Un an de prison pour une folle course poursuite

CARNET DE JUSTICE DU JDM. Tout commence par une surveillance d’un trafic présumé de stupéfiant. A proximité de l’embarcadère de l’amphidrome, les policiers sont en planque. C’est un commerce de chimique, ce cannabis modifié, qui est au cœur de leurs investigations.

Il est 17h20 ce samedi lorsqu’ils pensent assister à une vente. Un individu remet une sacoche à un 2e en échange d’une somme d’argent. Ils interviennent. Si l’’acheteur présumé parvient à disparaître dans la nature, le potentiel vendeur enfourche son scooter et prend la fuite. C’est alors le début d’une invraisemblable course poursuite. Le scooter part en direction de la barge puis fait un demi-tour sur la chaussée et manque alors de percuter un véhicule. Il fonce vers Kawéni.

Il slalome entre les véhicules pour tenter d’échapper aux policiers, file sur la voie de gauche obligeant les voitures à s’écarter brutalement et sans que l’on sache comment, il parvient à éviter de peu les nombreux piétons à proximité, non sans provoquer des cris de stupeur. Bloqué, il finit par abandonner son scooter et s’enfonce dans Kawéni en courant… mais il n’est pas parvenu à semer les policiers qui parviennent après de longues minutes de poursuite à l’interpeller.

Une somme d’argent

En comparution immédiate, il devait donc répondre de refus d’obtempérer à une sommation de s’arrêter, de mise en danger, risque de mort ou de blessures pour autrui et de rébellion.

«Pourquoi avez-vous pris la fuite ?» demande le président Sabatier. «Je n’avais pas d’assurance sur le scooter», répond le prévenu… C’est un peu vite oublier le commerce de stupéfiants dont il est soupçonné. Car dans la course poursuite, l’homme aurait jeté de l’argent, une somme loin d’être négligeable : 3006,55 euros exactement.

Il s’explique : rien à voir avec un quelconque trafic. Il fait des petits travaux, de la soudure ou d’autres bricoles au noir. Et puis il a fait un chicowa et il transportait donc de l’argent mis en commun avec ses proches pour un projet.

Un bon casier

La cour est sceptique d’autant qu’il n’est pas inconnu ni de la police ni de la justice. L’homme a été condamné le 5 décembre dernier à 11 mois de prison dont 6 ferme pour trafic de drogue. Il a aussi été condamné à 1 mois de prison pour une tentative d’évasion du commissariat de Mamoudzou le 21 avril dernier.

Enfin, le 21 avril, il a rajouté deux mois de prison avec sursis supplémentaires pour refus d’obtempérer et défaut de maîtrise… il avait percuté un véhicule de police. Mais il n’avait pas jugé utile de se déplacer pour assister à cette dernière audience. «Il va falloir que vous appreniez à vous arrêter quand on vous le demande. Ça sera plus simple pour vous et pour les autres, ça sera surtout moins dangereux pour vous et pour les autres», insiste le président Sabatier.

La peur du clandestin

«Je pense qu’il a fait ça car il est en situation irrégulière. Il a été emmené au centre de rétention dès sa sortie de la maison d’arrêt sans même avoir le temps de voir sa fille. Il est revenu en kwassa à Mayotte, où il a sa famille, ses proches, son enfance, ses intérêts. Et il a une peur bleue de se voir reconduire à nouveau», plaide Me Gaem, son avocate.

C’est pourtant ce qui l’attend une fois qu’il aura purgé sa nouvelle peine. L’homme a été condamné à 6 mois de prison. La cour a également révoqué une peine de 6 mois de sursis à laquelle il avait été condamné ces derniers mois. C’est donc une année qu’il a à purger à Majicavo et il y a déjà passé sa première nuit après le mandat de dépôt décidé par le tribunal. Le scooter a également été confisqué.

Et ce n’est pas encore fini pour lui car l’enquête sur le trafic de drogue présumé et l’origine de la fameuse somme d’argent continue. Mais c’est déjà une autre affaire.
RR
Le Journal de Mayotte