La très haute marche des financements européens pour l’environnement

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L’hémicycle du conseil départemental accueillait le premier volet du séminaire sur les fonds «horizontaux» européens avec la présentation de Life, le programme destiné à financer les projets environnementaux… Mais qui pourra monter de tels projets à Mayotte?

Le Choungui depuis le Mont Benara
Le Choungui depuis le Mont Benara

Quand on aborde les questions d’environnement, autant savoir de quoi on parle. A Mayotte, l’état des lieux est connu, avec une richesse immense mais aussi dégradée. Sur 374 km2 de terres immergées et 1.500 km2 de lagon, la diversité des milieux naturels est remarquable avec des zones humides, des forêts diverses, padzas, zones littorales, mangroves… de nombreuses espèces de faune et de flore endémiques.

Mais la liste des préoccupations est bien plus longue encore : déchets (92.000 tonnes par an), envasement, érosion, déforestation, urbanisation (légale et illégale), mitage du territoire, détergents, hydrocarbures, plantes envahissantes, eaux usées, brûlis, besoins en énergie, démographie… Sans parler du problème de l’eau, avec plus de la moitié des rivières, qui représentent 61% de notre ressource en eau, en mauvais état.

Bref, l’environnement est un secteur où tant de choses sont à construire. La transformation de Mayotte en RUP, région ultrapériphérique européenne, pourrait représenter une aubaine, nous permettant d’accéder à de nouvelles sources de financement pour monter des projets. C’est le rôle du programme Life, présenté hier mardi par le conseil départemental dans l’hémicycle Bamana. Mayotte n’avait pas pu être intégrée au Life Cap DOM précédent du fait de son statut. Mais il ne sera pas facile de profiter du Life 2014-2020.

Un concours européen

Le président Ibrahim Ramadani ouvre le séminaire en compagnie du maire Majani de Mamoudzou de son 6e adjoint Sidi et Camille Pestre d'Enviropea
Le président Ibrahim Ramadani ouvre le séminaire en compagnie du maire Majani de Mamoudzou de son 6e adjoint Sidi et Camille Pestre d’Enviropea

Camille Pestre, du cabinet Enviropea qui conseille le ministère de l’écologie depuis 10 ans sur ce programme, a fait le déplacement à Mayotte pour présenter le dispositif qui se veut «un instrument financier au service de l’environnement». Les projets finançables dans le programme Life doivent correspondre aux choix politiques de la Commission européenne et se caler dans les grands textes européens comme les directives oiseaux ou habitats, ou les documents biodiversité 2020 et «infrastructures vertes».

L’appel à propositions se fait en mai-juin de chaque année pour une remise des projets en octobre. Le taux de subvention est de 60% du montant global du projet. «C’est un concours européens où seuls les meilleurs projets sont retenus selon un système de points», explique Camille Pestre. En 2013, 40% des projets présentés par la France ont été acceptés. En 2014, le bilan est nettement moins bon. «La compétition est à l’échelle européenne et seuls les projets les mieux notés sont financés.»

Naturalistes, Gepomay ou UICN, quelques uns des acteurs de l'environnement à Mayotte avaient été invités à temps
Naturalistes, Gepomay ou UICN, quelques uns des acteurs de l’environnement à Mayotte avaient été invités à temps

D’où l’importance d’avoir des projets très bien ficelés, cohérents, pérennes et transposables ailleurs. Le ministère de l’écologie propose d’ailleurs, via le cabinet Enviropea, un accompagnement gratuit pour coller le mieux possible aux attentes européennes.

De gros projets portés par des acteurs solides

Mais pour Mayotte, le vrai défi sera la taille des projets. «Life est conçu pour des projets de 500.000€ à 4 millions d’euros. Je le déconseille on dessous de ces seuils car il faut beaucoup d’investissement technique et financier», précise Camille Pestre. Conséquence, il n’y a pas beaucoup d’acteurs en matière de biodiversité, capables de monter de tels dossiers… Et ce n’est pas l’absence ce mardi de la DEAL, de l’ONF ou du Parc naturel marin qui sont de nature à rassurer. Les invitations envoyées par le conseil départemental ont été particulièrement tardives pour certains acteur pourtant essentiels pour monter des projets d’une telle envergure.

Quels acteurs auront les reins assez solides pour monter les projets Life à Mayotte?Des maires aussi avaient fait le déplacement
Quels acteurs auront les reins assez solides pour monter les projets Life à Mayotte?Des maires aussi avaient fait le déplacement

L’autre possibilité est de rejoindre un réseau et d’être la branche mahoraise d’un projet de plusieurs régions. Ainsi, dans le programme Life précédent, la Ligue de protection des oiseaux (LPO) d’Alain Bougrain-Dubourg, a servi de structure d’appui à un programme de conservation et de sensibilisation décliné à La Réunion, en Guyane et en Martinique.

Difficile mais possible

Car malgré tous les obstacles, les autres DOM sont parvenus à faire financer quelques projets, pour le développement de bâtiments à énergie positive, pour les réductions des émissions de gaz à effet de serre dans les pâturages, ou pour la réintroduction d’une dizaine de lamantins en Martinique.

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Protéger l’environnement « enjeu fondamental » pour le département. Ici des Sternes (Photo: Gepomay)

A La Réunion, le projet CoreyeRun, porté par le parc national, a décroché Life à 2 reprises pour la restauration de 30 hectares de forêt semi-sèche et de ses habitats en mettant en œuvre une démarche expérimentale de recréation totale d’un environnement détruit.

Le président Majani a parlé «d’enjeu fondamental pour Mayotte» à propos de la protection de l’environnement. «Mayotte doit pouvoir utiliser toutes les opportunités que lui offre l’Europe», a-t-il ajouté, trouvant un écho dans la position du maire de Mamoudzou, venu, lui aussi ouvrir ce séminaire de 4 jours. Espérons que des projets mahorais émergent. Camille Pestre a prévenu : il faut en général une bonne année pour ficeler un dossier à présenter à la Commission européenne.
RR
Le Journal de Mayotte

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