Un prévenu absent car expulsé… C’était la surprise du jour, à La Réunion, où devait se tenir le procès en appel très attendu de Papa Sané. Le «gourou», soupçonné d’avoir maintenu sous son emprise «mystique» une quinzaine de jeunes femmes, essentiellement d’origine mahoraise.
Ce jeudi matin, l’annonce a été faite par son avocat, Me Mihidoiri Ali : Papa Sané a été expulsé il y a deux jours. Il a été éloigné de La Réunion mardi après avoir été libéré après un défaut de procédure judiciaire soulevé par ses avocats. Il avait été emprisonné à l’issue de son premier procès mais le juge avait oublié d’émettre un mandat de dépôt. Ses avocats se sont jetés sur l’erreur pour obtenir sa libération, avant le procès en appel qui était donc prévu aujourd’hui.
Pour autant, Papa Sané n’a pas été totalement expulsé du territoire français. Après l’intervention de son avocat, la procédure a été interrompue en cours de route. Conséquence, le «gourou» a donc quitté La Réunion et il est arrivé à Paris. Mais à l’aéroport, il a été libéré juste avant de prendre un 2e avion en direction de l’Afrique de l’Ouest. L’homme est ainsi en région parisienne, libre de ses mouvements… Un nouvel épisode d’une affaire décidément totalement rocambolesque !
De la prison ferme en 1ère instance
L’homme et son épouse ont été condamnés en juin dernier pour «abus de faiblesse» et complicité. En première instance, le «gourou» a écopé de 16 mois de prison dont 8 mois ferme. La peine s’accompagnait d’une interdiction de vivre à La Réunion pendant 3 ans. Sa femme avait, quant à elle, été condamnée à 6 mois de prison avec sursis, pour complicité.
Avant même l’expulsion, Me Mihidoiri Ali souhaitait obtenir le renvoi de l’audience car, compte tenu de l’importance de l’affaire, l’avocat était surpris de son retour aussi rapide devant le tribunal correctionnel.
Partager ses enseignements
Papa Sané a toujours réfuté être un «gourou» au centre d’une dérive sectaire. En première instance, il s’était une nouvelle fois présenté comme un professeur avide de transmettre une pratique et un savoir religieux reçus d’un «guide spirituel» en Afrique. «Je partage mes enseignements avec ceux et celles qui veulent que leur soit enseignée la spiritualité (…). Les gens m’ont jugé mais il s’agit d’un retour à l’islam par la profession de foi. C’est une purification intérieure et il faut pour cela un guide que j’ai été», avait-il expliqué à la barre.
Son avocat avait aussi insisté sur l’absence de profit de son client dans cette affaire et sur le fait que les manipulations n’étaient pas avérées.
Liberté de culte contre esprit de secte
Les gendarmes ont pourtant identifié neuf femmes, considérées comme victimes directes dans cette affaire, sur les 17 qui vivaient sous son emprise au sein de sa maison à Saint-Louis. Ces jeunes femmes ont toujours martelé qu’elles étaient maîtresses de leurs choix, évoquant la liberté de culte.
Un mouvement populaire avait été créé par leurs proches pour les libérer des dérives sectaires dont elles semblaient victimes. Des violences avaient même éclaté dans le centre-ville de Saint-Louis.
Depuis, Papa Sané et son épouse avaient interdiction de se rendre à Saint-Louis et d’entrer en contact avec les victimes.
Ce «foundi» et «imam» autoproclamé a été mis en examen pour «abus frauduleux de l’ignorance ou de la faiblesse de personnes en état de sujétion psychologique ou physique» et sa compagne est poursuivie pour complicité. Le procès en appel est donc renvoyé au 26 janvier prochain.
RR
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