier du côté des mélanges… en dehors de la présence aux commissions permanentes dont ils se sont exclus, là encore par politique de la chaise vide. Jamais deux sans trois ? L’avenir le dira…
En juin 2013, le président Zaïdani est inquiété : accusé de détournement de fonds publics, il est mis en examen. L’affaire est toujours en cours.
Daniel Zaïdani aura participé au redressement des finances de la collectivité départementale pendant son mandat, comme l’avait souligné la Chambre des comptes, mais la situation est de nouveau tendue en ce début d’année 2015.
Nul doute que l’élu voudra tirer un bilan de ses actions, et cette dernière assemblée pourrait lui en donner l’occasion.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte