C’était une annonce du président de la République le 12 janvier dernier. L’Agence française de développement (AFD) devrait se rapprocher de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) dont les missions seront élargies au développement et à la solidarité internationale. C’est la conséquence d’un rapport de mission de 71 pages dans lequel les rôles de l’AFD, de la CDC, de la BPI (banque publique d’investissement) et de l’Iedom sont abordés sans pour autant que des chiffrages précis soient présentés et donc les bénéfices attendus pour les populations et territoires d’Outre-mer réellement étudiés.
«Ce rapprochement permettra d’améliorer le financement de l’Outre-mer où l’AFD intervient en appui aux collectivités et au secteur public comme auprès du secteur privé», indique alors la directrice générale de l’AFD, Anne Paugam.
L’an dernier, l’AFD a engagé 8,3 milliards de financements dont 1,5 milliard d’euros consacrés à l’Outre-mer. «La mission de préfiguration poursuivra ses travaux sur certains aspects qui doivent être affinés en vue des arbitrages interministériels, en particulier sur les Outre-mer, un domaine dans lequel nous souhaitons accroître l’activité globale issue de l’action des deux institutions, en termes quantitatifs aussi bien que qualitatifs», explique Anne Paugam.
Inquiétudes de la Fedom
Pourtant, ce projet inquiète le patronat ultramarin. Jean-Pierre Philibert, le patron de la Fedom, déclarait à l’occasion des vœux de la fédération: «Nous serons très vigilants sur les modalités pratiques de la fusion AFD-CDC. L’AFD accomplit un travail remarquable de financement des investissements des collectivités locales et, c’est moins connu, de soutien au secteur privé (prêts directs aux entreprises, mise en œuvre locale des produits de la BPI notamment en termes de garanties): Il ne faudrait pas que ces spécificités soient altérées par le poids financier et institutionnel d’une CDC historiquement bien plus hexagonale…»
Pour la Fedom, ce projet de fusion AFD-CDC, tel qu’il est conçu à ce jour, n’offre aucune garantie d’une augmentation de la capacité financière de l’AFD au profit de l’Outre-mer.
L’essentiel du projet semble en effet orienté vers l’international et principalement vers le continent africain où la France doit faire face à la montée en puissance de la Chine. Là, les enjeux sont énormes : le continent représente une perspective de plus de 1,2 milliard d’habitants en 2030. Rien à voir avec les 2,5 millions d’ultramarins. L’Outre-mer représente aujourd’hui 19% des engagements financiers de l’AFD. Avec la fusion, demain, ce poids devrait être nettement réduit.
Le sénat en embuscade
Reste que si le projet présente une cohérence certaine à l’international, la Fedom est loin d’être la seule à faire part de ses inquiétudes. Le Trésor, qui n’est pas à l’origine de la réforme, tente d’éviter une prise de pouvoir de la CDC sur l’AFD. Et du côté du sénat, la majorité emmenée par Jean-Pierre Raffarin, rue aussi dans les brancards et demande de disjoindre l’AFD du projet de loi Sapin…
Selon le calendrier annoncé par le gouvernement, le projet de loi Sapin devrait être présenté en procédure normale (deux lectures dans chaque assemblée), entre mai et juin pour la première lecture et à l’automne pour la seconde. Les débats promettent d’être vifs. Et au-delà des aspects techniques, les Outre-mer ont tout intérêt à les suivre attentivement.
RR, le JDM
avec le JIR.