« Il faut changer les mentalités et l’approche culturelle de cette fête », avance Soulaimana Chadhuli, co-secrétaire avec Fatima Chanfi de Solidaires. Seul syndicat à avoir lancé un appel à se regrouper place de la République à Mamoudzou, son représentant a été surpris de la réaction des salariés qu’il démarchait : « Ils m’ont demandé pourquoi j’appelais à manifester un jour férié ! »
Face à l’incompréhension de l’importance d’une telle journée pour les travailleurs, il appelle l’ensemble des syndicats à communiquer : « C’est un travail à faire pour sensibiliser les gens. Mais nous devons avant tout nous remettre en question. »
« On a politisé le syndicalisme à Mayotte »
Car la perte de puissance des syndicats s’explique pour lui, par l’instrumentalisation que certains en ont fait, et en font encore : « Il y a un gros problème de confiance entre la population et les salariés, envers les syndicats. On a politisé le syndicalisme, on s’est approprié le combat syndical pour s’assurer un avenir politique », explique-t-il en se référant au mouvement social de 2011, qui s’était conclu par l’élection du leader de la CFDT, Boinali Saïd, comme député. « Et les prochaines législatives vont nous en offrir d’autres exemple », déplore-t-il.
Et Solidaires se veut être ce renouveau vers un pur combat syndical que les travailleurs sont en droit d’attendre. « La grosse problématique actuelle porte sur le code du Travail. Celui qui sera applicable au 1er janvier 2018, mêlé à la loi El Khomri, exclut plusieurs mesures, dont beaucoup sont liées aux avancées syndicales, comme les prudhommes. Le patronat continue à faire la loi. Le syndicat Solidaires n’a été convié que très récemment par la Dieccte pour intégrer les négociations entre partenaires sociaux. »
Car Solidaires vient de percer aux dernières élections TPE, « nous avons détrôné la CFE CGC et l’UNSA, on ne peut donc plus nous taxer de ne pas être représentatifs. »
En mémoire des syndicalistes qui ont perdu la vie
Au moment de la photo de la douzaine de représentants syndicaux de Solidaires qui s’est déplacée, les CFDT qui se tenaient à l’écart se rapprochent. Et dommage qu’ils n’aient pas appelé à la mobilisation, car leur secrétaire départemental Balahachi Ousseni, avait bossé son sujet : « Nous sommes venus pour célébrer une Fête du travail que nous devons à la révolte des salariés américains qui réclamaient en 1886 la journée de travail de 8 heures. »
Il rappelle l’importance de se mobiliser pour cette Fête, « implantée en France en 1947 » : « Plusieurs depuis, sont morts dans des combats pour améliorer nos conditions de travail, pour la préservation de la santé des travailleurs, ou l’amélioration de leurs rémunérations face à la volonté des employeurs de les exploiter. »
Il explique n’avoir pas eu le temps de communiquer cette année, dans un contexte de mobilisation lors de la Crise de l’eau, mais traduit dans ses propos une base de rassemblement des forces syndicales, pour voir fleurir qui sait, lors d’un prochain 1er mai un défilé unitaire autour de la mémoire d’un combat qui fête cette année ses 70 ans en France.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte