Cette année, la fête de Kawéni va se dérouler… sur la plage de Tanaraki, dans la commune de Mtsangamouji! L’information peut paraître absurde mais c’est pourtant le choix fait par l’association «Action coup de pouce» qui s’occupe de l’événement. Outre le manque de moyens de financier pour l’organiser, la nécessité de garantir que tout se passera bien a guidé la décision.
«Il y a deux semaines, certains jeunes se sont mis à casser des voitures alors qu’on organisait une cérémonie de remise de diplômes pour les adultes. Et quand je vois comment ça a dégénéré, je préfère prévoir les choses autrement», explique Dhoirfia Saindou, la présidente de l’association. Comme cette fête est prévue autour des 140 enfants et adolescents suivis par «Action coup de pouce», le risque était en effet important que d’autres jeunes viennent transformer les festivités en champ de bataille. Des bus amèneront donc les enfants de l’association à Tanaraki.
«On est un peu déçus parce qu’on a avait beaucoup travaillé sur cette journée», confie Dhoirfia. L’association fait en effet plancher ses enfants sur le thème «Zama Zahale», en français le «Kawéni d’autrefois». Les jeunes sont allés voir les aînés et ils les ont fait parler de la vie d’avant dans le quartier.
Un livre pour la fin de l’année
«Ce que les grands-parents ont vécu, ils nous l’ont raconté. Et avec tout ça, les jeunes ont fait plein de choses», détaille Dhoirfia. Ce mercredi à Tanaraki, ce sont donc trois ateliers sur les sept encadrés par l’association qui proposeront leurs créations: théâtre, poésie et chant/danse. «En organisant la fête en dehors du quartier, nous n’avons pas pu faire venir les parents et les grands-parents qui ont participé. Mais on s’arrangera pour qu’ils voient ce qu’on a fait de leurs histoires. Notre objectif principal est toujours de rassembler les jeunes de différents quartiers et de créer des moments de partage intergénérationnel».
Beaucoup de vidéos ont été faites. Elles ne pourront pas non plus être diffusées pour que tous les jeunes s’approprient l’histoire de leur quartier et celle des aînés. Mais l’atelier «lecture/écriture» continue son travail et l’association espère que d’ici au mois d’octobre, le livre sur l’histoire du quartier sera achevé.
Pas encore la sérénité
Si Kawéni n’aura pas sa fête, le quartier a tout de même retrouvé un certain calme après la destruction d’une dizaine de bangas et le décasage des familles qui y vivaient à la fin du mois de juillet. «Ca devait arriver un jour, ça ne m’a pas étonné», explique Dhoirfia qui comprend l’exaspération des habitants face aux actes d’incivilités, de vandalismes et aux agressions. «On sait qu’il y a encore du racket dans le quartier mais on ne sait plus quoi faire. Avec l’association, on a demandé aux parents de ces jeunes de venir. On a essayé plusieurs fois, mais ça n’a rien donné».
Ces parents ont parfois tendance à justifier les actes de leurs enfants, par l’absence de père ou la nécessité de trouver à manger. «On sait que ces jeunes manquent de suivi et d’encadrement…» regrette Dhoirfia. Au sein du quartier, malgré l’action d’associations aussi nécessaires que mobilisées, la sérénité ne reviendra pas complètement de sitôt.
RR
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