L’aménagement du marché de Mamoudzou par la CCI revient en justice

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La chambre d'appel de Mamoudzou
La chambre d’appel de Mamoudzou

La justice leur a donné un répit mais sera-t-il suffisant ? Ansoir Abdou et Ibrahim Maskati, étaient à nouveau jugés en appel hier jeudi, en tant que 1er vice-président et trésorier de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Mayotte. Et le tribunal a mis sa décision en délibéré à fin septembre. Les prochaines élections dans les CCI de France ont lieu en octobre et novembre, et si le jugement est confirmé, ils pourraient ne pas pouvoir se présenter à un nouveau mandat.

Car les 2 hommes ont été condamnés, le 4 novembre dernier, à 8 mois de prison avec sursis et à une interdiction d’exercer des responsabilités au sein de la CCI durant les 5 prochaines années. Mais tous les deux, pour des raisons différentes ont décidé de faire appel de ce jugement. «J’ai fait appel pour garder mon intégrité et ma dignité», va expliquer Ansoir Abdou à la barre. «Tout ce que j’ai fait, c’était pour ne pas faire dépenser de l’argent à la CCI qui n’avait de budget».
Ibrahim Maskati, de son côté, explique qu’il est à la CCI depuis 2006 : «Je compte continuer à avoir des responsabilités», affirme-t-il très directement.

Les trois magistrats de la chambre d’appel ont donc instruit cette affaire qui remonte à novembre 2013. Même s’il s’en défend, Ibrahim Maskati est alors en froid avec Ansoir Abdou au point d’aller déposer une plainte pour l’utilisation supposée abusive d’un véhicule. La plainte ne débouchera sur rien mais les enquêteurs vont faire une découverte. Lors d’une perquisition à la CCI, ils repartent avec des documents dont un dossier qui va attirer leur attention : celui qui concerne un projet de pelouse et de grillage autour du marché couvert de Mamoudzou.

Un devis qui baisse en 3 heures

Trois entreprises ont été apparemment consultées et l’une d’entre elles a été retenue. Plusieurs choses intriguent les enquêteurs : d’abord le montant du marché. Les deux sociétés écartés proposaient une prestation pour 75.000 et 64.626 euros. Celle qui est retenue chiffre le travail à 53.000 euros. Des prix proprement exorbitants pour un travail qui devrait se monter à moins de 20.000 euros. Ansoir Abdou reconnaît que le prix lui semble élevé et demande qu’il soit baissé. Le devis passe alors, trois heures après l’ouverture des enveloppes, à 47.500 euros, sans que les deux autres sociétés soient consultées à nouveau. C’est illégal.

Barre Chambre d'appel-tribunal de PoliceDeuxième problème, les entreprises écartées ne savaient pas qu’elles avaient déposé un dossier. Ces deux candidatures étaient des faux, visiblement réalisés sur le même ordinateur avec les mêmes fautes d’orthographe. Des témoins affirment que c’est Maskati qui auraient amené les 3 devis en même temps.

2h30 pour trouver la vérité

Une 3e anomalie concerne le paiement de l’entreprise retenue. Elle va toucher deux fois 19.000 euros alors que l’avancement du chantier n’est pas suffisant pour l’expliquer. Là encore, on évoque l’intervention de Maskati pour «forcer la main de la comptable» pour réaliser les paiements.

Autre élément troublant: après le 1er versement, l’entrepreneur retire 8.000 euros en liquide sur ses comptes. Il explique qu’il a alors acheter des matériaux pour sa maison. De quoi faire planer des doutes.

Pendant 2h30, les magistrats vont tenter de démêler le faux du vrai. Ils ne parviendront pas à savoir précisément quand Ansoir Abdou a compris que ce mode de fonctionnement était illégal. Le 1er vice-président de la CCI s’est défendu à plusieurs reprises en expliquant être intervenu de bonne foi pour bloquer les paiements restants. Il accable très clairement le trésorier.

Réquisition pour des peines alourdies

De son côté, Maskati nie quasiment tout en bloc. La seule chose qu’il concède, c’est d’avoir informé son ami Issouf de l’existence du marché mais il affirme n’être en rien impliqué dans le fait qu’il remporte le marché.

CCI Mayotte 2Mais la défense des 2 hommes est confronté à un élément qu’ils n’avaient peut-être pas anticipé. En 1ère instance, l’entrepreneur et un Directeur des services ont, eux aussi, été condamnés dans cette affaire. Pourtant, ils n’ont pas fait appel de leur condamnation… de quoi renforcer les doutes des magistrats sur le bien-fondé des arguments des deux hommes à la barre.

L’avocat général Ampuy demande de confirmer la peine de 1ère instance pour Ansoir Abdou (8 mois de prison avec sursis et interdiction de CCI pour 5 ans) en y ajoutant une condamnation pour usage de faux, un chef d’accusation pour lequel il avait été relaxé en 1ère instance.
Concernant Ibrahim Maskati, il demande d’alourdir la peine pour la faire passer de 8 mois de prison avec sursis à 10 mois avec sursis et de confirmer l’amende de 4.000 euros et l’interdiction de mandat à la CCI pour 5 ans.

Les deux hommes seront donc fixés sur le sort fin septembre.

RR
www.lejournaldemayotte.com

*Les deux hommes sont poursuivis pour «atteinte à la liberté d’accès ou à l’égalité des candidats dans les marchés publics ; faux, altération frauduleuse de la vérité dans un écrit ; recel de biens provenant d’atteinte à la liberté d’accès ou à l’égalité des candidats dans les marchés publics».

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