Le préfet Frédéric Veau soumettait un Plan Sécurité Mayotte tout chaud sorti du ministère de l’Intérieur à la presse hier au soir: «C’est unique dans un département français, un plan sur mesure pour Mayotte».
Des 25 mesures que le JDM vous présentait hier, le préfet en retiendra 9 majeures. Du côté de la méthode de travail, c’est la coordination entre les services de police et de gendarmerie qui revient à plusieurs reprises, mais aussi avec les collectivités locales, la justice et le vice-rectorat. «Et c’est la réactivation de l’Etat major de sécurité que nous allons réunir chaque mois, puisqu’il devient l’outil de gouvernance de ce Plan Sécurité.»
La lutte contre l’immigration clandestine est un des points majeurs, puisque il est prévu de mettre un place un nouveau schéma missionnel dans les 3 mois sous l’autorité du préfet, « avec une coordination PAF, gendarmerie, armées et douanes ». Le trafic de drogue, « plus particulièrement le chimique », sera ciblé avec l’arrivée de 4 formateurs anti-drogue.
Placement des mineurs délinquants
Le partenariat avec les élus, « conseillers départementaux et maires » est encouragé par le préfet, « les maires ont une compétences dans la prévention de la délinquance notamment sur le transport scolaire », tout comme la sanctuarisation de l’espace scolaire, « nous allons généraliser la vidéosurveillance, et mettre en place une coordination entre le vice-rectorat et les forces de sécurité. »
Grande satisfaction pour le procureur Joël Garrigue, la mise en place d’un placement des mineurs délinquants: «Nous avons demandé un Centre éducatif fermé qui viendra compléter le seul actuellement existant à Mayotte. Le ministère de la Justice doit faire une proposition dans les 4 mois.»
Au niveau des moyens humains, 102 policiers sont annoncés dans un communiqué commun des ministères de l’Intérieur et des Outre-mer. Rien de mieux côté gendarmerie que les 42 gendarmes déjà annoncés auparavant par Bernard Cazeneuve, «mais d’autres annonces seront faites d’ici 2017», rassure le colonel de gendarmerie Jean Gouvart.
Renforts de gendarmerie contre les agressions à Vahibé
On peut malgré tout compter sur la réactivité du nouveau préfet en matière de moyens supplémentaires. Il en a fait la démonstration ces derniers jours avec l’envoi des militaires à Mtsamboro, il réitère aujourd’hui avec l’annonce de renforts d’un peloton de gendarmerie depuis La Réunion, «pour surveiller la zone sud de Mamoudzou», zone où sévissent depuis quelques jours des bandes de rançonneurs de route, dont les agressions ont été particulièrement violentes la nuit dernière. Ils resteront une dizaine de jours, et se rajouteront aux 16 gendarmes arrivés la semaine dernière.
Il a aussi fait exécuter une décision de justice «qui datait d’octobre 2015», sur l’expulsion ce jeudi matin d’habitations illégales, avec remise en état du terrain. «Il y a eu 24 reconduites à la frontière, et une interpellation pour infraction de recel», indiquait le préfet. Des jets de pierres et de bouteilles ont fait des blessés parmi les policiers et gendarmes, et de vraisemblables représailles ont blessé un gardien d’un lotissement SIM à Kwalé, et deux véhicules ont été incendiés.
Les moyens matériels accompagnent les hommes supplémentaires, souligne le Plan: «Les quatre radars seront remplacés ou verront leurs performances améliorées, comme les 7 moyens nautiques d’interception que nous remplaceront peu à peu.»
Réorganisation des brigades
Le procureur ne cachait pas sa satisfaction: «Des services judiciaires intégreront les commissariats qui permettront d’améliorer les enquêtes d’investigation, et une antenne de l’OCRIEST permettra de démanteler des filières d’immigration clandestine, et de transports d’objets volés à Mayotte vers l’Union des Comores.»
Le commissaire Miziniak peut se réjouir de l’effectif supplémentaire, «et de la future construction d’un commissariat à Mamoudzou», indique-t-il. Il se dit heureux du rapprochement police nationale-population, et d’une coordination avec la gendarmerie.
Si les effectifs de gendarmerie ne sont pas revus à la hausse, la réorganisation en cours de la brigade de Mamoudzou qui va basculer vers Koungou, à Trévani, et celle de Mzouazia à Chirongui, permettra d’améliorer l’efficacité, «nous travaillons à une implantation à Dembéni», informe le colonel de gendarmerie Jean Gouvart.
La coopération avec l’Union des Comores doit être vue sur le plan technique, reprend le préfet, «un échange des forces de police et un transfert de compétences et de savoir-faire, sur la sécurité, la surveillance maritime ou l’immigration. » Mais comme le rappelle le procureur, «pour coopérer, il faut être deux», et il faudra être attentif aux signaux du nouvel homme fort des trois îles.
Un plan bien accueilli des forces présentes à l’état-major de sécurité, mais qui se transcrit déjà dans les décisions concrètes prises depuis une semaine à Mayotte.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte