Le conseiller Chihaboudine se saisit du dossier de la fiscalité foncière

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Chihaboudine Ben Youssouf et son collectif sur une fiscalité dérogatoire
Chihaboudine Ben Youssouf et son collectif sur une fiscalité dérogatoire

Quand on lui demande quelle est sa légitimité, le conseiller départemental de Mamoudzou 2, Chihaboudine Ben Youssouf, se tourne vers la trentaine de personnes qui constitue son collectif, et nous tend les 14.602 signatures récoltées depuis 15 jours que sa pétition circule, « une pétition apolitique », annonce le conseiller départemental centriste, donc d’opposition.

Une pétition qu’il avait lancée lors de la grande réunion sur la fiscalité organisée le 26 février dernier par le président du département Soibahadine Ibrahim Ramadani. Il s’agissait alors de faire un point après l’analyse du rapport de la Cour des Comptes et de se mettre en ordre de bataille. Trois groupes de travail avaient été constitués, pour élaborer un document à remettre à Manuel Valls, à sa demande, fin avril.

Le président du conseil départemental Soibahadine Ibrahim Ramadani nous avait indiqué étudier comment y intégrer la pétition du conseiller Chihaboudine. Ce dernier assure avoir l’appui du premier, sans écrit toutefois, pour mener une mission à Paris afin de demander un moratoire de 30 ans sur la fiscalité à Mayotte. Les élus savent qu’ils perdront en tout cas s’ils tentent de mener un combat en ordre dispersé.

58% des propriétaires de maison ne possèdent par leur terrain

L'élu avance 14.602 signatures constatées par huissier
L’élu avance 14.602 signatures constatées par huissier

Mayotte se réveille avec la gueule de bois lorsqu’il s’est agi d’appliquer la fiscalité de droit commun. Car comme le rappelle Chihaboudine Ben Youssouf, elle en devient inconstitutionnelle ici : peu de personne paie pour la majorité, « et même, certaines personnes sont imposables et d’autres non dans un même quartier », les terrains ne sont pas titrés, « plus de 58% des propriétaires ne possèdent que le bâti », les cadastres pas bouclés, « c’est pourtant une compétence de l’Etat ».

L’élu demande donc deux choses : tout d’abord une suspension de l’imposition sur 30 ans, « l’Etat devra y pallier », et s’en explique : « En 7 ans, l’Etat n’a régularisé que 60 terrains en Zone des 50 Pas géométrique, sur 500 dossiers. Il faudra bien 30 ans pour qu’il parvienne à boucler, comme le conseil départemental de son côté. »

Et c’est son deuxième axe de bataille : proposer que terrains domaniaux comme nationaux soient cédés à titre gratuit, « il y a 22.000 titres à régulariser à Mayotte avant de pouvoir appliquer un impôt. » Un sujet sur lequel la collectivité départementale a déjà statué par délibération en septembre 1996, arrêtant les critères d’attribution de ses parcelles. Remettre les bœufs avant la charrue en quelque sorte.

« Une départementalisation étalée sur 25 ans, pourquoi pas les impôts ?! »

Madi M’dahoma membre du collectif
Madi M’dahoma, « simple citoyen », membre du collectif

Madi M’dahoma, membre du Collectif, s’interroge sur la capacité financière de la population : « Les habitants ne contestent pas devoir payer un impôt. Seulement, en ont-ils les moyens ? Comment un retraité qui perçoit 400 euros en moyenne par mois ou un chef de famille au RSA, à la moitié de sa valeur métropolitaine, pourraient-ils s’acquitter de la taxe foncière ? » On en revient à la spécificité mahoraise où la terre ne fait pas forcément la richesse, et où la transmission d’une maison aux filles fait vite figure de résidence secondaire dans la loi française.

Un effort à demander à l’Etat pendant 30 ans qui n’est pas incongru, selon Chihaboudine Ben Youssouf : « C’est déjà ce qui se passe en Corse. Et lors du Pacte pour la départementalisation, les allocations ont été étalées sur 25 ans. D’autre part, nous avons déjà bénéficié de dérogations semblables dans le passé, comme sur le Fonds national de développement des adductions d’eau, dont nous bénéficiions sans participer, ou le FACé. »Un rapport de force plus poussé avec l’Etat que la position de l’exécutif du département donc.

Un impôt confiscatoire

S’il demande une loi, ses contours restent à déterminer, « je dois voir le député Aboubacar le 10 mars, et nous espérons finaliser notre mission à Paris avant fin avril », explique l’élu. Il met en garde d’ailleurs sur le côté confiscatoire de l’impôt si les choses étaient maintenues en l’état : « obligés de vendre, plusieurs habitants se retrouveraient à la rue, la grogne risquerait de monter. »

Chacun pourra d’ailleurs s’exprimer sur le sujet à travers une marche organisée ce samedi 12 mars à Mamoudzou : « Nous partirons de la place de l’ancien marché, pour remonter aux Services fiscaux par la rue du cinéma, pour redescendre au niveau du CHM vers la place de départ où se tiendront les discours », explique Madi M’dahoma

Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte

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