Le député Ibrahim Aboubacar (lire la Tribune libre d’Ibrahim Aboubacar sur le mouvement social) demande un travail en profondeur sur le code du travail à Mayotte. Rien dans l’immédiateté donc, et il compte surtout se démarquer du soutien des élus du conseil départemental, de l’association des maires et du député Boinali Saïd, à l’Intersyndicale.
On ne s’attendait pas à ce que le député mahorais PS Ibrahim Aboubacar trahisse le travail entamé par le gouvernement sur l’adaptation du code du travail avec la mission Ledemé. L’intérêt de sa prise de parole à travers une tribune libre, est qu’elle émane de celui qui a conduit avec rigueur (on ne peut pas en dire autant de tout le monde), son atelier sur un « Cadre institutionnel performant » du document Mayotte 2025.
Il aura lors des échanges avec la Dieccte et les partenaires sociaux établi un calendrier qui peut alimenter le débat.
Gros bémols aux revendications de l’Intersyndicale
Ainsi, s’il apporte son soutien de principe « à la plupart des revendications » portant sur l’application à Mayotte du Code du Travail de droit commun, l’application à Mayotte des Conventions collectives nationales de branches, l’alignement des pensions minimum au même niveau que la métropole, le reclassement avec reconstitution de carrière reprenant en compte la totalité de l’ancienneté de services des agents concernés par les intégrations dans les fonctions publiques, la Révision du taux d’indexation des salaires dans les fonctions publiques, le Rétablissement de l’attractivité de la fonction publique de Mayotte, et l’Alignement au niveau de la métropole de toutes les prestations sociales, c’est avec des nuances. Beaucoup de nuances
Sur le code du travail, « l’objectif de l’étendre au 1er janvier 2018 est désormais dans la loi. Quiconque connait ce Code du travail, doit être conscient de l’audace de ce challenge : c’est un délai très court », déclare-t-il. S’appuyant sur le risque de bâcler toute mesure prise à la hâte. Le député évoque la possibilité de profiter de l’examen du Projet de loi El Khomri pour préciser les modalités de basculement vers le code du travail de droit commun.
En évoquant les domaines où il faut effectivement faire le forcing, comme la formation tout au long de la vie et les mesures sur l’emploi, sur le dialogue social et sur le droit syndical, « dans l’intervalle à 2018, travaillons sur ces matières-là. »
40% d’indexation pour longtemps
Les avancées semblent plus compliquées sur le 2ème point des conventions nationales. Elles ne sont plus automatiquement applicables dans les 4 vieux DOM, explique Ibrahim Aboubacar, « et à Mayotte, les partenaires sociaux nationaux ne sont pas habilités à agir. » Il faut donc modifier ces règles, « ce sera un combat », prévient-il.
Il renvoie encore à Mayotte 2025 pour l’adoption des prestations sociales, mais en prenant en compte la critique de la Cour des comptes sur les dotations nationales insuffisantes pour Mayotte.
Il a entamé sa tribune libre par une diatribe contre le « pacte Sarkozy », qui renvoyait à 25 ans la moindre avancée, le député réitère sur la question de l’indexation, « elle y était ignorée », renvoyant en écho devant les 40% accordé par le gouvernement Valls. Une surrémunération menacée par le rapport Lurel, et, selon l’élu socialiste, « par le programme de la droite » : « Dans un tel débat, est-il raisonnable de penser un seul instant que ce taux de 40% puisse bouger. »
La protestation sociale, une cause de non-attractivité
Sur la reconstitution des carrières, et les retraites, il rappelle sans le dire, que les syndicats n’avaient pas bougé en 2003, un « loupé » qu’il est possible de rattraper : « unissons nos forces pour avancer ensemble sur ce lourd chantier », et rappelle qu’un rapport d’inspection est attendu.
Sa conclusion sur l’attractivité du territoire colle à la réalité, en évoquant davantage le contexte et l’accès aux services publics, que la rémunération : « Les agents publics ne viennent pas parce que les services publics fondamentaux sont déficients : sécurité, éducation, santé, et dans le secteur privé, en plus des éléments ci-dessus, faire du business dans un climat de protestation sociale continue n’est pas la meilleure des garanties de réussite. »
Si le député évoque les responsabilités régaliennes de l’Etat, « la sécurité en particulier », sur laquelle il s’étend peu, il n’oublie pas celles des collectivités locales. « Œuvrons ensemble pour ce chantier crucial pour notre territoire », implore-t-il, en lançant une flèche ultime, à ceux qui fustigent un Mayotte 2025 qui aura pallié aux déficiences du « pacte Sarkozy » : « il est un peu gonflé, qu’au moment où il est question de construire un vrai pacte pour l’avenir de ce territoire, les défaillants-pyromanes d’hier viennent s’ériger en donneur de leçons. »
C’est ce qui s’appelle couper l’herbe sous les pieds du mouvement en cours.
A.P-L.
Le Journal de Mayotte