À peine sortie de l’avion ce jeudi, que la voilà partie à la rencontre des syndicalistes qui l’attendaient depuis un petit moment. Annick Girardin a fait face aux enseignants. Autour d’eux, un important dispositif de sécurité, mais surtout des banderoles aux messages explicites: «élèves sans profs, profs sans emplois», «rectorat dans l’illégalité» ou encore «contractuels non renouvelés pour avoir manifesté». Le ton est ferme, franc… L’échange a duré une dizaine de minutes.
Parmi les préoccupations des syndicalistes venus la voir: les constructions scolaires qui ne suivent pas le nombre toujours plus grand d’enfants scolarisés, le dossier des dégrèvements fiscaux qui n’avance pas, le taux d’indexation trop faible pour rehausser l’attractivité de l’île afin de faire revenir les titulaires ou encore l’insécurité et les conditions de travail dans de nombreux secteurs du territoire. «Merci pour ce plaidoyer, sur l’ensemble de Mayotte», répond la ministre.
Elle est revenue sur tous les points soulevés par les enseignants, notamment sur la question de l’indexation. «Pour moi, il ne suffit pas de dire que l’on veut la même chose que La Réunion… On a à repenser les systèmes, mais attention, quand on repense les systèmes, quelquefois on n’a pas toujours ce que l’on veut!» a-t-elle prévenu. Un avertissement qu’elle répétera un peu plus tard: «Attention à l’ouverture de la question. Je ne suis pas sûre que lorsqu’on va recalculer le tout, tout le monde aura le même taux qu’aujourd’hui. Je viens de l’Outre-mer, et je sais quels risques nous allons prendre, en tant qu’ultramarine, selon où l’on va et ce que l’on demande».
«Toi aussi tu veux poser une question?»
Au fil de la journée, le retard sur le programme s’accumule. Il faut dire qu’Annick Girardin a pris le temps de se renseigner sur toutes les personnes qu’elle a croisé. Après avoir déposé une gerbe de fleurs sur le monument aux morts de la Place de France, à Dzaoudzi, elle a échangé quelques minutes avec les jeunes du BSMA. À quelques mètres de là, un autre comité l’attendait. Ont été évoqués, d’autres sujets tels que la prise en compte de l’ancienneté, les rotations et rythmes scolaires… Ils étaient tous là: représentants syndicaux, mais surtout parents d’élèves… Tour à tour, ils ont pris la parole.
«En tant que parents d’élèves de la commune de Chiconi, nous sommes inquiets. Depuis 3 ans, les rythmes scolaires sont mis en place, sans aucun moyen», clame cette mère. «Aujourd’hui, toutes les mairies ont la liberté avec l’éducation nationale, de choisir leur rythme d’aménagement», a rétorqué la ministre des Outre-mer. «Notre vice-rectrice impose. Il y a un gros conflit entre les maires et la vice-rectrice», a aussitôt répliqué le secrétaire Départemental SNUIPP, Rivomalala Rakotondravelo. «Je vais y aller, à Chiconi. Ils m’en parleront», a conclu la ministre.
Certains maires étaient déjà sur place, espérant faire entendre leur voix, à l’instar de la maire de Chirongui qui a suivi le cortège jusqu’au lycée de Petite Terre: «Nous avons besoin d’un plan Marshall au niveau de l’éducation. Il est temps qu’il y ait une véritable politique publique répondant aux questions de l’éducation, de la santé et de l’emploi. Nous attendons des annonces».
À quoi faut-il s’attendre ?
Si de grandes annonces doivent être faites, ce ne sera pas pour maintenant. La ministre des outre-mer a été claire: pour ce premier déplacement à Mayotte, il s’agit pour elle d’être à l’écoute, de comprendre et de mettre des visages sur des situations.
«J’ai beaucoup entendu parler de Mayotte. Il était temps pour moi de venir. C’était une priorité pour moi. C’est important d’aller au contact des gens. Oui, il y a la nécessité de faire des annonces. Un certain nombre de réponses seront données. Vous attendrez pour certaines. Oui, il y a aussi une nécessité de prendre quelques mois (c’est le cadre des assises de l’outre-mer) afin de mieux construire la réponse qui devra être apportée avant fin 2018, dans chaque territoire d’outre-mer et plus particulièrement sur Mayotte. Je prends toujours le temps, c’est ma méthode de travail.»
Après avoir échangé avec une quarantaine de lycéens, loin des caméras et des micros, Annick Girardin a pris la direction de Vahibé en début d’après-midi où elle a posé la première pierre du centre de protection maternelle et infantile du village. Elle a dans la foulée signé la convention de compensation du transfert de compétences de la PMI de l’État vers le département. Le montant de cette compensation s’élève à 120 millions d’euros.
Abby Saïd Adinani
www.lejournaldemayotte.com
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