Après les Antilles-Guyane et la métropole, l’Océan Indien inaugure une nouvelle juridiction, créée par la réforme pénale maritime. Depuis l’ordonnance de 2012 qui pose les nouvelles bases de la répression en matière de sécurité maritime, six de nouveaux tribunaux maritimes ont vu le jour. En plus de ceux du Havre, de Brest, Bordeaux, Marseille et Cayenne (pour la zone Atlantique), c’est désormais à Saint-Denis de La Réunion que se tient le siège d’une juridiction appelée à se réunir régulièrement. La zone Pacifique sera couverte ultérieurement.
Son rôle: juger des affaires mettant spécifiquement en cause les professionnels de la mer. Ces dossiers ne seront donc plus mélangés avec les affaires des audiences correctionnelles classiques.
Une autre spécificité de cette juridiction est «l’échevinage», ce qui signifie que les affaires sont instruites à la fois par des juges professionnels et des personnes n’appartenant pas à la magistrature.
«La particularité du tribunal maritime tient dans le fait qu’il est présidé par un magistrat assisté de deux assesseurs qui sont, eux, issus du milieu de la pêche», explique Bérangère Prud’homme, la procureure adjoint de Saint-Denis en charge des affaires maritimes.
A Saint-Denis, ils seront six à venir apporter, à tour de rôle, leur expertise sur le milieu de la mer.
«Ils sont recrutés pour une durée de huit ans par une commission régionale composée de magistrats et de personnes ayant connaissance du milieu maritime. Ils ont prêté serment en août», précise Bérangère Prud’homme.
De nombreux dossiers de Mayotte
Le tribunal maritime de Saint-Denis est donc compétent à l’échelle régionale. C’est par lui que passeront les affaires concernant La Réunion, les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) et donc des Îles éparses, mais aussi celles de Mayotte. La juridiction s’attend d’ailleurs à ce qu’une part importante de ses dossiers proviennent de notre département.
«La situation à Mayotte est plus compliquée qu’à La Réunion, avec une activité de pêche traditionnelle qui préexistait à la départementalisation. Depuis, il y a eu une période transitoire pendant laquelle il a été proposé aux contrevenants de se mettre aux normes. Cette période est aujourd’hui terminée», relève Bérangère Prud’homme.
Le droit commun s’applique donc dans nos eaux et d’ailleurs, sur les quatre premiers dossiers devant être instruits ce mercredi, trois mettent en cause des professionnels mahorais.
Les 4 premières affaires
A la barre, on va donc trouver un homme qui aurait utilisé le bateau de son père pour organiser des promenades touristiques au large de Mayotte. Problème: L’embarcation ne répondait pas aux normes de sécurité et l’activité rémunérée n’était pas déclarée.
Seront également jugés l’équipage d’un bateau contrôlé en train de pêcher sans marin professionnel à bord ni aucun titulaire d’un permis de navigation. Le 3e dossier «mahorais» de la journée concerne un prévenu à qui l’on reproche d’avoir pris la mer avec une embarcation en très mauvais état.
La 4e et dernière affaire concerne un pêcheur de Saint-Pierre, au sud de La Réunion. Il aurait loué illégalement ses services à une société pour transporter des employés et des matériaux pour des travaux sur un programme houlomoteur (un équipement qui tire son énergie de la houle) au large de Saint-Pierre.
Les pilotes de kwassas jugés à Saint-Denis
Les affaires en provenance de La Réunion devraient être moins nombreuses que celles de Mayotte, car globalement, très peu d’infractions sont relevées par la gendarmerie maritime ou la Direction de la mer dans les eaux réunionnaises. «Les professionnels semblent respecter la réglementation, mais de façon générale, nous proposons d’abord aux personnes mises en cause de régulariser leur situation», note Bérangère Prud’hommes.
«Ce qui est jugé par le tribunal, ce sont les infractions graves compromettant la sécurité et la vie humaine», conclut Mme Prud’homme… mais pas les affaires concernant les kwassas. « Les pilotes de kwassas ne sont pas poursuivis pour des infractions spécifiquement maritimes. Ils le sont pour l’aide à l’entrée et au séjour de personnes en situation irrégulière, aggravé par la mise en danger de la vie d’autrui. Ces poursuites restent donc du ressort de la juridiction de Mayotte », précise Joël Garrigue, le procureur de la République à Mamoudzou.
Pour le tribunal correctionnel de Mayotte, la création de cette nouvelle juridiction ne devrait donc qu’alléger de façon relativement anecdotique la masse de travail.
RR, le JDM
avec le JIR.
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