Il y a des nuages dans le ciel du sud malgache ces derniers jours. Mais pas de pluie. Toujours pas de pluie. Dans le sud de Madagascar, la sécheresse qui sévit depuis si longtemps met en danger vital 1,4 million de personnes, principalement des enfants et des personnes âgées. Près de 850.000 personnes sont déjà dans un état préoccupant. Elles ne sont pas en mesure de satisfaire leurs besoins nutritifs basiques et devront espérer qu’une aide alimentaire d’urgence arrive. La cause: d’abord le déficit de pluie et la faiblesse voire l’absence de récoltes.
Le sud est actuellement dans une période traditionnellement charnière de l’année. Les récoltes n’ont pas encore été faites, les réserves sont au minimum, voire vides. Dans le sud malgache, on prévoit que les champs de maïs donneront 80% de moins que l’an dernier qui avait déjà été une année très maigre.
Toujours plus de malnutrition
La crise alimentaire se poursuit donc après déjà plus de 3 ans difficiles. Cela fait même six ans que le taux de malnutrition ne cesse d’augmenter. «Nous avons aujourd’hui des cas de malnutrition aiguë sévère, déplorait Mamy Razanamahefa, médecin, dans les colonnes du Monde il y a 10 jours.
«Selon l’UNICEF, la moitié des enfants malgaches de moins de 5 ans souffrent de malnutrition, ce qui entraîne des bouleversements physiques mais également un ralentissement de leur développement intellectuel. Les conséquences à l’échelle du pays sont importantes. Faute de pouvoir étudier convenablement, ces 2 millions d’enfants ne pourront pas produire pour leur pays. Une étude réalisée par l’organisation onusienne a montré que la Grande Ile perd ainsi chaque année, en termes de productivité économique, 700 millions de dollars (660 millions d’euros) à cause de la malnutrition», expliquait le journal.
Une condamnation à mort
«La malnutrition aiguë sévère est une condamnation à mort assurée, indiquait également Olivier Banquet, directeur d’Action contre la faim à Madagascar. Cette situation fait de la malnutrition un enjeu de santé et de développement majeur, pourtant à ce jour il reste sous-financé.»
Nos confrères de RFI se sont également rendus dans le sud malgache. Ils y ont rencontré Karaniteny, 47 ans, qui a perdu sa fille âgée de 10 ans. «Elle a mangé les feuilles et les fruits de cactus rouge. On n’a rien d’autre à manger que ça, le soir et le midi. Et après, elle a eu la diarrhée et elle a vomi en même temps, c’est pour ça qu’elle est morte», raconte-t-elle. Comme elle, de nombreux habitants ont tout vendu pour un peu de manioc: ustensiles de cuisines, nattes, bidons et même les rares bêtes encore élevées qui ont été bradées sur les marchés pour des fruits et des légumes.
Les religieuses contre la corruption
Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) prévoit de débloquer pour l’année prochaine 1,5 million de dollars d’aide humanitaire.
Madagascar a également obtenu 5,9 milliards d’euros des bailleurs de fonds internationaux, le 2 décembre dernier à Paris. La Banque mondiale, la Banque africaine de développement (BAD), l’Union européenne et des agences des Nations unies espèrent que la somme aidera la Grande Île à remettre son économie et en particulier son agriculture en ordre de marche après des années de crises politiques puis d’inaction du pouvoir actuellement en place. Mais rien ne garantit que la somme parviendra dans les régions où les aides directes mais aussi la construction d’infrastructures et notamment de routes est une véritable urgence.
Pour éviter le détournement des aides, dans de nombreux districts, les dons sont désormais distribués par les religieuses et non plus par les autorités locales. Ici, la corruption aussi tue doucement une population sans défense.
RR
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