En acceptant de répondre aux questions du JDM, le Premier ministre pose des jalons sur des sujets qu’il sera amené à développer lors de sa visite à Mayotte. Manuel Valls devrait arriver ce vendredi soir pour un déplacement bien rempli tout au long de la journée de demain.
A LIRE SUR LE JOURNAL DE MAYOTTE : Manuel Vall répond aux questions du JDM
Mayotte 2025, c’est parti. Lancé par le président de la République François Hollande en août dernier, le document sera donc acté par Manuel Valls ce samedi, une signature officielle au conseil départemental en même temps que le CPER, le contrat de plan Etat-Région. Pour le Premier ministre, Mayotte 2025 va répondre aux défis «de taille» auxquels Mayotte doit faire face.
L’Etat comme les collectivités locales sont mises face à leurs responsabilités : «Faire que Mayotte soit pleinement intégrée à la République exige que les pouvoirs publics cherchent par tous les moyens une égalité réelle et non pas une ‘égalité sur le papier’», indique Manuel Valls. Il arrive donc avec un déploiement de moyens dans sa besace : 700 millions d’euros qui seront investis en 5 ans dans notre département.
On y trouve les fonds européens (quasiment 400 millions) mais également le CPER, le contrat de plan Etat/Région dont le Premier ministre souligne le montant (889€/habitant), «cinq fois» celui de la moyenne nationale. Pour autant, tout le monde devra participer car si le conseil départemental est impliqué à hauteur de 150 M€ dans le CPER, les communes seront aussi invitées à l’effort financier. «L’Etat les accompagnera dans une gestion plus rigoureuse de leurs finances, leur permettant ainsi de dégager des moyens supplémentaires», précise le Premier ministre.
Un code du travail progressif mais pas d’AME
On ne connait pas encore le contenu exact de la soixantaine de pages du document Mayotte 2025 mais Manuel Valls indique qu’on y trouve une transposition «progressive» du Code du travail national avec «le cas échéant» des adaptations pour ne pas plaquer «de manière trop brutale des normes juridiques qui pourraient susciter des difficultés importantes pour les entreprises et les salariés.»
Un dispositif ne sera clairement pas transposé à Mayotte : l’AME, l’aide médicale d’Etat. Pour le Premier ministre, cela «ne semble pas être une solution adaptée» compte tenu des tensions migratoires. Et face à un risque de saturation du système de santé, il renvoie la balle au conseil départemental dont l’implication annoncée dans les PMI est «une perspective qu’il faut concrétiser».
Les langues comme facteur de réussite
Sa visite mènera Manuel Valls dans le groupe de scolaire de Poroani, et la ministre de l’Education nationale Najat-Vallaut-Belkacem à l’école Badamier 3, en Petite Terre. Et si on pointe souvent du doigt les problèmes du système éducatif, le Premier ministre tient à rappeler le parcours de Mayotte pour parvenir à la scolarisation de 87.000 élèves, de la maternelle jusqu’au centre universitaire. Il relève également l’«effort porté sur les langues pour faire de la maîtrise du français, des langues internationales mais aussi locales comme le Shibushi ou le Shimaoré, un facteur de réussite».
Sur la question de l’immigration, le Premier ministre reconnaît que «malgré 20 000 reconduites à la frontière par an, la situation n’est toujours pas satisfaisante.» Pour lui, un dialogue avec l’Union des Comores doit permettre d’«identifier des solutions globales associant maîtrise des flux migratoires et politiques de développement», sans en dire plus.
Lutte contre l’insécurité : pas en un jour
Enfin, sur la question de la sécurité, sujet éminemment incontournable, le Premier ministre réaffirme la mobilisation de l’Etat mais il reconnaît que l’inversion de «la tendance ne se fera pas en un jour». S’il devrait faire des annonces sur des moyens humains supplémentaires lors de sa visite, il insiste aussi sur la prévention, avec le placement de l’ensemble des communes en géographie prioritaire et la mise en place de comités locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD)… que les collectivités n’ont plus qu’à faire fonctionner, peut-on espérer.
Au final, en se projetant dix ans dans l’avenir, Manuel Valls voit «une société mahoraise qui a su relever des défis compliqués, saisi toutes les opportunités de développement» mais qui sera aussi parvenue à «préserver son identité». Et il prévient : «Mayotte 2025, ce n’est pas ce que l’Etat fera en 2025, c’est ce que chacun de nous fera d’ici 2025.»
Rémi Rozié
Le Journal de Mayotte