Depuis 1980, une trentaine de projets touristiques ont été portés à Mayotte, aucun n’a abouti. Pourtant, un Schéma de développement et d’aménagement touristique a été validé en 2007 par le conseil général. Mais, mal approprié, il n’aura pas avancé. Le CDTM a donc décidé d’initier un travail étroit avec les communes.
Il faut dire que parmi les problèmes, ceux de l’insalubrité et de l’insécurité sont de la compétence communale.
Les élus ne s’étant jamais vraiment appropriés l’idée qu’un tourisme fort pouvait développer un territoire, le Comité départemental du Tourisme de Mayotte (CDTM) a saisi l’occasion des dernières élections municipales pour les sensibiliser. Ainsi, depuis un an, les représentants d’un Comité technique de pilotage ont pris leur bâton de pèlerin pour se rendre chaque mercredi dans les 17 communes, dans le cadre de la mise en tourisme des territoires. Un terme complexe pour dire que ces territoires ont la parole.
Un premier bilan se tenait ce vendredi matin au CDTM. Une déception pour Michel Ahamed, son directeur, « seules 4 communes sont présentes ». Mais une grande lueur d’espoir si l’on considère qu’elles peuvent par leur dynamisme servir de valeur d’exemple.
Les membres du Comité Technique étaient eux tous présents : la préfecture par son SGAR, la Dieccte (Direction du travail et de l’emploi), le Conseil départemental et la Chambre de commerce et d’Industrie (CCI). Ils ont travaillé avec les communes sur une stratégie en trois temps : nommer un référent tourisme au sein de chaque mairie, établir une stratégie globale pour éviter l’éparpillement des projets, et décliner les actions.
Un Office de tourisme envisagé à Tsingoni
Tsingoni fait figure de meilleure élève : « nous avons mis en place un recensement des sites touristiques de la commune, cascade de Soulou, retenue collinaire, Mont Combani et son gîte. Un site sera déjà réhabilité grâce à un partenariat avec le BSMA et la DEAL (équipement, ndlr), et nous prévoyons un plan papier pour guider les touristes. Nous réfléchissions aussi à la mise en place d’un Officie du tourisme », indique son représentant.
Le problème commun des élus et techniciens présents est l’insalubrité avec un ramassage qu’elles dénoncent comme aléatoire par le SIDEVAM 976, en dépit de leur cotisation au syndicat. Sur le point spécifique du tri des déchets, Tsingoni travaille avec Eco emballages, « de nouvelles bornes seront installées ».
Des fiches d’action ont été élaborées sur les sites à valoriser par le référent tourisme qui a été nommée, « et nous prévoyons la création d’une direction dédiée au tourisme ». Les évènements de ces derniers jours ont porté un coup au travail en cours et à l’image de la commune, « un coup monté » dira son représentant, alors que des jeunes devaient exposer leurs projets à la CCI dans le cadre d’un accompagnement.
Les élus présents
Mais en face, le Comité technique ne se contente pas de mots et demande des actions concrètes, « vous avez fait beaucoup, mais il faut encore une signalétique des lieux avec des pancartes et une liste finalisée des acteurs touristiques sur place. D’autre part, une structure travaillant dans l’agrotourisme se plaint toujours de l’insalubrité et de l’insécurité, ce sont des objectifs que la commune doit viser à court terme », demandent le trio Michel Ahamed, Anaïs Perrin, Commissaire à la vie de l’entreprise et au développement productif au service économique du SGAR de la préfecture et Siti Fardi, chargée du développement local au CDTM. Surtout qu’un complexe hôtelier est annoncé entre Soulou et Tsingoni.
A Sada aussi on semble avoir compris les avancées liées au tourisme : une référente, Laïni, a été nommée. Elle est présente ce jour avec l’adjoint au maire, « preuve d’une prise de conscience politique », indique-t-elle. Le schéma de développement touristique sort d’ailleurs de sa plume, avec l’implantation d’un marché les 2ème dimanche de chaque mois, le nettoyage des plages et le travail avec des associations environnementales. Un référent qui devra se faire connaître pour un travail efficace avec ses prestataires et partenaires.
Cibler propreté et insécurité
C’est également main dans la main que sont arrivés élu et DGS de la commune de Kani Kéli. Ils avouent par contre ne pas encore avoir trouvé de référent. En conséquence, c’est à un bureau d’étude que se verra confié l’écriture d’un Schéma d’aménagement touristique, « d’ici le 15 mai ». Nous voulons un plan d’ensemble car un Village vacances s’annonce sur la montée de Chirongui, un site qui intéresse beaucoup d’opérateurs », indique le directeur des services.
Enfin, Chiconi, parlera par la voix de Saïd Abdou, son DGS, de la difficulté à trouver les compétences en interne, et leur incapacité financière à recruter : « malheureusement, ce sera moi qui vais me charger du tourisme ! » Une surcharge de travail qui l’amène à intégrer le développement touristique dans le Projet global de la commune, « en nous basant sur les deux secteurs porteurs, l’agriculture et l’artisanat d’art. Il explique vouloir préserver l’existant (le marché de Coconi, le festival Milatsika etc.), tout en programmant deux projets de formation : 10 jeunes sur le métier d’animateur touristique et d’autres sur l’artisanat d’art.
L’intercommunalité n’est pas oubliée avec un travail sur des sites ou des actions communes, pour rationaliser les outils.
En dehors des deux schémas adoptés, le Comité Technique ne se satisfaisait pas de ce premier bilan lorsqu’il s’adressait aux représentants de communes : « il faut aller encore plus vite et décliner maintenant des actions, sans oublier les deux points noirs, la propreté et l’insécurité ».
Le CDTM est bien conscient que la réussite est au bout du chemin pour ces quatre communes au prix d’un travail rigoureux. Car comme l’appuyait Michel Ahamed, le tourisme est un secteur à l’impact multisectoriel, avec des avancées en matière d’assainissement, d’emploi, d’aménagement, donc d’attractivité sur le territoire, donc valorisant l’économie ».
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte