Notre confrère et surtout écrivain* Zaïdou Bamana, un des fils du Mzé, s’est penché sur le mode de développement qui collerait le mieux à la peau de Mayotte. Il en est ressorti une loi bizarrement condensée en Lop-Didm (LOP-DIDuM sonnerait mieux au palais), dite « Loi d’orientation et de programmation pour le développement inclusif et durable de Mayotte*** » (Lire une-loi-de-developpement-inclusif-pour-mayotte)
Ce n’est pas la première fois que Zaïdou Bamana est force de proposition d’un modèle de développement. Il maintient d’ailleurs qu’un « Big Push » financier, à l’image de l’investissement dont ont bénéficié les 4 autres DOM en 1946, permettrait de faire sortir Mayotte de sa « trappe à pauvreté ».
Sa proposition part du travail du député PS de Guadeloupe Victorin Lurel, préalable à la Loi sur l’égalité réelle. Mais son « big-bang économique » et sa stratégie de développement n’ont pas été retenus, pourtant « il s’imposait sans aucun doute pour Mayotte. »
L’exclusion généralisée
Zaïdou Bamana fait un constat sombre de la mondialisation telle qu’elle est pratiquée, et cite Ignacy Sachs** : « La mondialisation reproduit entre pays le modèle pervers de ‘concentration et d’exclusion’ qui existe à l’échelle nationale entre centre et périphérie et profite à quelques uns pour exclure la majorité. » L’économiste plaide alors pour un développement inclusif « qui vise à l’intégration économique des exclus, notamment les travailleurs du secteur informel à intégrer à l’économie formelle. »
Sans quoi, le journaliste rappelle qu’on fabrique de l’exclusion, avec « des moyens de subsistance précaires, tirés de petites exploitations agricoles familiales qui ne permettent pas l’accès à la protection sociale, la participation à la vie politique », et plus généralement, aux services publics, « l’éducation, la santé et le logement. »
Il propose de financer ces quatre secteurs, protection sociale, éducation, santé et logement, par la redistribution du Produit Intérieur brute (PIB, la richesse produite par un territoire).
« La société est le problème, pas l’individu »
Un développement qui intègre les exclus non pas comme assistés, mais comme acteurs, « tous les groupes doivent contribuer à la création d’opportunités, partageant les bénéfices du développement et participant à la prise de décision. » Un concept pacificateur, « le développement inclusif est une des conditions de la sécurité. Les révoltes et les conflits se nourrissent souvent d’un sentiment d’exclusion et d’injustice, à l’égard d’un groupe social ou d’une communauté ethnique ou religieuse. »
En un mot, il s’agit de « traiter de la société qui change pour s’adapter à la différence et combattre la discrimination. C’est la société qui est considérée comme un problème, et non l’individu. »
Les objectifs du millénaire pour le développement collent parfaitement, et nous ne citerons que les premiers : Eradiquer l’extrême pauvreté et la faim, Atteindre un niveau d’éducation primaire universel, promouvoir l’égalité des sexes. Elle correspond aussi à un aboutissement de l’une des conclusions des Etats généraux de l’Outre-mer, qui voulait favoriser le développement endogène.
Élever le débat des futures législatives
Cette loi est à écrire. Et Zaïdou Bamana invite les candidats aux futures élections législatives à être force de proposition. Il en donne les six articulations centrales :
– Etablir une définition du développement inclusif et durable pour le Département de Mayotte
– Instaurer des principes pour guider l’action de l’administration publique
– Engager le gouvernement à adopter une stratégie de développement inclusion applicable à tous les ministères
– Attribuer au ministre de l’outre-mer la responsabilité de déposer la Stratégie gouvernementale de développement inclusif et durable à l’Assemblée nationale et d’en présenter le bilan aux cinq ans
– Engager les ministères et les organismes visés à identifier les actions qu’ils mèneront pour contribuer à l’atteinte des objectifs gouvernementaux de la stratégie
– Instaurer des mécanismes d’évaluation afin de mesurer les progrès accomplis.
« Avec cette loi, la France marque ainsi sa volonté et son ambition d’inscrire sa politique dans une nouvelle dynamique envers ses concitoyens mais aussi envers ses interlocuteurs locaux et nationaux. »
Un projet de loi qui lutte contre la pauvreté et œuvre en faveur du développement humain dans les secteurs de l’économie, du social et de l’environnement, « pour un développement économique équitable et riche en emplois. »
Après les Etats généraux et Mayotte 2025, un enfant du pays propose de se pencher sur un modèle de société que pourra s’approprier la population, permettant « une meilleure visibilité de l’action gouvernementale. »
A.P-L.
Le Journal de Mayotte
*Ouvrage référencé à la BNF : « Le choix du refus, Mayotte et l’indépendance des Comores » – Courriel : bamana.zaïdou@wanadoo.fr
** Ignacy Sachs : Directeur d’études honoraire à l’Ecole des hautes études en sciences sociales de Paris
*** Zaïdou Bamana la rebaptise « Loi Bamana », « en hommage au Mzé »