Le président du département ayant pris le même avion que Seymour Morsy, Mayotte se retrouve donc orpheline de sa direction bicéphale.
La volonté de la préfecture était d’aboutir au relogement des habitants expulsés de leurs cases par la population des villages du sud. Elle avait besoin pour cela des élus. Non que la loi ne soit pas de son côté, puisqu’il s’agit notamment d’étrangers en possession de titres de séjour, et que ses exécutants se placent dans l’illégalité, mais parce que la situation est complexe. Et ce ne sont pas les plus de 3 heures de discussions qui ont pu en venir à bout.
L’idée de Bruno André de faire repartir les étrangers dans les villages d’où ils étaient issus, s’est heurtée à un front unanime: « Ça ne passera jamais auprès de la population qui a délogé ces personnes! », s’est exclamé le maire de Tsingoni. « Bruno André a compris que les élus étaient excédés », rapporte Issa Issa Abdou. Le sous-préfet a demandé depuis 3 jours maintenant que soient recensées les personnes présentes sur la place de la République. Il s’est engagé sur l’expulsion des étrangers en situation irrégulière.
En attendant Frédéric Veau
D’ailleurs, la politique de lutte contre l’immigration clandestine va s’intensifier sur l’ensemble du territoire, histoire de donner des garanties aux maires. Des maires qui n’ont pas accepté de réintégrer les étrangers en situation régulière, ce qui pose un problème définitif de logement pour les personnes qui ont investi la place de la République. « Il a été convenu de saisir le nouveau préfet dès son arrivée lundi pour dresser un bilan des avancées, et décider des évolutions », souligne Issa Issa Abdou.
Parallèlement, Bruno André a annoncé qu’un travail serait mené sur le foncier et les identifications de terrains.
Des expulsions irrégulièrement appliquées
Lorsque le sous-préfet a évoqué les délogements hors la loi de la part des habitants, impliquant les maires par leur absence de réaction, les élus ont fait remarquer que les expulsions issues d’un jugement, qu’elles soient à Kawéni sur des terrains, ou à Kangani sur la carrière IBS, n’étaient jamais exécutées par la préfecture.
La demande d’autoriser les étrangers détenteurs d’un titre de séjour à se rendre à La Réunion ou en métropole a été évoquée, « ce sont les parlementaires qui doivent porter ce combat », a glissé le représentant de l’Etat. Alors que les élus concluent : « Nous n’avons rien lâché, mais la porte n’est pas fermée. Les esprits sont encore trop échauffés pour qu’une solution pérenne soit dégagée. »
« Des discussions prometteuses », pour Toillal Abdourraqui, le DGS de l’association des maires de Mayotte, qui se réjouit qu’un cadre de travail soit enfin posé sur un sujet aussi délicat.
Des années d’incohérence de la politique de l’Etat qui n’ont pu être gommées en une soirée.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte