René Micaud restera dans l’histoire du transport aérien comme l’un de ceux qui ont mis fin au monopole d’Air France sur les destinations françaises de l’océan Indien. Au début des années 70, la compagnie nationale règne en maître sur le paysage aérien local, avec sa desserte de La Réunion. Mais à quel prix! L’aller-retour Saint-Denis-Paris équivaut à quatre fois le SMIC.
René Micaud va, presque par hasard, se lancer dans une aventure qui va tout changer. En octobre 1990, il propose au directeur de la Jeunesse et des sports de l’époque à La Réunion de fédérer le monde sportif local dans une structure unique chargée de négocier des tarifs préférentiels avec Air France. L’idée fait rapidement son chemin avant d’être élargie aux associations socio-éducatives.
Professeur de mathématiques, René Micaud découvre à cette occasion les coulisses du transport aérien. «À Paris, j’avais dit aux gens d’Air France: Si vous ne vous occupez pas de la jeunesse réunionnaise, c’est elle qui va s’occuper de vous», confia-t-il aux médias d’alors. «Après un grand éclat de rire, ils ont accepté une réduction de 50 % pour les jeunes sportifs.»
S’attaquer à l’ensemble de l’Outre-mer
René Micaud se lance alors dans le tourisme mais le problème reste le même: les tarifs aériens exorbitants. «Dès que l’on abordait la question avec Air France, on avait l’impression de toucher à un tabou. D’où, l’idée d’une compagnie régulière concurrente.» Le premier projet, très réunionnais, est dénommé CARI, pour Compagnie aérienne régulière intercontinentale. Il ne prendra jamais son envol.
«J’ai rapidement acquis la conviction qu’aucune compagnie ne pouvait réussir contre Air France si elle ne s’attaquait pas au marché de l’ensemble des DOM, en s’appuyant sur les lobbies politiques des quatre départements. D’où l’idée d’un nom fédérateur Air Outre Mer. Air France a fini par laisser passer ce dossier pour deux raisons. D’abord ils n’y ont pas cru. Ils devaient penser: Micaud est tout seul, il va se casser la gueule. Surtout, ils ont sous-estimé la baisse de popularité de leur compagnie dans les DOM et le consensus local sur la nécessité de voir apparaître la concurrence».
Une décision politique
Et pourtant. Tous les élus soutiennent alors le projet, à la Réunion comme aux Antilles. Tout comme l’ensemble des professionnels antillais du voyage… «Finalement la décision d’accorder des droits de trafic à AOM a été une décision politique.»
Le 22 mai 1990 à 11h, le premier DC 10 30 d’Air Outre Mer se pose à Saint-Denis. Le Conseil supérieur de l’aviation marchande (CSAM) a émis un avis négatif mais René Micaud peut compter sur quelques solides appuis politiques socialistes et le ministre des Transports Jacques Douffiagues qui écarte l’avis du CSAM et signe l’autorisation de desserte de La Réunion.
Une fin précipitée
Mais rapidement, dès la fin 1990, les nuages commencent à s’accumuler. Air Outre Mer obtient à l’arraché le 29 novembre les droits de trafic sur les Antilles après un premier avis défavorable du CSAM. Mais le déficit atteint déjà 72 millions de francs et le 1er janvier 1991, René Micaud jette l’éponge.
Devenue AOM, puis Air Liberté et enfin Air Lib, la compagnie va poursuivre un parcours chaotique avant de disparaître corps et biens en 2001. L’aventure restera tout de même comme celle qui ouvert la voie à bien d’autres.
RR, le JDM
Avec le JIR.
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