Alors que Madagascar est devenu le pays le plus touché au monde par la peste, Mayotte continue à être épargnée. C’est le résultat d’études menées dans notre département par une équipe de l’institut Pasteur de la Grande Île que dévoile le JDM.
Evoquer la peste, c’est ramener les imaginations au Moyen-âge. Et pourtant à côté de chez nous, Madagascar affronte une épidémie de grande ampleur. La maladie, apparue sur l’île à la fin du XIXe siècle, concerne encore 500 nouveaux patients chaque année. Et selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 263 cas dont 71 mortels ont été recensés depuis septembre 2014. C’est un bien triste record mondial.
Si la brousse qui est concernée, Antananarivo, la capitale, enregistre elle aussi des cas et même deux décès.
La maladie des ports
La peste bubonique, la forme la plus fréquente de la maladie, est transmise par les puces des rats infectés. Sur l’homme, les symptômes les plus visibles sont des bubons qui sont de gros ganglions. La maladie est extrêmement grave -un patient peut mourir en 48 heures- mais elle se soigne très bien avec des antibiotiques si elle est prise en charge rapidement.
Maladie véhiculée par les rats, la peste est logiquement présente dans les ports du monde entier. Et une de ses particularités est qu’elle regagne du terrain. On la retrouve dans des territoires où elle avait été éradiquée depuis longtemps, de la Russie à l’Algérie et jusqu’aux grandes villes de l’Ouest des Etats-Unis. Mais aux USA, contrairement à Madagascar, la maladie reste cantonnée aux animaux sans transmission à l’homme car les contacts sont rares.
Les ports sous surveillance
Partout, les ports de commerce sont pourtant sous surveillance. Dans le monde entier, des chercheurs tentent de savoir si la maladie est présente. C’est le cas également à Mayotte où une équipe de l’Institut Pasteur de Madagascar est venue à deux reprises mener des études l’an dernier. Ce travail était le premier du genre dans notre département.
L’objectif était de déterminer si les animaux qui véhiculent la maladie sont présents et s’ils sont effectivement infectés.
Les chercheurs ont donc installé des pièges pour prendre des rats et ensuite prélever leurs puces pour analyses. Logiquement, c’est à Longoni que les piégeages ont été réalisés : dans l’enceinte du port, dans un rayon de 1 km puis dans des habitations du village de Longoni.
Pas de peste mais les rats sont là
Au total, plusieurs dizaines de souris, rats noirs et musaraignes ont été capturés et toutes leurs puces récoltées. Première bonne nouvelle : les rats du port n’ont aucune puce ! Seuls les rats capturés dans le village de Longoni en sont porteurs mais en faible nombre, une quantité très inférieure au seuil de risque.
Autre information rassurante, les rats de Longoni et leurs puces n’ont pas la peste. Toutes les recherches à Mayotte se sont révélées négatives : «Il n’y a pas de circulation de Yersinia pestis (la bactérie de la peste), dans le port et son voisinage», indiquent les chercheurs malgaches dans les conclusions de leur étude.
Cependant, le rapport invite à la prudence en indiquant que «l’environnement écologique est très semblable à ce que l’on observe à Madagascar. Les acteurs sont présents à Mayotte pour permettre la transmission de la peste en cas d’introduction accidentelle» de la bactérie.
Autrement dit, un rat infecté et porteur de puces arrivant dans le port pourrait propager la maladie à Mayotte. Ces conclusions appellent donc la mise en place d’une surveillance régulière, même si aucun cas de peste n’a été diagnostiqué à Mayotte depuis fort longtemps.
Les brigades anti-rats de Madagascar
A Madagascar, les autorités sanitaires sont dépourvues des moyens dont nous disposons à Mayotte pour répondre aux crises sanitaires. Alors, elles bricolent des solutions. Elles affirment avoir mis en place, dans douze des vingt-deux régions du pays, des brigades anti-rats (BAR). L’objectif est de désinsectiser les zones à risque, de mener un travail d’information auprès de la population mais aussi de traquer les rongeurs. Plusieurs équipes de techniciens seraient en action.
RR
Le Journal de Mayotte