Actualisé à 16h34. Coupable. Le verdict est tombé au procès de l’adjudant de gendarmerie Roumiantseff, poursuivi pour un tir de flashball contre Nassur, un enfant de 9 ans, qui avait perdu son œil en octobre 2011. Le gendarme est condamné à 2 ans de prison avec sursis.
Il est 16h10. Le verdict tombe dans l’affaire du tir de flashball. Le gendarme est condamné à une peine de 2 ans de prison avec sursis. A la question de savoir si le gendarme avait exercé des violences volontaires , la réponse a été oui. Ces violences ont-elles entrainé une mutilation et une infirmité permanente? A cette question également la réponse a été oui.
« C’est une grande déception, a indiqué Me Liénard immédiatement après l’annonce du verdict. On forme ces gendarmes à faire usage d’une arme, on leur donne une arme inadaptée et ils se retrouvent devant une cour d’assises. Cette décision n’a pas de sens. » Et l’avocat de constater que « c’est une erreur d’appréciation qui a été jugée comme un crime ». Me Liénard souhaite prendre le temps avant de décider de faire appel.
De son côté, Me Larifou faisait part, à l’inverse, de sa satisfaction et de celle de jeune Nassuir.
Comme cette affaire concerne un gendarme, la cour s’est déclarée incompétente à statuer sur les intérêts civils. La famille va lancer les démarches auprès de l’agent judiciaire de l’Etat pour tenter d’obtenir réparation.
Le délibéré.
14h50. Les jurés se retirent dans la salle des délibérations du tribunal de Mamoudzou. A l’issue de cette 2e journée d’audience dans l’affaire du tir de flashball, ils vont devoir trancher sur la culpabilité de l’adjudant de gendarmerie.
La défense.
Me Liénard, l’avocat de la défense a été logiquement le dernier à prendre la parole dans ce procès. Il plaide l’acquittement: « même si c’est choquant d’acquitter un gendarme qui a tiré sur un gamin qui a perdu un oeil, l’émotion ne doit pas guider le jugement ». Et rappelant le droit, il explique que la loi prévoit des droits qui vont au-delà de la légitime défense. Selon sa plaidoirie, en tant que militaires, les gendarmes peuvent déployer la force armée s’ils sont pris à partie. « S’il y avait des violences exercées contre les gendarmes, vous devrez l’acquitter. »
Qui croire quant à la pierre que Nassuir aurait menacé de lancer ? Pour Me Liénard, le jeune ne ment pas, il ne se souvient simplement pas de ce moment pour cause de stress post-traumatique.
Sur l’usage du flashball, « si vous voulez un coupable, faites venir Nicolas Sarkozy qui a généralisé l’usage du flashball », remarque l’avocat.
« Non, ce gendarme n’a jamais franchi la ligne. Ce mec-là, il fait respecter la loi et il la respecte depuis qu’il est gamin. » Pour l’avocat, une erreur d’appréciation, ça ne mérite pas 5 ans de prison.
Les réquisitions : 5 ans de prison avec sursis.
En fin de matinée, l’avocat général Ampuy avait en effet requis 5 ans de prison avec sursis à l’encontre du gendarme.Il a repris les différents éléments de cette «triste affaire», comme il l’a qualifiée, laissant un enfant et un gendarme «tristes et dévastés».
Pour lui, Boris Roumiantseff est «un bon professionnel de la gendarmerie qui, ce jour-là, a dépassé la fameuse ligne tracée par le Code pénal.» Le caractère volontaire du tir ne fait aucun doute, tandis que la notion de légitime défense ne peut être retenue, compte tenu de la «démesure de la riposte» face aux menaces que représentait le petit Nassuir, âgé de 9 ans au moment des événements.
Dans une première réaction, Me Larifou, l’avocat de l’enfant et de sa famille, s’étonnait de ce réquisitoire : «on aurait demandé une peine supérieure si n’importe quel citoyen avait commis un tel acte», a-t-il déclaré, sous-entendant une éventuelle clémence liée à sa profession de gendarme.
Les parties civiles.
Plus tôt, Me Larifou avait tenté, une nouvelle fois de démonter la position de la légitime défense. Il confronte le jeune Nassuir et Boris Roumiantseff: «Pouvez-vous confirmer, en regardant Nassur les yeux dans les yeux, qu’il allait jeter une pierre ?» Alors que le gendarme confirme, l’enfant reprend la parole : «Il dit que j’avais un caillou. C’est pas vrai», n’hésitant pas à remettre en doute l’émotion débordante du gendarme qui, une nouvelle fois, a éclaté en sanglot plusieurs fois au cours de l’audience : «Si ses sentiments étaient vrais, il aurait demandé à me voir.»
Le dernier interrogatoire de l’accusé.
En début de matinée, l’audience commence par un interrogatoire serré de l’accusé par le président Schmitt. On prend le temps de revenir sur la durée entre la sommation (que personne ne confirme) et le tir.
Il évoque ensuite le tir en lui-même, le gendarme confirmant qu’il avait visé le thorax et non le visage. Le gendarme doit aussi se justifier sur son comportement après le tir alors qu’il n’aurait porté assistance au petit que plus de 5 minutes après l’impact. Mais l’enfant était parti en courant.
C’est aussi sur la formation incomplète du gendarme qui n’avait suivi que la première étape d’une formation en trois temps que le président a demandé des précisions.
Pour finir, le président donne lecture de l’enquête de l’inspection générale de la gendarmerie qui conclue qu’il est «difficile de légitimer un tir face à un enfant de neuf ans.»
A l’issue de ce procès, on peut également noter l’absence des leaders du mouvement contre la vie chère qui fut pourtant la toile de fond de ce drame survenu le 7 octobre 2011.
RR
Le Journal de Mayotte
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