«Le monde d’aujourd’hui se gagne dans la communication, la télévision, internet et les livres. Et si les gens n’ont jamais autant écrit, les jeunes doivent comprendre que les SMS, ce n’est pas suffisant. Ils doivent absolument s’emparer de l’écriture». Noussoura Soulaïmana a toujours eu l’intelligence et le flair pour pointer les grands enjeux auxquels doit faire face notre département. Bien avant Mayotte 2025, il avait milité pour l’établissement d’un document fixant un cap politique et un rythme pour l’intégration de Mayotte dans l’ensemble national.
Déjà à la tête du Conseil représentatif de Français de l’Outre-mer (CReFOM) de Mayotte, il a installé cette semaine un «comité de soutien et de valorisation de l’écriture et de la lecture». Composée de 10 membres fondateurs, cette instance veut «mobiliser toutes les forces du territoire et toutes les énergies pour promouvoir l’écriture et la lecture dans l’île, encourager les jeunes et les moins jeunes à se mettre à lire et à écrire.»
Pour lui, de fait, tout le monde est concerné: L’école, les familles «pour que les pères et les mères comprennent que c’est important», les politiques qui doivent y voir «une clé essentielle de l’avenir de Mayotte»…
«A mon époque, on ne lisait qu’accidentellement. La lecture n’était pas quelque chose de facile. Aujourd’hui, les jeunes ont les moyens de lire, on doit faire passer l’amour de la lecture».
Développer le plaisir de lire
Dans notre département, la lecture «plaisir» n’est en effet pas si courante. Elle est le plus souvent vécue comme une obligation. «En une génération, on est passé d’une école qui n’existe pas -avec 5% de la population scolarisée- à une école insuffisante pour notre masse d’élèves. La lecture et l’écriture doivent maintenant passer à ce stade de la généralisation pour l’ensemble de la société», affirme Soulaïmana Noussoura.
Et Noussoura surprend lorsqu’il choisit comme première mission pour ce comité, le lancement d’une campagne de rédaction d’un ouvrage dédié à « l’avenir économique et social de Mayotte ». Son idée est de demander à une cinquantaine de personnes (acteurs du monde économique et social, artistes, étudiants ou lycéens, femmes ou hommes politiques…) d’apporter une contribution personnelle de quelques pages à ce livre. «Il faut que les jeunes voient leurs parents écrire. Ca doit jouer un rôle d’entrainement pour qu’ils se disent, ‘mon père et ma mère peuvent écrire avec le peu de moyens qu’ils ont eu, et pourquoi pas moi ?’».
Porter la parole pour l’écrit
Avec cet ouvrage, le comité veut également lancer une «tournée de sensibilisation, de mobilisation et d’encouragement» à l’écriture et à la lecture, en priorité, auprès des étudiants, des lycéens et des collégiens. «La vice-recteur nous a demandé comment elle pouvait nous aider», souligne Noussoura Soulaïmana. «On va créer des prix littéraires pour encourager les jeunes à écrire, il faut aussi qu’il y ait un salon du livre à Mayotte, des maisons d’édition dans les villages…»
Lui-même a d’ailleurs achevé la rédaction d’un ouvrage sur notre département destiné à sa petite-fille, pour transmettre la mémoire et que le Mayotte des dernières décennies ne disparaissent pas des mémoires, emporté par les changements si rapides de notre territoire.
10 ans, un siècle mahorais
«Ce chantier de la lecture et de l’écriture peut prendre une dizaine d’année mais 10 ans, à l’échelle de Mayotte, c’est vraiment très long. Compte tenu de la jeunesse de notre population, en 10 ans, vous touchez beaucoup de monde.»
Le comité a cadencé son travail et doit se réunir vers la fin du mois de mai ou au début de juin avec l’essentiel des contributions recueillies pour son ouvrage. Et nul doute, que Noussoura aura l’occasion de défendre son initiative le 9 avril prochain, pour un dîner du CReFOM consacré à la départementalisation.
«Quand les gens écrivent bien, ils se sentent bien, ils peuvent se développer et développer leur territoire. L’expression, c’est la bonne santé générale», conclut-t-il.
RR
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*Les membres fondateurs du comité de valorisation de l’écriture et de la lecture :
-Fatimatie Razafinatroandro Présidente du Comité du Tourisme de Mayotte,
-Mariame SAID, Vice-Présidente du Conseil départemental de Mayotte en charge de l’éducation, la formation et l’insertion,
-Soula SAID SOUFFOU, Auteur,
-Nassur ATTOUMANI, Auteur et Président de l’APEL( Amical pour la promotion de l’écriture et de la lecture),
-Isabelle CHEVREUIL, Présidente du Conseil d’administration de CUFR( centre universitaire de formation et recherche),
-Nathalie COSTANTINI, Vice-Recteur de Mayotte,
-Noéra MOHAMED, Déléguée aux droits des femmes de Mayotte,
Auxquels s’ajoutent :
-la Directrice de la DRAC de la Préfecture de Mayotte,
-Alain LINCKER auteur et enseignant résidant à Mayotte (L’archipel des songes)
-Youssouf THANI, Président de l’Association pour la francophonie dans l’océan indien.