M.S. arrive à la barre en trainant des pieds. Lui, c’est justement le parquet qui le traine en appel, pour avoir contesté une peine jugée trop clémente en correctionnelle. Le 10 mars dernier, à 20h30, il escalade la façade d’un immeuble des Hauts Vallons et se glisse dans un appartement. Son occupante, surprise, va dans une 2ème temps être très réactive puisqu’elle parvient à arracher son sac à main des mains de son voleur, qui s’enfuit avec une sacoche de maquillage, et parvient à crier « au voleur ! ».
Ses voisins l’entendent, ils sont gendarme et policier, et parviennent à rattraper M.S., à le ceinturer et à le maintenir au sol au rond point du M’biwi, en attendant l’arrivée de renforts.
Né aux Comores en 1992, M.S. est arrivé enfant à Mayotte, expulsé en 2002, revenu en 2003, expulsé de nouveau en 2008, et de retour en 2015. La malchance, évoquée par l’avocat général, il ne la connaît donc pas seulement lors de son cambriolage, mais tout au long de sa jeune vie. Il vit en couple avec une collégienne dans un banga, informe le président du tribunal.
Le jugement de 1ère instance, 8 mois de prison et l’interdiction de séjour sur le territoire français, ne sera pas aggravé, au grand soulagement du prévenu qui repart finir de purger sa peine en prison.
Travail d’intérêt général plutôt que la prison
C’est également un appel du ministère public qui amène M.C. à la barre. Il avait refusé le 23 août 2016 de s’arrêter lors d’un contrôle routier dans sa commune de naissance, Mamoudzou. Il faut dire qu’il n’avait pas assuré son véhicule et qu’il détenait 11,2 g de résine de cannabis. Il se livre d’ailleurs à un petit trafic qui l’avait mené en prison, fait remarquer l’avocat général Robert Ampuy, qui rappelle que des rouleaux de bangué ont été retrouvés dans le passé en sa possession.
Condamné à 7 mois de prison ferme en 1ère instance, il veut s’en sortir en évoquant un emploi qui l’attend dans le bâtiment. Un argument de poids qui va alléger sa peine, puisque la collégialité de juges le condamnera plutôt à 140 heures de travail d’intérêt général, à effectuer dans un délai de 18 mois. Et lorsqu’il aura terminé de purger sa peine actuelle.
Prison et chimique
Le seul détenu à avoir personnellement contesté sa peine, c’est N.L. Nous sommes dans un huis clos familial dont il conteste le rôle qu’on lui prête. Sa mère l’accuse de violence depuis qu’il est sorti de prison en février 2015, et de les avoir, elle et son compagnon, menacé de mort. « Elle explique que vous avez soustrait des marchandises dans le container de votre beau-père, que vous réclamiez 50 euros pour acheter du chimique, et que vous les avez menacés de mort s’ils vous renvoyaient en prison. Leurs enfants ont peur de vous. »
Lui explique qu’il avait effectivement par le passé volé quelques vêtements dans le container, « on ne m’en achetait pas », et qu’il a essayé d’entrer dans la maison familiale ce 20 octobre 2015, parce qu’il avait faim. Mais il conteste avoir menacé sa famille avec un tournevis noir et rouge, comme le décrit son beau-père, tournevis qu’on retrouvera dans une sacoche en sa possession.
Des histoires de mères qui préfèrent accuser leur enfant plutôt que leur compagnon pourvoyeur de finances, le tribunal en regorge. Mais ce qui fera la différence cette fois, c’est la drogue, et il le reconnaît : « Oui, j’en consomme, et ça peut parfois me rendre agressif. » Il n’a pas d’emploi : né à Dzaoudzi, il a effectué sa scolarité en PPF (Section Préprofessionnelle), mais n’a pas de papier, « prenez-vous en charge pour les faire ! », interpelle le juge.
Et son casier judiciaire se rappelle à lui par la voix de l’avocat général : « Plusieurs condamnations pour vol aggravé, dont la première à un mois de prison par le tribunal pour enfant, une peine peu habituelle pour ce tribunal. »
Le jugement sera le même qu’en première instance, soit un an de prison ferme.
A.P-L.
Le Journal de Mayotte