30 ans de l’ACFAV : « Si j’étais une fille, je n’aimerais pas être embrassée de force »

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Djamayel Djalalaine appelait à
Djamayel Djalalaine appelait à éliminer ces violences

« Moi si j’étais un homme, je t’offrirais des fleurs pour ton appartement, je serais romantique »  chantait Diane Tell. C’est sur ce modèle que des collégiens de Koungou ont affiché sur des panneaux les regards croisés, garçons-filles, souvent machistes, puisqu’il s’agissait de dénoncer les violences faites aux femmes, avec quelques perles, « si j’étais une fille, je n’aimerais pas être appelée ‘pétasse’ », ou de l’autre côté, « si j’étais un garçon, je leur dirais ‘Eh, les gars ! Ne touchez pas à un cheveu des filles sinon je vous dénonce à la police’ ».

Des vérités aussi, « si j’étais une fille, je voudrais la même liberté que les garçons » ou « si j’étais un garçon, je leur expliquerais qu’une fille peut être policière, boxeuse ou médecin », « je laverais les assiettes et rangerais les chambres ». Et des douleurs, « si j’étais une fille, je n’aimerais pas être embrassée de force », « je n’aimerais pas être frappée si je faisais mal les choses », ou « si j’étais un garçon, j’arrêterais d’insulter les filles. »

L’ACFAV, Association pour la condition féminine et l’aide aux victimes, qui va basculer dans le giron de France Victimes, est née de la capacité à s’indigner de Faouzia Cordji qui a créé en 1986 l’association de défense de la condition féminine. Elle fêtait ce vendredi ses 30 ans sans la présence de représentants de la préfecture de Mayotte, ni du conseil départemental, ni des maires.

« ‘Elimination’ des violences faites aux femmes »

Reconstitution de situations qui débouchent sur de la violence
Reconstitution de situations dont l’engrenage amène à des actes violents

Il ne faut pas croire que cette société matriarcale qu’est Mayotte, dont les combats ont été portés par les femmes, est exempte de violences envers elles : « Nous avons accueilli 230 victimes à l’ACFAV depuis le début de l’année », rapporte son directeur – Djamayel Djalalaine, qui préfère parler d’une Journée « d’élimination » des violences faites aux femmes. La gendarmerie en a enregistrées 380.

Plusieurs dispositifs ont été mis en place. L’ouverture du service d’aide aux victimes a permis une prise en charge personnalisée, et le 55.55, numéro vert gratuit « mis en place par le sous-préfet Grégory Kromwell », disponible 24h/24, a enregistré 3.000 appels depuis sa mise en place en 2015.

En 2010, un service d’hébergement d’urgence a été installé, de 87 places dont 4 réservées aux femmes victimes de violence, après ordonnance de protection délivrée par le tribunal d’Instance. Et depuis 2015, le dispositif d’accueil de jour permet une prise en charge dans l’urgence, lors d’une fuite face aux violences physiques par exemple.

Pas encore de « Salle Mélanie »

Le clip de la classe ULIS du collège de Koungou
Le clip de la classe ULIS du collège de Koungou

« Il faut savoir que sur 100 femmes victimes de violences, 80 vont retourner vivre avec leur conjoint, ce qui a impliqué le recours à une conseillère conjugale pour une thérapie de couple », explique-t-il. Une permanence est assurée par Tama au sein des services de gendarmerie et de police.

Il reste malgré tout beaucoup à faire* pour Djamayel Djalalaine , « comme la mise en place d’une convention de main courante pour systématiser les plaintes, et d’une équipe de médecins formés. Ou le recours au téléphone doté d’une touche avertissant directement la gendarmerie. » Une structure n’existe pas encore à Mayotte, « la ‘Salle Mélanie’, du nom de cette jeune femme violée, qui dû répéter son agression aux gendarmes, psychologues, médecins successifs », revivant autant de fois son traumatisme, « maintenant, tous sont réunis pour l’entendre une seule fois. »violence-si-jetais-une-fille

Les collégiens de la classe ULIS de Koungou, proposaient leur clip vidéo sur le silence assassin des proches des victimes de violences, tandis que la classe de 3ème 3 se lançaient dans la reconstitution d’une scène qui ne pouvait que déboucher des actes violents. Une interprétation sans cafouillages de la part des comédiens en herbe, avec une Maria plus vraie que nature, dans le rôle de la copine envahissante et pas vraiment compatissante.

En conclusion, la répartie des parents auprès desquels leur fille Fatima se plaint des violences de son mari : « Il faut que tu supportes ça, c’est ton mari, rentre à la maison. » Mais ce n’est qu’une pièce de théâtre…

Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte

* Après Sada, Journée de sensibilisation aux violences faites aux femmes ce samedi 26 novembre 2016 depuis 8 heures à Bandrélé – Danses et chants traditionnels sur la thématique des violences faites aux femmes, interventions des partenaires et débats suivis d’échanges avec le public. Cette action est à l’initiative de la mairie de Bandrélé et portée par l’association Watoinia de Bandrélé.

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