Le présumé gourou de Saint-Louis et une des membres de sa communauté ont été placés en garde à vue hier mardi matin. L’interpellation a eu lieu dans la maison où ils vivent depuis environ un mois avec une vingtaine de jeunes femmes, des Réunionnaises mais aussi des Mahoraises. Une personne a été arrêtée avec lui. Il pourrait s’agir de sa compagne.
Tous les deux se trouvaient encore hier soir en garde à vue pour «abus frauduleux de la situation de faiblesse d’une personne en état de sujétion psychologique ou physique». Une infraction utilisée fréquemment lors d’enquêtes sur les sectes, punissable de trois ans d’emprisonnement. «On la manie peu fréquemment, et elle est difficile à caractériser», convient le vice-procureur Martin Genêt.
Lundi soir, le magistrat a demandé l’ouverture d’une information judiciaire. L’affaire est depuis donc pilotée par une juge d’instruction. «C’est compliqué, commente une source proche du dossier. On est vraiment dans de l’humain, sur le fil du rasoir, avec cette histoire.» Compliquée, car les 17 victimes présumées défendent bec et ongles celui dénoncé comme un gourou par leurs familles.
Une doctrine particulière de l’islam
À l’issue de leurs auditions, menées hier dans différentes brigades du sud de l’île, elles ont réintégré leur domicile dans le centre-ville de Saint-Louis. Ces femmes majeures, pour la plupart diplômées, revendiquent le droit de vivre comme elles l’entendent, et pratiquer l’islam selon la doctrine de leur compagnon. Quitte à couper les liens avec leurs proches, qui depuis une semaine manifestent devant leur maison.
La situation a dégénéré jeudi, avec l’irruption violente de proches, mais aussi de jeunes désœuvrés, dans l’habitation. Depuis, celle-ci est gardée 24/24h par les forces de l’ordre. Une situation peu commune.
Certaines des «adeptes» ont déposé plainte suite à cet épisode, lors duquel elles ont empêché le lynchage de leur compagnon en formant une barrière humaine entre lui et la foule.
« Il a été arrêté mais elles sont toujours là-bas »
Le mis en cause se défend avoir forcé personne à suivre ses enseignements autour du soufisme, une branche de l’islam. C’est sa compagne qui aurait «recruté» les jeunes femmes, notamment à la fac.
Placé quelques heures en garde à vue suite à la dénonciation d’une proche il y a deux semaines, l’homme en était ressorti sans aucune charge contre lui. Ce sont d’autres témoignages recueillis dimanche par les enquêteurs, et considérés comme de nouveaux éléments, qui ont conduit aux interpellations d’hier.
«Il a été arrêté, mais elles sont toujours là-bas », tempête le père d’une des victimes présumées, bien qu’apaisé par ces arrestations. Ce dernier est persuadé du caractère sectaire de l’affaire. «Ma fille a arrêté ses études à cause de lui. Y’a même des professeurs là-dedans qui ont arrêté de travailler».
Secte ou choix de vie, c’est désormais aux enquêteurs de le déterminer.
Le JDM
avec E.Z. le JIR
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