En 6 mois, le ponton Marine de Dzaoudzi a repris des couleurs. Les moyens nautiques de l’Etat faisaient en effet pâle figure lors de la visite du ministre de l’Intérieur Bruno Le Roux en mars dernier, piquant du nez car rivalisant dans le dégonflage des boudins de leurs semi-rigides. L’information a été relayée en haut lieu, et il s’agissait ce samedi pour la ministre de baptiser la vedette d’interception rapide des Affaires maritimes le « Foundi » (le « sachant » en shimaoré), et d’accuser réception de la VERDON, Vedette Côtière de Surveillance Maritime (VCSM) de la gendarmerie nationale, jusqu’alors affectée à La Réunion.
Elle n’est pas toute jeune la VERDON. C’est une des premières VCSM sortie, en 2003, et sera dédiée comme l’Odet, à l’interception de kwassas. « Elle peut aller dans les zones difficile d’accès comme l’ouest ou le nord du lagon et surtout la nuit », explique l’adjudant David Ruiz, qui la commande.
Cela permet désormais d’avoir un moyen nautique en permanence sur l’eau et d’accentuer la lutte contre l’immigration clandestine par mer. « Elle est de plus en plus musclée, les kwassas refusant maintenant de s’arrêter. Nous sommes contraints de les inciter à beacher pour éviter une catastrophe, et d’avertir les moyens terrestres pour prendre le relais ».
Des moyens défaillants
La Police aux Frontières (PAF) n’a pas la même chance que la gendarmerie, « nous n’avons qu’un seul bateau, et il est en cale sèche », expliquent les policiers lors d’un échange mano à mano qu’affectionne la ministre, « venez discuter avec moi, même si ça nous met en retard », répètera-t-elle à plusieurs reprises, rappelant que la défense, elle connaît, « j’ai fait l’IHEDN », l’Institut des hautes études de Défense nationale. « Je vais me battre pour deux bateaux supplémentaires », lâche-t-elle en constatant « une situation difficile de l’île ».
Annick Girardin est accompagnée du général Lambert Lucas, commandant de la gendarmerie Outre-mer. Face au problème de remplacement de pièces de rechange sur des bateaux dont les marques diffèrent, il nous confirme que « l’harmonisation des moyens nautiques à Mayotte fait l’objet d’une discussion interministérielle ».
« Merci de vous détendre, on discute ! »
« Merci de vous détendre, on discute ! », lance la ministre aux agents des Douanes qui ne formaient qu’une seule ligne. Elle fait face à un semi-rigide aux coques dégonflées, « cela n’affecte pas la capacité opérationnelle », rassure Jacques Brablé, le directeur des Douanes de Mayotte, mais un de ses agents expliquera à la ministre ne pas se sentir en sécurité. Elle apprendra, toujours au débotté, que l’équipage 100% mahorais, est suivi par un psychologue à la suite d’un accident vécu en mer.
A Mayotte, surtout en ce jour religieux d’Aïd-el-Kébir, le baptême ne se fait pas au champagne mais à la noix de coco, qui a laissé éclater son eau sous l’impulsion ministérielle. Le Foundi aura coûté 450.000 euros, avec un financement multipartite « innovant » : le fonds européen FEAMP, étant épaulé par le financement des taxes thonières, ainsi que l’Agence de la Biodiversité en lien avec le Plan Environnement marin signé il y a quelques jours par le préfet Frédéric Veau. Affecté à la lutte contre la pêche illégale, il peut aller jusqu’à 20 milles des côtes et monte à 40 nœuds.
Les questions sécuritaire et de lutte contre l’immigration clandestine sont « le sujet premier » pour la ministre Girardin, « c’est pour cela qu’on arrive pas à se projeter sur ce territoire. »
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte