Cela fait quelques jours que les usagers du sud de l’île commencent à recevoir leur facture d’eau trimestrielle. À la surprise générale des habitants, il n’y a aucune différence de facturation entre la période où les coupures d’eau ont eu lieu, et celle antérieure à la crise. Pour certains, ces montants sont même supérieurs durant la période du 16 décembre 2016 au 4 avril 2017. Suite à la remontée de ces informations auprès des membres des «Assoiffés de Mayotte», ceux-ci indiquent avoir relevé plusieurs «anomalies» sur les factures présentées.
Pour eux, l’engagement pris par le SIEAM envers la population, de ne pas facturer les ménages n’ayant pas eu accès à l’eau potable pendant 4 mois, n’a pas été tenu. La décision a donc été prise de s’organiser et de se préparer à une «riposte». «Le collectif des Assoiffés se devait d’exister de manière officielle et légale afin de pouvoir mener des actions concrètes sur le terrain. Une association va nous permettre de nous faire entendre en tant que personne juridique avec la capacité d’agir», indique Ousseni Balahache, l’un des membres actifs de l’ancien collectif. Ainsi naît l’association «Les Assoiffés de Mayotte» qui se dit prête à aller devant les tribunaux, en portant plainte contre le SIEAM et la SMAE.
Beaucoup d’interrogations
Malgré les nombreuses réunions qui ont eu lieu, ses derniers mois entre les représentants des habitants du centre et du sud, le SIEAM et la SMAE, rien ne semble avoir changé. La désillusion est énorme pour les habitants de Sada, Ouangani, Chiconi, Dembéni, Bandrélé, Chirongui, Bouéni et Kani-Kéli. Le préjudice a été estimé par les Assoiffés à 7 millions d’euros, sur une base de 120.000 personnes n’ayant pas eu accès à l’eau potable pendant 120 jours. Cette crise, sans précédent, est donc loin d’être finie. «Ce n’est que le commencement», confirme Soufiani Malide, autre membre de la première heure des Assoiffés. «L’eau se raréfie. Les ressources diminuent et nous, nous sommes dans l’incompréhension. On est en droit de se poser quelques questions».
Et les questions sont nombreuses du côté des habitants du Centre et du Sud qui se demandent notamment comment les estimations des volumes d’eau ont été effectuées et pourquoi l’index des compteurs n’est pas visible sur les factures qui sont déjà arrivées dans certains foyers.
«On devait remettre les compteurs à zéro et à la place, on se rend compte qu’on sera amené à payer une eau qui n’était pas potable», poursuit Soufiani Malide.
Fédérer l’île
La première tâche que l’association s’est fixée est de recueillir toutes les factures des personnes concernées afin de les analyser et de les comparer avec d’autres, plus anciennes. Des permanences vont être mises en place dans les 8 communes touchées par la crise. L’association, bien qu’ayant des actions très concrètes en tête, n’a pas encore voté son conseil d’administration. Les démarches sont en cours, mais d’ores et déjà, il a été établi que celui-ci sera composé de 16 personnes.
«Nous avons vocation à vouloir rassembler le territoire. L’accès à l’eau potable, la gestion de cette ressource… Cela nous concerne tous. Nous traiterons des problématiques liées à l’eau, mais de manière plus générale, il est question d’environnement et aussi de biodiversité parce que tout est lié», explique Ousseni Balahache.
En attendant, les Assoiffés de Mayotte se disent ouverts aux discussions et sont dans l’attente d’un geste du SIEAM et de la SMAE, pour de nouvelles négociations.
Abby Saïd Adinani
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