Les dernières actualités avaient placé le CODIM (Collectif pour les Intérêts de Mayotte) au centre de l’attention. Il y avait eu l’affaire «Salama» en lien avec les décasages illégaux puis l’affaire de «Chiconi» dans laquelle des habitants du village, excédés par l’insécurité et l’absence de réaction des forces de l’ordre, avait décidé de se faire justice eux-mêmes en séquestrant des «délinquants». Celle de «Mangajou» avait également beaucoup fait parler avec encore une fois un cas de justice par la loi du talion. Le CODIM s’impose comme le premier collectif citoyen de protestation concernant la problématique migratoire.
C’est désormais par le cri de la rue que le collectif tente de faire passer son message. Déterminé et renforcé, le collectif agit désormais «en faisant les choses sous la seule forme que nos élus comprennent, en criant nos idées dans la rue», explique Maila, une des membres les plus actifs. La sensibilisation de «l’élite politique» devient un enjeu de poids.
Le CODIM a sorti les grands moyens
Si la justice a souvent sanctionné les agissements abusifs du collectif, les partisans du groupement populaire ne comptent pas céder à la pression. Ainsi, ils ont décidé de ré-impulser une dynamique active à travers une autre voie que celle des décasages.
Pour son premier rassemblement massif sur la Place de la République, le CODIM n’a pas lésiné sur les moyens. Dès le début d’après-midi, Maila était à pied d’œuvre: «Je suis sur Mamoudzou depuis ce matin pour la préparation. Je suis allée chercher des nattes pour que l’on puisse faire notre sit-in. Nous avons également une sono. Tous ensemble, nous parlerons aux Mahorais et les inviterons à venir s’asseoir à nos côtés».
Un message qui reste le même
«Comme d’habitude, rien ne va à Mayotte. L’état est absent et la justice ne répond pas. Les habitants de l’île subissent l’insécurité et ne peuvent pas se défendre au risque de se retrouver devant le tribunal. Il faut que l’État prenne ses responsabilités», entendait-on sur la Place de la République aux alentours de 17h. Le message est donc similaire action après action.
«Etat = Absent», c’est le slogan inscrit sur les tee-shirts du collectif de Chiconi et repris par le CODIM durant la manifestation. Insécurité, immigration clandestine, problème foncier lié aux constructions illégales de banga, Maila répète avec ferveur des mots qu’elle a bien trop souvent utilisés. «La situation ne peut plus durer car c’est insoutenable. Notre société explose et notre lutte ne s’arrêtera pas, on va continuer le combat jusqu’à ce que chacun prenne conscience de nos souffrances».
Un appel aux élus et collectifs d’ailleurs
Pour renforcer son poids, le CODIM joue la carte de la force par le nombre. Ainsi, le collectif créé des alliances avec des groupement formés aux quatre coins de Mayotte. «Pour cette manifestation, nous nous sommes alliés à Maoré en Force mais pas seulement. Nous allons être rejoints par un collectif de Mtsahara. Un autre de Mbouini nous a approché et compte agir à nos côtés et évidemment toutes nos actions sont organisées avec le collectif de Chiconi. Les Mahorais se rassemblent pour être entendus», développe un membre du CODIM.
Au-delà de la population civile, la manifestation a lancé un appel aux élus. Mais le retour n’a pas été à la hauteur. Aucun d’entre eux n’avait répondu présent. Pourtant, certaines personnalités publiques ont décidé d’entrer en croisade avec le CODIM. Faouzia Cordjee a ainsi pris la parole au micro durant quelques minutes afin de crier son exaspération face à l’insécurité et l’impuissance de l’Etat. Kira Ada Colo était également présent, au grand plaisir des membres du CODIM.
Un nouvel acteur
La manifestation du jour marquait l’officialisation d’un rapprochement entre le CODIM et le tout nouveau collectif «Maoré en force». «Il s’agit d’un groupe qui à la base, s’est créé sur Facebook. Moi-même et une amie avons créé ce groupe pour dénoncer les traditionnels problèmes de Mayotte, les problèmes des Mahorais en métropole et surtout défendre le droit des femmes mahoraises qui se font berner par certains Comoriens en métropole», précise Dahilou Chadia, la secrétaire du jeune collectif.
La main tendue au CODIM s’est ainsi opérée comme une évidence. «Nous avons le même combat et notre but est de défendre les droits des Mahorais. Alors, comme on est plus fort ensemble, on a décidé de lutter ensemble». Le jeune collectif à plus de 2.000 membres sur sa page Facebook compte bien entrer dans le débat public des «tabous et sujets qui fâchent comme l’immigration clandestine et le comportement des Comoriens avec les Mahorais», rajoute la secrétaire.
Les doléances sont donc affichées et les collectifs continueront leurs actions, peut-être plus violemment, «si le mépris continue, nous bloquerons la Préfecture!» confie Maila du CODIM.
Ludivine Ali
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