On a parlé de la sécurité à Mayotte dans l’hémicycle du Sénat, à l’heure des fameuses questions au gouvernement. Le mérite en revient au sénateur Thani Mohamed Soilihi, qui a interpellé le ministre de l’Intérieur, après le mouvement social et les scènes de violences concomitantes, particulièrement médiatisées en métropole.
La réponse de Bernard Cazeneuve fut brève mais laisse apparaître une grande remise à plat des services de sécurité à Mayotte.
Si le ministre confirme l’arrivée de 72 gendarmes supplémentaires, il se propose de regarder «si nous ne pouvons pas, dans le cadre d’une organisation nouvelle, rehausser encore le niveau des effectifs». Il pose également la question de «l’organisation des forces» et des relations entre les différents acteurs de la sécurité.
Car il dispose de quelques données entre les mains pour mener à bien une réflexion, et en premier lieu, les conclusions de la mission d’inspection envoyée à Mayotte. Ce rapport lui a été remis «depuis 3 semaines», de quoi préparer «un dispositif global» qu’il annoncera «à la fin du mois» pour «améliorer significativement les résultats qui ne sont pas à la hauteur de ce que je souhaite», a-t-il déclaré.
Il a, par ailleurs, confirmé sa venue «dans les mois qui viennent», «de manière à constater l’adéquation entre les objectifs que nous nous sommes assignés et les résultats que nous aurons obtenus.»
Voici la transcription complète de l’échange entre le sénateur Thani Mohamed Soilihi et Bernard Cazeneuve, le ministre de l’Intérieur.
Le sénateur Thani Mohamed Soilihi s’adressant ce mardi au ministre de l’Intérieur:
« Durant plus de deux semaines, Mayotte a été paralysée par une grève générale, à laquelle des violences urbaines intolérables se sont rajoutées. Pourtant, malgré leur gravité, ces événements ont peiné à se frayer un chemin hors des médias locaux.
Le mouvement social déclenché par les syndicats, dont les revendications concernant l’ « égalité réelle » en matière de prestations sociales et de législation du travail, a fait l’objet de discussions avec le Gouvernement à Paris. Un accord de principe a été trouvé.
« La justice privée est en train de prendre le pas sur la justice publique »
En marge de ce mouvement, des actes de violences orchestrés par de jeunes casseurs ont couté la vie à un père de famille. Ce département a connu, entre 2010 et 2014, une augmentation importante des atteintes aux personnes de plus de 76%, et aux biens de plus de 68%. Un tiers de ces actes est imputable à des mineurs. Nonobstant le travail de la justice sur place, celle-ci déplore le manque de moyens, notamment dans la diversité des réponses judiciaires.
Lasses de cette situation, 5.000 personnes ont défilé dans les rues de Mamoudzou pour dénoncer cette montée de violence et d’insécurité et crier leur exaspération. Cette mobilisation citoyenne de solidarité et d’espoir dans l’avenir du département ne pouvait rester sans réponse. La population a entendu montrer sa foi en la justice républicaine, plutôt qu’à des formes de justices privées, qui commencent hélas à faire leur apparition.
Le Premier Ministre s’est engagé mardi dernier à prendre une série de mesures fortes en faveur de cette île.
Il a également annoncé un plan contre l’insécurité et l’immigration clandestine, dont le contenu, qui sera connu d’ici un mois, s’appuiera probablement sur les préconisations faites par la mission qui a été dépêchée sur place en mars dernier.
L’insécurité et l’immigration sont devenues les deux principales préoccupations des Mahorais et risquent, si des réponses fortes ne sont pas apportées, de causer des troubles graves dans la société.
Pourriez-vous, Monsieur le Ministre, préciser dans les grandes lignes l’ensemble de ces mesures et leur calendrier ? »
Voici retranscrite la réponse faite au sénateur de Mayotte par le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve:
« Monsieur le Sénateur, vous m’interpellez sur la situation à Mayotte et je suis très conscient de la dégradation de la situation sécuritaire et c’est la raison pour laquelle au cours des derniers mois -en très étroite liaison avec les parlementaires de Mayotte- j’ai pris la décision de rehausser significativement les effectifs des forces de l’ordre à Mayotte de 72 effectifs. »
Rehausser les effectifs des forces de l’ordre
« Mais ce n’est pas simplement une question d’effectifs, c’est aussi un problème d’organisation des forces, c’est aussi un problème de relation entre la Préfecture, les forces de l’ordre, l’autorité judiciaire et les collectivités locales. Et puis, il faut aussi regarder si nous ne pouvons pas -dans le cadre d’une organisation nouvelle- rehausser encore le niveau des effectifs.
C’est la raison pour laquelle j’ai envoyé une mission à Mayotte qui m’a rendu ses conclusions il y a de cela trois semaines et j’annoncerai à la fin du mois, comme l’indiquait le Premier ministre, un dispositif global qui concernera l’organisation, les effectifs et l’articulation du rôle entre les collectivités locales, la justice, la Préfecture et les forces de l’ordre de manière à ce que nous puissions améliorer significativement les résultats qui ne sont pas à la hauteur de ce que je souhaite.
Et je me rendrai, comme l’a dit le Premier ministre, à Mayotte, dans les mois qui viennent, de manière à constater l’adéquation entre les objectifs que nous nous sommes assignés et les résultats que nous aurons obtenus. »
La rédaction
www.lejournaldemayotte.com