Seymour Morsy quitte un département sous tension

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Anchya Bamana (au centre) parmi les invités
Anchya Bamana (au centre) parmi les invités

Il était venu à Mayotte pour ça : rédiger le document cadre « Mayotte 2025 » qui prendrait le relais pour donner de la substance à une départementalisation, que la Cour des comptes avait dénoncée comme « mal préparée et mal pilotée ». « Un tiers des engagements a été réalisé », se réjouit Seymour Morsy, en se félicitant samedi soir à la case Rocher du constat partagé avec le président du conseil départemental d’une « parfaite imbrication entre le plan pluriannuel d’investissement du département, Mayotte 2025, le CPER et les fonds européens. »

Un président Soibahadine Ibrahim Ramdani dont l’absence était remarquée, comme celle de tous les conseillers départementaux, ce qui, renseignements pris, relèverait plus d’une nouvelle désorganisation interne à leur maison que d’un acte intentionnel. Les élus seront d’ailleurs cités dans son discours.

S’il devait y avoir boycott du pot de départ du préfet, on s’attendait à ce qu’il vienne des maires, après le clash du mois dernier. 5 sur 17 étaient malgré tout présents, et non des moindres, puisqu’une de ses principales opposantes, Anchya Bamana, était là, « il faut être plus intelligent que les discordes », nous confiait-elle, et qui a eu droit à une effusion reconnaissante du représentant de l’Etat. Même réaction envers Saïd Omar Oili, président de l’association des maires. Des élus qu’il aura aidé à se structurer pour une vision de développement de leurs collectivités.

Un département en souffrance sécuritaire

L'heure était ce soir là à la détente avec Joël Garrigue et Laurent Sabatier
L’heure était ce soir là à la détente avec Joël Garrigue et Laurent Sabatier

Seymour Morsy avait listé les combats à mener en 6 points, et comme une profession de foi, il répondra personnellement de son avancée sur chacun des points, « oui, le département a maintenant les moyens de bâtir sa feuille de route sociale, ou « oui, dès 2018, Mayotte aura un code du travail comparable à celui de la métropole, ou encore « oui dans les prochaines semaines le chantier essentiel du foncier pourra commencer. » Répondant ensuite aux questions des médias, il expliquera que le décret de création de l’Etablissement public foncier, indispensable pour avancer et qu’on nous promet depuis toujours, « sera publié dans les semaines qui viennent. »

Mais s’il était venu pour construire, la déconstruction liée au phénomène croissant de délinquance s’est vite rappelé à lui, et il laisse un département en souffrance sécuritaire. C’est vers la fin de son discours qu’il reviendra un instant sur la sécurité : « La vie au jour le jour est parfois faite de tensions, hélas parfois physique. » On est loin de l’urgence évoquée par la population, et le préfet rappellera simplement « les mesures fortes pour la sécurité de nos concitoyens », que vont annoncer d’ici la fin du mois le ministre de l’Intérieur et la Ministre des Outre-mer.

« Décasés »: « Trouver un point d’équilibre pour éviter le dérapage »

Les gendarmes arrivent pour sécuriser la zone à Bouéni dimanche matin
Les gendarmes arrivaient pour sécuriser la zone à Koungou dimanche matin

Les journalistes présents ne pouvaient que l’interroger à l’issue de son discours sur les tensions communautaires entre des habitants qui expulsent des étrangers de leurs cases, dont certains en situation régulière. « Comment interpréter une action qui vise à faire partir quelqu’un qui a les mêmes droits que vous d’être sur le territoire ?! », s’exclamait-il. Justement, l’inaction des forces de l’ordre est reprochée à l’Etat, « demain (dimanche, ndlr) à Boueni, les gendarmes seront présents », affirmait-il.

Présents, mais pas actifs. « J’aimerais assez que vous vous mettiez à la place à la fois de celui qui intervient, de celui qui manifeste, de celui qui prend des coups. Il faut trouver le point d’équilibre pour que cela ne dérape pas. La pédagogie est plus importante que les coups de force. » Ce sera d’ailleurs la dernière question, Seymour Morsy goutant peu qu’on l’interview sur ce sujet le jour de ses adieux au territoire. Mais il part aujourd’hui, quand son successeur prend la suite le 23 mai, laissant prés d’une semaine de vacance de poste, avec un intérim assuré par Bruno André.

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Une équipe préfectorale réduite que le préfet appelait pourtant sa "dream team"
Une équipe préfectorale réduite que le préfet appelait pourtant sa « dream team »

Il revient sur le développement du territoire. Pour le préfet sortant, le cadre est donné, et assure que son successeur, qu’il nommera dans un accès d’enthousiasme Frédéric Bœuf, au lieu de Frédéric Veau, agira « dans la continuité de l’Etat », « en concertation avec les élus. »

Les grands chantiers structurants restent pour lui le port de Longoni, qui « va monter en puissance », ainsi que l’aéroport et le tourisme.

Ses remerciements iront en premier lieu aux partenaires sociaux, dont certains étaient présents, « un grand nombre de problèmes commencent à trouver des solutions », puis aux parlementaires, « qui ont su plaider les dossiers malgré des finances contraintes », il citera plus tard Thani Mohamed Soilihi seul présent, et ensuite sa « garde rapprochée. »

L’équipe préfectorale rappelons-le, a subi une coupe franche, avec le départ précipité du SGAR Alain Faudon, qu’il avait fait venir (il remerciera la SGAR n°2 Michel Piriou d’assurer la suite), et si sa directrice de cabinet Florence Guilbert-Bézart est félicitée pour sa présence sur le terrain et sa position « ferme sur les principes républicains », et Guy Fitzer, Sous préfet à la cohésion sociale, pour sa coordination des constructions scolaires, c’est le secrétaire général Bruno André, absent ce soir là, qui aura un des plus beaux hommages, « celui à qui nous voudrions tous ressembler (…) Il est exemplaire. »

« Un exemple pour moi »

Seymour Morsy aura sans faille accompagné les cadis. Ici au centre, le grand-cadi Nourdine Bacar, avec El Mamouni Mohamed Nassur et Leïla Al Ardah-Miri, professeur d'arabe
Seymour Morsy aura sans faille accompagné les cadis. Ici au centre, le grand-cadi Nourdine Bacar, avec El Mamouni Mohamed Nassur et Leïla Al Ardah-Miri, professeur d’arabe

Pas de mot spécifique pour le vice-rectorat, mais sa reconnaissance pour les directions déconcentrées de l’Etat. En revanche, un message particulier et fort pour le président du TGI, Laurent Sabatier et son procureur, Joël Garrigue : « Leur vigilance pour dire et faire appliquer le droit est un exemple pour tous, un exemple pour moi. » Ils auront pu prendre la juste mesure d’un tel compliment dans sa bouche.

Il conclura en citant trois élus, Sarah (Mouhoussoune, CESE), Thani (Mohamed Soilihi, sénateur, et Soibahadine (Ibrahim Ramadani, président du CD), qui l’ont soutenu dans ces lourdes dernières semaines de sa présence, marquée localement par le départ de son SGAR, la grève de l’intersyndicale de l’égalité sociale, les émeutes urbaines, et les agressions mortelles.

Un contexte où toutes les initiatives citoyennes sont les bienvenues, « n’oubliez pas les cadis, s’il vous plaît. » Préfet musulman, Seymour Morsy les aura encouragés sans faille dans l’obtention d’un statut, et c’est avec un « merci » qui signifie dans les religions monothéistes, « donc l’islam », « le début de l’humanité », qu’il part mardi pour Châteauroux.

Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte

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