CARNET DE JUSTICE DU JDM. Un jeune homme de 22 ans a été condamné ce mercredi en fin d’après-midi, à 800 euros d’amende dont 600 euros avec sursis pour apologie publique d’acte de terrorisme et outrage à personne dépositaire de l’autorité publique.
Ce lundi, à Pamandzi, alors que Mayotte, à l’unisson du reste de la France, respectait une minute de silence et rendait hommage aux victimes des attentats de Paris, ce jeune homme avait choisi de passer sa journée avec de l’alcool. Quand les gendarmes arrivent Boulevard du général de Gaulle en fin d’après-midi, ils viennent séparer deux jeunes qui se battent… «Je me faisais battre», rectifie le prévenu. Ils agrippent le jeune qui a déjà descendu une bouteille de vodka, pas mal de gin et qui est passé au rhum.
Les forces de l’ordre le relâche et alors que le jeune s’éloigne, il se lâche: «Vous les gendarmes, vous ne servez à rien! Surtout les blancs, vous n’avez rien à faire ici. Vous êtes juste là pour faire du tort aux victimes. Sales blancs! Fils de p…» Les gendarmes ne bronchent pas, laissent le jeune s’éloigner. Il lance alors: «Vive les attentats! Qu’ils crèvent tous là-bas!» C’est cette phrase qui lui vaut d’être présenté en comparution immédiate au tribunal correctionnel de Mamoudzou. L’apologie publique d’acte de terrorisme est réprimée par une peine pouvant aller jusqu’à 5 ans de prison.
Non radicalisé
Le jeune homme est loin d’être un fou furieux, bien au contraire. Diplômé d’un bac L, il avait commencé un cursus d’études supérieures en lettres modernes. Face aux juges, il s’exprime bien. Il s’excuse de nombreuses fois et tente de remettre la scène dans un contexte alcoolisé. «C’était pas la première fois que je me faisais taper. Avec l’alcool et la colère, j’ai raconté n’importe quoi.»
Et quand on aborde sa personnalité, il surprend le tribunal en livrant un peu de sa vie comme la cour ne s’y attendait pas : «Je ne vais pas à la mosquée, je ne pratique pas. Je ne suis pas plus croyant que ça. Je dis ça pour pas qu’on croit que je suis un extrémiste», explique-t-il.
Une enquête a bien entendu été réalisée sur lui. Téléphone, réseaux sociaux, fréquentations, il n’entre effectivement pas dans la catégorie des personnes radicalisées. «J’ai vraiment honte d’avoir dit ça, même si j’assume», dit-il simplement.
Pas de stage de citoyenneté à Mayotte
Pour la procureure Guégan, aucune complaisance : «Ce que les terroristes ont visé, c’est précisément notre mode de vie, cette liberté que vous avez de sortir, de boire, de boire de l’alcool sur la plage toute la journée». Quant aux insultes proférées contre les gendarmes, elle pointe le manque de cohérence de ce jeune homme qui attend actuellement un renouvellement de son contrat d’agent de sécurité au Conseil départemental et qui connaît le difficile métier du maintien de l’ordre. Elle réclame 2 mois de prison ferme avec mandat de dépôt.
Me Saliceti, l’avocate du jeune homme, va retenir son problème avec l’alcool : «Quand il commence à boire, il n’a plus de limite, il ne s’arrête plus, il fait n’importe quoi». Elle plaide une peine de sursis avec mise à l’épreuve et surtout une obligation de soin.
Le tribunal va choisir une autre voie. «Le tribunal estime que la peine la plus adaptée aurait été le stage de citoyenneté. Mais malheureusement, il n’est pas encore mis en œuvre à Mayotte», regrette le président Bourin. Le jeune écope donc d’une peine d’amende, «la cour a tenu compte des circonstances particulières», a expliqué le magistrat.
Le jeune homme est prévenu. En cas de réitération, il est évident que la sanction ne sera plus du tout aussi clémente.
RR
Le Journal de Mayotte