La vice-recteur Nathalie Costantini et le principal du collège de Doujani Jean-Michel Baudoin, proposent aux parents d’investir le collège. Une présence pour surveiller des études et ramener du respect et de la sérénité.
La réunion avait été programmée avant les attentats du 13 novembre. Et de fait, s’il a été question d’apprentissage de la tolérance aux enfants, c’est le thème initialement choisi qui a occupé l’essentiel de la rencontre de ce samedi. La vice-recteur Nathalie Costantini, le principal Jean-Michel Baudoin et les parents d’élèves du collège de Doujani se retrouvaient après les débordements impliquant des enfants du village lors du mouvement social il y a 10 jours. Il s’agissait aussi de tenter d’impliquer une nouvelle fois les parents alors que l’établissement est la cible de très nombreuses intrusions depuis le début de l’année scolaire.
La situation était la même l’an dernier. Le nouveau bâtiment à peine mis en service, les vidéoprojecteurs et autres matériels pédagogiques étaient alors régulièrement pillés et les portes forcées. A l’époque, les responsables de l’établissement avait fait appel aux cadis et aux imams pour lancer un appel à la responsabilité lors des prières. Et la situation s’était rapidement apaisée. Mais cette année, face aux vols répétés de matériels informatiques et aux dégradations, le principal, son adjointe, une partie des CPE fraîchement arrivés sont un peu désarmés. Lorsque les équipes changent dans l’éducation nationale, les transmissions se font manifestement très mal.
L’équipe éducative tentait donc de reprendre la main, avec une proposition majeure : que les parents investissent l’établissement. «Nous avons besoin de vous», leur a dit sans détour le principal, rappelant qu’à chaque fois que des adultes du village sont présents, la sérénité est de retour dans les salles de classe.
«Venez nous aidez»
La vice-recteur a présentée en détail ce projet à multiples facettes. Il s’agit d’abord que les parents s’approprient l’établissement. «Tout ce qui a été construit ici, ça peut être à votre disposition. Je suis prête à tout vous mettre à disposition, si vous souhaitez une salle, où si vous voulez travailler sur les ordinateurs», a-t-elle indiqué. Le pari est que les parents, présents dans l’établissement pour des motifs autres que les enjeux scolaires, montrent la voie du respect, du matériel comme des autres, aux plus jeunes.
L’idée est aussi de les associer plus étroitement aux temps scolaires. Si des adultes assistent déjà à certains cours, il s’agirait de systématiser leur présence avec un objectif : que les collégiens restent dans l’établissement toute la journée, même entre deux heures de cours.
«Si on veut que les élèves restent dans le collège, il faut que vous veniez nous aider. Avec vous, ils pourront travailler dans les salles qui seront libres à ce moment-là», expliquait la vice-recteur. Il s’agit donc de mobiliser des parents pour surveiller des temps d’études pour que les enfants restent en sécurité dans l’établissement… et qu’ils n’aient pas, non plus, la tentation de quelques dérives à l’extérieur.
L’autorité des pères, une nécessité
Les bonnes volontés sont appelées à se signaler auprès du chef d’établissement et elles devraient être nombreuses, si on en croit le passé du collège –un des premiers à avoir structuré une association de parents d’élèves active à Mayotte- mais aussi les réactions dans l’assistance. Comme ce père qui a expliqué aux autres parents qu’il a prévenu son fils, entré en 6e, qu’il devait être sage et écouter… «Je ne veux pas être convoqué parce que tu aurais faits des bêtises», lui a-t-il dit fermement.
Un autre proposait d’accompagner les collégiens comme on fait avec les petits qui vont en maternelle. Il indiquait s’être rendu dans l’établissement pour participer à la minute de silence en hommage aux victimes des attentats. «Le collège nous appartient! Venons!»
Entraide entre les parents
«Si nos enfants n’apprennent pas, on est morts! Quel avenir on aura? Il faut qu’on s’entraide, pour se donner des idées, chercher le meilleur», a indiqué une mère.
«Quand les parents prennent toute leur place, c’est beaucoup plus facile de régler tous les problèmes», ajoutait le principal. L’expérience méritera d’être suivie attentivement pour ensuite, si elle est concluante, être étendue.
Enfin, un trait d’union avec l’année précédente. Ce dimanche soir, la mosquée de Doujani annonce une prière spéciale, à 19h30, pour la sécurité de façon générale, aussi bien dans les campagnes, les villes et aux abords du collège. Un signe supplémentaire que la société commence à se mobiliser.
RR
Le Journal de Mayotte