Les enjeux de pouvoir ne sont pas seulement à trouver du côté de la politique. Car les élections concernent aussi beaucoup d’autres secteurs y compris le sport. Là aussi, Mayotte apprend les principes et le respect de la démocratie. Deux ligues sportives témoignent de la délicate transition vers cette culture réellement démocratique.
A la ligue de basket-ball, cet apprentissage se fait dans la douleur. Au mois de juillet dernier, nous nous faisions l’écho d’un scrutin tendu pour le comité directeur. Face à l’essentiel de l’équipe sortante, une deuxième liste tentait de changer la donne et de prendre les rênes d’un sport très populaire dans notre département. L’ambiance était tendue car, avant même le scrutin, les challengers dénonçaient des irrégularités et soupçonnaient les sortants de vouloir manipuler les opérations de vote. Le résultat de l’élection, qui a reconduit l’équipe en place, a poussé les vaincus à dénoncer la sincérité de l’élection.
Quatre mois plus tard, une conciliation menée par le comité national olympique et sportif (CNOSF) donne raison, sur l’essentiel, aux récriminations des membres de la liste battue. Le conciliateur «propose» même à la ligue régionale de basketball de convoquer, «dans les meilleurs délais», une assemblée générale pour procéder à un nouveau vote. En réalité, il ne s’agit pas d’une «proposition». Les mesures préconisées par les conciliateurs du CNOSF «doivent être appliquées dès leur notification». Ceux qui ne seraient pas satisfaits de la mesure ont 15 jours pour faire appel.
568 voix contestées
Le conciliateur n’invalide pas la liste victorieuse mais confirme les accusations des perdants: «deux des seize personnes figurant sur la liste ‘développement régional du basket maoré’ ne remplissaient pas les conditions d’éligibilité prévues». Mais comme il y avait 14 postes à pourvoir, le CNOSF considère que cela ne change rien.
En revanche, la sincérité du scrutin pose problème. En effet, le conciliateur note «qu’un doute pèse sur la régularité du processus électoral», les candidatures n’ayant pas été communiquées aux clubs 15 jours avant le scrutin. Par ailleurs, le CNOSF conteste 568 voix, qui représentent les votes de présidents de clubs ou de personnes dont l’affiliation à la ligue n’était pas à jour ou prouvée le jour du vote.
Et comme la liste qui a remporté l’élection avait 324 voix d’avance, le conciliateur note que «cette irrégularité serait de nature à entrainer l’annulation du scrutin» si une procédure judiciaire était lancé. Le basket mahorais devrait donc revoter.
Le football ne veut plus de crise
La situation est un peu différente du côté du football. Une assemblée générale élective est convoquée ce dimanche matin, de 8h30 à midi, au cinéma Alpa Joe à Mamoudzou. Là aussi, il s’agit de désigner le président, le trésorier et l’ensemble des représentants au comité directeur du football masculin, féminin, diversifié et des jeunes. 19 postes sont à pouvoir et deux listes avaient été déposées. Mais il n’y en aura pourtant qu’une seule mise aux votes dimanche.
Là encore, ce sont les opposants à l’équipe sortante qui crient à la manipulation. Pourtant, cette fois-ci, il semblerait que les tords soit du côté des recalés. C’est encore l’ancienneté d’un colistier qui ne serait pas suffisante pour qu’il prétende se présenter. La commission de surveillance des opérations électorales a donc rejeté cette 2e liste… contre l’avis de l’équipe sortante qui, officiellement, acceptait l’idée de ce match démocratique.
Pour ou contre la seule liste
Mohamed Boinariziki, le président sortant de la ligue de Mayotte de football (LMF) a même proposé de valider la 2e liste malgré tout, en vain. Car le président fait partie de ces amoureux du football qui sont traumatisés par l’effondrement de la ligue et la grave crise qu’elle a connu il y a quelques années. A l’issue d’un mandat de 4 ans durant lequel, peu à peu, l’organisation du football mahorais a été patiemment remis sur de bons rails, les sortants ne veulent surtout pas «replonger dans le chaos d’il y a 5 ans».
Conséquence, il n’y aura donc qu’une seule liste mais elle pourrait tout de même ne pas gagner. En effet, les votants sont appelés à voter pour ou contre elle. Elle pourrait donc être rejetée lors du vote de dimanche et ainsi permettre, éventuellement, à la 2e liste de revenir dans un nouveau rendez-vous électoral…
Dans le sport aussi, les stratégies et les matchs ne se jouent pas que sur les terrains.
RR
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